Publié le 16.11.2020

Conclusions de la C.M.P. sur le projet de loi Orientation et réussite des étudiants : discours de Frédérique Vidal

Frédérique Vidal s'est exprimée jeudi 15 février 2018 à l’occasion de la Lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi Orientation et réussite des étudiants.

Frédérique Vidal, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation

SEUL LE PRONONCE FAIT FOI

 

Au cœur du projet de loi Orientation et réussite des étudiants, il y a une ambition : celle d’accompagner plus de lycéens et d’étudiants vers l’enseignement supérieur et vers la réussite. C’est l’épine dorsale de ce texte, c’est la boussole que je me suis fixée et c’est cette conviction que j’ai souhaité partager avec vous tout au long de l’examen de ce texte.

Chacun le voit bien : la massification s’est faite, à l’école comme à l’université. Mais la démocratisation reste à faire : l’accomplir et la réussir, c’est là le défi qui s’offre à nous. Et c’est la raison pour laquelle, au-delà des dysfonctionnements inacceptables qu’a connu la procédure d’entrée dans l’enseignement supérieur, le Gouvernement a souhaité construire un plan Etudiants qui saisisse dans sa globalité la question de l’accès aux études supérieures, dans ses composantes pédagogiques, mais aussi matérielles.

Le plan Etudiants, c’est un bloc, un bloc qui apporte des réponses concrètes à des questions concrètes et qui ne sépare pas l’accompagnement pédagogique des politiques de prévention et de l’action en faveur de la vie étudiante.

Tout au long de la préparation et de l’examen de ce projet de loi, je me suis attachée à faire vivre le dialogue le plus large, avec l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur et des forces politiques représentées dans cet hémicycle. Parce que je sais que l’enjeu est trop important et que l’avenir de notre jeunesse fait partie de ces grandes causes qui peuvent nous rassembler très largement.

C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité asseoir ce projet sur une base saine et solide, en ouvrant dès le mois de juillet une large concertation et en la conduisant tout au long de l’été.

Ce dialogue, je l’ai noué dès le premier jour de ma prise de fonction et je le poursuis jour après jour. Parce qu’il est essentiel de continuer à partager chaque fois que nécessaire les points de vue et les attentes, d’entendre les interrogations et de dissiper les incompréhensions.

Je sais que vous partagez cette conviction, Mesdames et Messieurs les sénateurs, et nos débats en ont témoigné : ils ont permis à chacun d’exprimer, dans le respect, ses convictions propres et d’entendre ce que l’ensemble des forces politiques avaient à dire. Ce débat est légitime, il est nécessaire et sain dans une démocratie et c’est le rôle constitutionnel du Sénat que d’apporter ainsi un autre regard sur les orientations politiques du Gouvernement.

Lors de l’examen du texte en première lecture, le Sénat a fait entendre sa voix. Nous avons eu des divergences, parfois profondes, chacun a pu le constater, mais nous avons eu à cœur collectivement d’avancer ensemble et je tenais à vous en remercier, Mesdames et Messieurs les sénateurs.

Nous sommes à présent arrivés au stade de la lecture des conclusions la commission mixte paritaire. Je me réjouis que celle-ci ait été conclusive et je tiens à remercier la présidente de la commission, Catherine Morin-Desailly, le rapporteur, Jacques Grosperrin et l’ensemble des membres de la C.M.P. dans les deux assemblées d’avoir travaillé dans un esprit constructif.

Car quelles que puissent être nos divergences, ce qui nous rassemble, c’est le souci de tourner la page du tirage au sort et de mieux accompagner les futurs étudiants vers l’enseignement supérieur et vers la réussite. Et comme je l’ai rappelé lors de la présentation du texte, sur de nombreux sujets – l’orientation, le tirage au sort, mais également le régime de sécurité sociale étudiant, le Sénat a été précurseur.

 

Sur de nombreux points, nous sommes ainsi parvenus à améliorer ensemble le texte présenté par le Gouvernement, qu’il s’agisse du fait d’accueillir sur Parcoursup toutes les formations dès 2019, du renforcement des informations mises à disposition des futurs étudiants sur la plateforme ou de l’élargissement aux étudiants âgés de 25 à 28 ans des actions de prévention mises en place dans le cadre de la réforme.

Le rôle de vos commissions et de vos rapporteurs a été décisif et je tiens à le saluer, comme je salue et remercie l’ensemble des sénateurs issus des différents groupes politiques qui ont tous contribué à enrichir et à améliorer ce texte.

Nous avons eu aussi des désaccords. J’en relève deux principaux. 

Le premier tient à la signification de l’autonomie des universités. Nulle n’y est plus attachée que moi, vous le savez, et je suis convaincue que les universités sont fortes lorsqu’elles sont autonomes et qu’elles ont les moyens de construire et d’affirmer un projet, qui est à la fois pédagogique et scientifique.

Mais la régulation apportée par l’Etat doit être à la hauteur de cette autonomie, afin de garantir le respect des attentes collectives qui sont les nôtres et de principes fondamentaux. Ce n’est pas une posture théorique, c’est une conviction pragmatique : car c’est bien l’Etat, par exemple, qui est le garant de l’ouverture de l’enseignement supérieur à l’ensemble des étudiants et c’est pourquoi, durant la procédure Parcoursup, c’est le recteur qui doit pouvoir inscrire les futurs bacheliers lorsqu’ils n’ont pas eu de proposition.

Vous avez souhaité – et la commission mixte paritaire a rejoint sur ce point le Sénat – que cette inscription d’office puisse être précédée d’un dialogue. J’y suis favorable, comme je suis favorable à l’idée, issue des travaux de la C.M.P., de permettre aux établissements de nourrir ce dialogue en faisant à leur tour des propositions.

Ce dialogue est nécessaire, comme il est nécessaire que le recteur puisse, in fine, prononcer l’inscription. Je salue donc la rédaction issue des travaux de la C.M.P., qui me paraît parfaitement équilibrée.

Deuxième point de divergence : les critères de fixation des capacités d’accueil, un sujet qui fait couler beaucoup d’encre depuis quelques jours. Vous aviez souhaité, à l’initiative de votre rapporteur, corréler directement cette décision aux taux de réussite et d’insertion professionnelle.

J’ai eu l’occasion de le dire, le Gouvernement entend le souci exprimé par le Sénat de donner toute sa place à la mission d’insertion professionnelle reconnue depuis 2007 et qui est l’une des quatre missions de l’université à côté de créer de la connaissance, la diffuser et diffuser la culture scientifique et technologique. De nombreux amendements, déposés en ce sens, ont permis de consolider les dispositifs existants. Ils figurent dans le projet de loi issu de la C.M.P..

 

Pour autant, une corrélation directe entre des capacités d’accueil et des taux de réussite et d’insertion, c’était prendre le risque d’installer une forme d’adéquationnisme, alors même que nous voyons tous les jours qu’émergent tous les jours de nouveaux métiers et de nouveaux besoins en qualification – par exemple dans le domaine du numérique, car je sais que ce sujet vous est cher.

Nous avons beaucoup échangé à ce sujet avec le rapporteur, Jacques Grosperrin, et je veux le remercier de la qualité de ce dialogue, sur ce point comme sur tous les autres. Là aussi, la CMP a permis, là aussi, de clarifier les choses, en mettant en avant la notion de perspectives d’insertion professionnelle et en prenant en compte le projet de formation et de recherche des établissements et les attentes des étudiants.

Cette rédaction me paraît plus équilibrée et permet de prendre en compte l’intégralité des attentes exprimées – et notamment celles des étudiants. Car vous le voyez chaque jour dans vos territoires, le choc démographique est là et nous avons le devoir d’y répondre, en accompagnant et en guidant les futurs étudiants, bien sûr, mais aussi en ouvrant largement les portes de notre enseignement supérieur, y compris celui qui est plus professionnel ou plus professionnalisant, à l’ensemble des étudiants.

 

C’est la marque du Sénat que de pouvoir exprimer ses différences de point de vue tout en faisant œuvre législative utile. Tel est bien le cas et le texte de la commission mixte paritaire, tout comme vos travaux, sont là pour en témoigner.

Vous avez, Mesdames et Messieurs les sénateurs, saisi tout l’enjeu de cette réforme et je tenais à vous en remercier : car l’urgence, c’est bien de répondre aux attentes des futurs étudiants et à leurs familles, qui ont besoin de clarté et de sérénité pour faire leurs choix en toute responsabilité.

Si vous suivez les conclusions de la C.M.P., votre vote nous permettra de clore le chapitre de la refondation juridique de l’accès à l’enseignement supérieur pour ouvrir celui de la mise en œuvre de la campagne d’affectation 2018. Je sais que les attentes et les exigences qui pèsent sur le Gouvernement sont fortes : sachez que j’y suis déterminée à y répondre avec énergie, calme et détermination, dans l’intérêt de notre jeunesse.

Je vous remercie.