Publié le 29.05.2024

15e édition du Goût des sciences

Avec Lise Barnéoud, à la poursuite des Cellules buissonnières

Intéressons-nous aux auteurs des ouvrages en lice pour la 15e édition du prix Le Goût des sciences, le plus scientifique des prix littéraires. Apprenons à mieux connaître Lise Barnéoud, autrice des Cellules buissonnières (éditions Premier Parallèle).

Je m'appelle Lise Barnéoud, je suis journaliste scientifique et auteure. Je suis nommée pour Le Goût des sciences 2024.

Quelle est l'origine de ce sujet ?

Lise Barnéoud : Au détour d'une publication scientifique, on me parlait du microchimérisme qui remettait en cause la version classique du système immunitaire, comme d'une armée qui patrouille dans notre corps à la recherche du moindre élément étranger et dont l'objectif serait de tout de suite l'expulser.

Le mot même microchimértisme était complètement inconnu. Piquée de curiosité, je suis allée voir ce que c'était. En fait, ce que nous montre le microbiote et le microchimérisme c'est que nos frontières sont beaucoup plus poreuses que ce que l'on croit et qu'on est fait des autres dès le début et qu'en fait, ça se passe bien.

Je tirais un fil, deux fils, trois fils, et puis tout à coup je me suis rendu compte qu'il y avait tout un champ de recherche, inconnu pour la plupart d'entre nous. Il parle de notre intimité, en fait, ces cellules, elles sont en nous puis elles proviennent de nos proches. Alors qu'est-ce qu'elles font ? Est-ce qu'elles redéfinissent nortre identité ?

Où est-ce que ce sujet vous a-t-il emmenée ?

Lise Barnéoud La grande chance que j'ai eue avec ce livre, c'est que j'ai bénéficié de la bourse d'année sabbatique du CNL, le Centre national du livre. Ca permet de pratiquer ce que j'appelle le slow journalism, j'avais un an, un an et demi. Ca m'a emmenée géographiquement dans plein de labos du monde entier. J'ai réalisé, peut-être un peu après coup d'ailleurs, que ce microchimérisme m'a fait voyager aussi dans mon propre imaginaire et dans l'imaginaire des autres. Ce n'est pas un endroit où l'on va souvent en tant que journaliste scientifique. Au contraire, on essaye de tenir l'imaginaire un peu loin, et nous, on préfère les faits, la vérité. Et ce qui m'a fascinée dans ce microchimérisme, c'est que chacun se l'appropriait d'une manière qui lui était propre. Chacun y projetait des émotions, des envies ou des angoisses qui, en fait, sont en rapport avec la propre trajectoire que nous avons tous eue.

Quelles sont vos sources d'inspiration ?

Lise Barnéoud C'est juste une curiosité envers la science en général et la biologie en particulier. La littérature classique, contemporaine. Je trouve beaucoup aussi mon inspiration dans l'exercice physique.

Qu'est-ce qu'un bon ouvrage de vulgarisation scientifique ?

Lise Barnéoud Les livres de vulgarisation scientifique que j'aime, c'est évidemment quelque chose. Ce sont aussi des livres qui m'ouvrent vers d'autres pensées. Ce ne sont pas des livres qui ferment des portes. Ce sont des livres qui me font accéder à des univers qui en ouvrent d'autres et qui démultiplient la curiosité qu'on a au monde.

En quête de microchimérisme

Les Cellules buissonnières, est une invitation à s’immiscer dans les coulisses de la science en train de se faire. L'ouvrage est sous-titré  «  L’enfant dont la mère n’était pas née et autres folles histoires du microchimérisme  ».

En quoi consiste la découverte du microchimérisme ?

Il s’agit du fait que chacun d'entre nous porte des cellules qui proviennent d'autres individus, mais dans des concentrations extrêmement faibles, un phénomène inextricablement lié au placenta.

Le placenta, le seul organe qui nécessite la "coopération" de deux individus – la mère et l’embryon – pour être fabriqué. 

Lise Barnéoud, Les Cellules buissonnières (Premier Parallèle)

Le microchimérisme, découverte récente et iconoclaste, bouleverse bon nombre de certitudes scientifiques : « à commencer par le sens de la transmission : logiquement, ce sont les enfants qui héritent des gènes de leurs parents, pas l’inverse ». Cela remet en cause la perception même du système immunitaire et la conception de l'identité et de l'intime : « sommes-nous encore nous-mêmes ? ». 

Au fil de ses rencontres avec les chercheurs et chercheuses, du Japon aux États-Unis, en passant par l'Allemagne, l’autrice nous convie à suivre leurs tâtonnements, nous plongeant au fil des pages dans une enquête captivante.

Ce livre s’attache à raconter cette science en train de se faire (...). Il suit les tâtonnements des chercheurs. 

Lise Barnéoud, Les Cellules buissonnières (Premier Parallèle)

Journaliste scientifique et autrice, Lise Barnéoud est lauréate de la bourse d'année sabbatique du CNL qui lui a permis d'écrire ce livre. Elle a à cœur de transmettre sa curiosité pour des sujets scientifiques, sans pour autant fermer la porte à l'imaginaire. Lise Barnéoud considère que la médiation scientifique a d'ailleurs ce rôle de passeur et d'ouverture sur le monde, voire sur les mondes factuels et imaginaires car ils s'enrichissent les uns les autres.

Le Goût des sciences

Depuis 2009, le prix littéraire Le Goût des sciences valorise les meilleurs ouvrages de vulgarisation scientifique
L’objectif est de réaffirmer la place de la science au cœur de la société en mettant en lumière le travail de recherche et de médiation, au sein de deux catégories :

  • le prix du livre scientifique, décerné par un jury d’experts et de personnalités scientifiques, qui récompense un ouvrage permettant à un public non-spécialiste de comprendre des avancées ou phénomènes scientifiques et leur impact sur le monde ;
  • le prix du livre scientifique jeunesse, décerné par un jury constitué d’élèves de collèges et de médiathèques, qui récompense un ouvrage destiné à familiariser les 9-13 ans avec la science.