Témoignages
Thierry Lodé, professeur des universités à l'Université d'Angers Faculté des Sciences
Transcription textuelle | Thierry Lodé, professeur des universités à l'Université d'Angers Faculté des Sciences
Thierry LODE : Je suis professeur des universités et je suis affecté ici à l'Université d'Angers. Je me suis retrouvé handicapé à la suite d'une maladie de la moelle épinière, c'est une paraplégique évolutive donc la maladie est plus importante peut-être que la paraplégique elle-même, puisque ça se prolonge. Donc c'était important que j'accepte que j'allais être malade et que je n'allais pas avoir les mêmes moyens qu'avant, que j'accepte aussi mon corps. Il a fallu un certain temps pour que ces choses-là se fassent et du coup, j'ai dû solliciter plus clairement, me déclarer comme handicapé et solliciter plus clairement l'institution pour qu'elle me fournisse les moyens de bien travailler.
Le médecin du travail par exemple a été très important puisqu'il a tout de suite compris quels étaient mes besoins et mes manières de travailler qui seraient différentes. Et petit à petit, l'université a mis en place une série de moyens, notamment pour que je puisse accéder dans les amphithéâtres par exemple pour donner mon enseignement, des moyens de projection vidéo, mais aussi dans mon bureau, la possibilité d'y accéder à un bureau au rez-de-chaussée, d'avoir des facilités, ne serait-ce que la proximité des places handicapées.
Et en recherche, j'ai eu aussi l'obtention de matériel plus sophistiqué comme notamment un petit fauteuil électrique qui me permet maintenant de rouler sur l'herbe. Sans ça, je pense que je n'aurais pas pu retourner facilement à l'université. Je serais peut-être resté beaucoup plus longtemps sans travailler et donc j'aurais aussi perdu puisque dans la recherche scientifique, si on reste trop longtemps sans travailler, on perd très vite tous les moyens.
C'est absolument indispensable de déclarer son handicap, d'abord pour s'accepter soi-même, pour accepter la manière dont notre corps évolue et que notre corps a changé.
Ensuite pour effectivement sensibiliser l'institution à notre nouvel être et à cette manière qu'on va avoir, différente, de faire les choses. Il ne faut pas avoir peur, même si cela peut apparaître au départ comme une situation qui va être très stressante puisqu'on va nous regarder différemment, on a dit qu'on était handicapé, il faut le dire, il faut oser le mot.
Mais en revanche, l'avantage, c'est que cette différence-là peut aussi se présenter comme un avantage. On va parler différemment des choses, on va pouvoir accéder à d'autres manières de faire qui n'étaient pas soupçonnées auparavant par l'institution elle-même et donc je pense que cela peut être bénéficiaire pour tout le monde.
Évidemment, c'est surtout indispensable de le faire pour soi-même puisque c'est une manière d'envisager enfin de retravailler, de s'y mettre et d'accepter de prendre des responsabilités.
Déclarer son handicap, ce n'est pas rien, mais ça change tout.
Louise Dessaivre-Audelin, conservatrice des bibliothèques de l'université de Picardie
Transcription textuelle | Louise Dessaivre-Audelin, conservatrice des bibliothèques de l'université de Picardie
Louise DESSAIVRE-AUDELIN : Je suis directrice de la bibliothèque universitaire. Je gère l'ensemble des bibliothèques de l'université de Picardie.
Mon handicap s'est manifesté de façon tout à fait accidentelle, tout d'un coup, j'ai perdu la vue sur l'œil droit. Il s'agissait d'un décollement de rétine qui n'a pas été diagnostiqué suffisamment à temps.
Du coup, malgré 2 opérations, je n'ai pas pu récupérer mon acuité visuelle. J'ai attendu pas mal de temps avant de faire la démarche de me faire reconnaître travailleur handicapé.
Sur le moment, je n'avais pas du tout cette idée en tête parce que je me disais, on peut vivre avec un œil. Petit à petit, je me suis rendu compte que non, ce n'était pas si anodin que ça.
Eric Heidrich, technicien de maintenance au CNAM
Transcription textuelle | Eric Heidrich, technicien de maintenance au CNAM
Éric HEIDRICH : Je suis technicien d'exploitation de maintenance et des traitements de données en informatique. Je travaille à la DSI du Conservatoire National des Arts et Métiers. J'installe, je déploie et j'assiste aussi des utilisateurs dans leur quotidien au niveau de leur poste informatique. J'ai été confronté à un grave accident.
J'ai eu un trauma crânien qui a révélé par la suite des séquelles au niveau de la marche. Donc, j'ai des difficultés pour monter les escaliers, je les monte marche par marche, mais, pas comme monsieur Tout-le-Monde.
J'ai été reconnu inapte à exercer ma profession de boulanger, étant reconnu par la Maison des Personnes Handicapées pour avoir une RQTH.
Être RQTH m'a permis par la suite d'intégrer une formation dans des CRP, dans des centres de réadaptation professionnelle.
Mon premier diplôme était agent de maintenance en équipement informatique et bureautique. Donc, ça m'a permis de faire 2 stages, un dans une mairie, et le deuxième ici au Conservatoire National des Arts et Métiers. Suite à ce stage, j'ai pu être embauché en CDD catégorie C comme agent de maintenance informatique. Je me suis inscrit comme élève au Conservatoire National des Arts et Métiers pour prendre des cours du soir, des unités d'enseignement. J'ai pu, grâce à ça, avoir un contrat de technicien au titre du handicap. Il me permettra d'ici un an de pouvoir avoir une titularisation. Je continue mes cours pour pouvoir aussi devenir par la suite assistant-ingénieur.
Grâce à la mission handicap du CNAM et la Médecine du travail, j'ai pu accéder à des aménagements de poste, notamment au niveau des ascenseurs, où j'ai une priorité.
Si je dois monter trop d'escaliers, j'ai mes collègues qui sont prêts à prendre la relève, si je ne peux pas accéder au site.
Pour moi, il est important de déclarer son handicap. Ce n'est pas toujours très évident pour les gens de faire des appels à l'aide, mais c'est une aide qui est considérable pour pouvoir continuer à vivre et à pouvoir évoluer.
Le fait de trouver une aide auprès des MDPH et des CRP m'a permis de rebondir, changer d'orientation, et évoluer dans une nouvelle carrière professionnelle.
Déclarer son handicap, ce n'est pas rien, mais ça change tout.
Toutes les vidéos de la campagne