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Publication hebdomadaire (ISSN : 2110-6061)

Cneser

Sanctions disciplinaires

nor : MENS1600686S

Décisions du 8-6-2016

MENESR - CNESER

Affaire : Monsieur XXX, maître de conférences, né le 5 avril 1965

Dossier enregistré sous le n° 1167

Appel formé par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, d'une décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Toulouse-1 Capitole et appel incident formé par Monsieur XXX ;

Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire ;

Étant présents :

Professeur des universités ou personnel assimilé :

Monsieur Mustapha Zidi, président

Monsieur Michel Gay

Madame Camille Broyelle, rapporteure

Madame Parisa Ghodous

Monsieur Jean-Yves Puyo

Maître de conférences ou personnel assimilé :

Madame Marie Jo Bellosta

Monsieur Marc Boninchi

Monsieur Thierry Côme

Vu le code de l'éducation, notamment ses articles L. 232-3, L. 712-4, L. 952-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 et R 712-13 ; vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 6 ;

Le dossier et le rapport ayant été tenus à la disposition des parties, de leur conseil et des membres du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire dix jours francs avant le jour fixé pour la délibération ;

Vu la décision de renvoi pour cause de suspicion légitime au profit de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole, prononcée par le Cneser statuant en matière disciplinaire le 14 octobre 2014 ;

Vu la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX, le 11 juin 2015, par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Toulouse-1 Capitole, prononçant un blâme, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Vu l'appel formé le 18 juin 2015 par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, de la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole ;

Vu l'appel incident formé le 23 novembre 2015 par Monsieur XXX ;

Vu ensemble les pièces du dossier ;

Monsieur XXX ayant été informé de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane ou son représentant, ayant été informée de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Edmond-Mariette, étant présents ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, son représentant Monsieur YYY et son conseil Maître Olivier Bureth, étant présents ;

Après lecture, en audience publique, du rapport d'instruction établi par Madame Camille Broyelle ;

Après avoir entendu le témoin convoqué et présent, Madame ZZZ, inspectrice IGAENR ;

Après avoir entendu, en audience publique, les demandes et explications des parties présentes à l'audience ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Edmond-Mariette ayant eu la parole en dernier ;

Après que ces personnes et le public se sont retirés ;

Après en avoir délibéré

Considérant que la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane (ci-après « UAG ») a saisi le président de la section disciplinaire de l'université UAG, par courrier daté 9 septembre 2014, d'une demande tendant à engager des poursuites à l'encontre de Monsieur XXX, maître de conférences, doyen de l'unité de formation et de recherche (UFR) de droit et d'économie de l'UAG, et membre du laboratoire CEREGMIA, pour des fautes de nature financières, administratives et déontologiques et pour des faits de harcèlements, insultes publiques, menaces ou encore violence morale à l'encontre de la communauté universitaire, et en particulier de la présidence de l'UAG ;

Considérant que par jugement du 14 octobre 2014, le Cneser statuant en matière disciplinaire, faisant droit aux demandes de dépaysement concordantes de la présidente de l'UAG et de Monsieur XXX, a décidé du renvoi de l'affaire devant la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole ;

Considérant que par un jugement rendu le 11 juin 2015, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a décidé d'infliger un blâme à Monsieur XXX ;

Considérant que la présidente de l'UAG a fait appel de ce jugement, par un recours introduit le 18 juin 2015 devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, demandant dans ses dernières écriture, que soit prononcée contre Monsieur XXX l'interdiction d'exercer toute fonction d'enseignement ou de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant cinq ans, avec privation de la totalité du traitement ; que Monsieur XXX demandant à la juridiction « de constater l'absence de toute faute pouvant être retenue à son encontre » doit être regardé comme formant un appel incident aux fins d'annulation de la décision disciplinaire qui lui a été infligée ;  

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que par courrier en date du 26 mai 2015 adressé à la présidente de l'UAG la convoquant aux audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 en qualité, selon ledit courrier, de « témoin », le président de la section disciplinaire de première instance a indiqué à la présidente de l'UAG : « il ne sera en aucun cas question d'organiser un débat contradictoire devant nous qui se substituerait à la procédure habituelle disciplinaire qui permet d'entendre principalement les personnes déférées » ; qu'en admettant que, malgré les affirmations du président de la section disciplinaire, les audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 se soient tenues dans le respect du principe du contradictoire, il résulte de l'instruction que, à la suite de la demande formée par la présidente de l'université et de son conseil, le président de la section disciplinaire de première instance a refusé, par courrier en date du 12 mai 2015, de lui transmettre le dossier d'instruction ; que l'article R. 712-33 du code de l'éducation dispose que le rapport d'instruction et les pièces du dossiers « sont tenus à la disposition de la personne déférée et de l'autorité qui a engagé les poursuites » ; que la non transmission du rapport d'instruction à l'autorité de poursuite, qui contrairement à ce qui a été affirmé, n'a pas la qualité de « témoin » mais de partie au litige, constitue un vice de procédure ;

Considérant, en outre, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 232-2 du code de l'éducation : « le Conseil national de l'enseignement supérieur est appelé à statuer en premier et dernier ressort lorsqu'une section disciplinaire n'a pas été constituée ou lorsque aucun jugement n'est intervenu six mois après la date à laquelle les poursuites ont été engagées devant la juridiction disciplinaire compétente » ; que saisie sur renvoi par décision du Cneser disciplinaire en date du 23 octobre 2014 reçue par l'université de Toulouse-1 Capitole le 27 octobre 2014, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a rendu sa décision le 11 juin 2015 ; qu'à cette date, le délai de six mois prescrit par le code étant expiré, la section disciplinaire était incompétente pour statuer ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'UAG est fondée à demander l'annulation de la décision du 11 juin 2015 de la section disciplinaire de Toulouse-1 Capitole ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par l'UAG devant la section disciplinaire de première instance ;

Sur la procédure devant le Cneser statuant en matière disciplinaire :

Considérant que, devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, les parties ont été régulièrement convoquées à comparaître à la formation de jugement du 12 avril 2016 ; qu'en raison de la longueur des débats, l'audience a été suspendue et reportée au 7 juin 2016 ;

Considérant que les faits litigieux faisant l'objet d'une procédure pénale pendante, Monsieur XXX sollicite l'application du sursis à statuer de la procédure disciplinaire ; que, cependant, aucun texte ni principe ne faisant obstacle à ce qu'une sanction disciplinaire soit prononcée avant qu'une décision pénale définitive ne soit rendue, relativement aux mêmes faits, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer ;

Considérant que Monsieur XXX soutient que les deux membres de la commission d'instruction du Cneser statuant en matière disciplinaire ne pouvaient siéger dans la formation de jugement ; que, d'une part, ont été respectées les dispositions de l'article R. 232-36 du code de l'éducation selon lesquelles, pour chaque affaire portée devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, le président de la juridiction désigne au sein de celle-ci une commission d'instruction composée de deux membres dont l'un est désigné en tant que rapporteur ; que d'autre part, en vertu de l'article R. 232-37 du code, la commission d'instruction n'a pour mission que de recueillir des informations auprès des parties et des témoins et d'élaborer un rapport comportant l'exposé des faits et des moyens ; que ce rapport est, comme les pièces du dossier, tenu à la disposition des parties ; que les attributions de la commission d'instruction définies par les dispositions du code ne différent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne lui confèrent pas le pouvoir de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'ainsi ces dispositions n'ont pas pour effet d'attribuer aux membres de la commission d'instruction des fonctions qui, au regard du principe d'impartialité comme des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, feraient obstacle à leur participation à la formation de jugement ;

Considérant que Monsieur XXX conteste la production de nouveaux griefs, non discutés en première instance ; que dès lors qu'ils sont soumis au débat contradictoire et qu'ils ont pu être contestés par Monsieur XXX, dans le respect des droits de la défense, il n'y a pas lieu de les écarter ;

Considérant que si Monsieur XXX demande que soit écarté des débats contradictoires le rapport d'expertise produit par l'UAG, établi dans le cadre le procédure pénale en cours, ce rapport n'a, en tout état de cause, pas été pris en compte dans la présente instance ;

Sur le fond du litige :

- Sur le contexte litigieux :

Considérant que Monsieur XXX, membre du CEREGMIA depuis 1994, maître de conférences à l'UAG depuis 1998, est depuis le 14 octobre 2010 doyen de l'UFR de droit et économie ; qu'il était également ordonnateur délégué au titre de délégation de signature consentie par les présidents d'université successifs, jusqu'au retrait de cette délégation par décision du 26 mai 2014 ;

Considérant que, à la suite d'un rapport provisoire établi en 1999 par la Cour des comptes faisant part, au sujet du CEREGMIA, de « situations appelant des sanctions, sinon des correctifs sévères », un premier rapport de la Cour des comptes, en 2006, relatif aux années 1999-2003, a révélé des pratiques de gestion anormales au sein du CEREGMIA ; que la Cour des comptes a remis, le 11 janvier 2013, un second rapport, relatif aux années 2005-2010, révélant de graves dysfonctionnements dans la gestion par le CEREGMIA de fonds obtenus pour la réalisation de projets principalement financés par des fonds européens ; que le rapport indique en particulier que le CEREGMIA ne justifiait pas de l'utilisation de ces fonds conformément aux projets pour lesquels ils avaient été accordés ;

Considérant que, entrée en fonction le 25 janvier 2013, la nouvelle présidente de l'UAG, Madame AAA, a demandé au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche de diligenter une mission d'inspection de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et la recherche (IGAENR) ; que cette mission, conjointement menée avec le Contrôle général économique et financier, a donné lieu à un rapport remis par l'IGAENR le 13 mai 2014 ; qu'en raison de la gravité des dysfonctionnements relevés, ce rapport préconise d'une part l'engagement de poursuites disciplinaires à l'encontre du directeur et du directeur-adjoint du CEREGMIA ainsi que leur suspension, d'autre part le retrait de la délégation de signature accordée au doyen, Monsieur XXX, lui donnant la qualité d'ordonnateur délégué ; que la délégation sénatoriale de l'outre-mer remettait au bureau du Sénat, le 16 avril 2014, un rapport d'information dénonçant des irrégularités d'une grande ampleur commises par le CEREGMIA et préconisant « en prenant les sanctions disciplinaires et administratives qui s'imposent, [de] mettre un terme au climat délétère et aux intimidations exercées par des responsables de composantes qui défendent des comportements de « chapelle » et remettent en cause systématiquement l'autorité es instances centrales de l'université, comme celle de l'État » ; qu'en juillet 2014, l'IGAENR et le Contrôle général économique et financier remettaient un second rapport, relatif lui, à l'agence comptable et la direction financière de l'UAG révélant, notamment, que Madame BBB, agent comptable et directrice financière de l'UAG, avait perçu des primes importantes de la part du CEREGMIA et délibérément détruit avant son départ un nombre considérable d'informations et de données numériques afin de les soustraire aux autorités de contrôle ; que la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) a diligenté un audit, en mars 2013, mis en œuvre par le cabinet Ernst & Young ; que la préfecture de la Martinique, en charge de la gestion des fonds européens perçus dans le cadre de conventions que le CEREGMIA devait mettre en œuvre, a décidé de l'audit de ces conventions en décembre 2013 ; que ces différents audits ont révélé de graves irrégularités, relatives notamment à l'exécution des conventions, qui ne pouvait être établie ; qu'il en est résulté des demandes de remboursements des fonds versés à l'UAG au bénéfice du CEREGMIA ; que l'Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a diligenté un contrôle, en juin 2014, actuellement en cours ; qu'après l'ouverture d'une information judiciaire, le 7 avril 2014, pour « délit de favoritisme, détournement de fonds et escroquerie en bande organisée au détriment de l'Union européenne », le directeur et le directeur-adjoint du CEREGMIA, l'ancien président de l'université, Monsieur CCC, et l'ancien agent comptable et directrice financière, Madame BBB, ont été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire en janvier 2016 ;

Considérant qu'à la suite du premier rapport de l'IGAENR (13 mai 2014), la présidente de l'UAG a engagé des poursuites disciplinaires contre le directeur et le directeur-adjoint du CEREGMIA ainsi que contre Monsieur XXX à qui est reproché d'avoir commis de graves fautes, notamment en sa qualité de doyen de l'UFR et d'ordonnateur délégué, qui le rendent complice des irrégularités commises dans la gestion financière du CEREGMIA ainsi que d'avoir tenu des propos injurieux et insultants à l'encontre de la communauté universitaire et de la présidence de l'UAG et de s'être livré à des faits de harcèlement ;

- Sur les griefs relatifs à la gestion financière du CEREGMIA

Considérant que le CEREGMIA dispose de fonds qui, comme l'indique le rapport de l'IGAENR d'avril 2014, proviennent principalement de fonds européens versés pour financer des programmes, décidés dans le cadre de conventions, que le CEREGMIA était chargé de mettre en œuvre ; qu'entre les années 2009 et 2012, ces fonds européens représentaient 85 % des recettes du laboratoire, soit 5,7 M€ ; qu'entre les années 2009 et 2014, le CEREGMIA devait assurer neuf projets, d'un coût de plus de 13 M€ financés par le Fonds européen de développement économique et régional (FEDER) ; que parmi ces projets trois résultaient de conventions conclues avec la région Guadeloupe - IFGCar Haïti, AVANCITES 3D, EIC, conventions appelées projets INTERREG IV « Caraïbes » - et six résultaient de conventions conclues avec la préfecture de Martinique - LAMENTIN ON LINE, GREEN ISLAND, OOLOG, PRED, SAIC, Cdr-QECB, PAT-TEIN - ; qu'il résulte de l'instruction, notamment des différents rapports rendus par les autorités de contrôles, que, en moyenne, 48 % des dépenses engagées au titre de ces conventions ont été déclarées inéligibles, certaines conventions atteignant des taux d'inéligibilité de 80 % (conventions IFGCar, AVANCITE 3D et EIC) voire de 98 % (convention PRED) ; que ces inéligibilités résultent de ce que le CEREGMIA n'a produit aucun rapport d'exécution, n'a pas produit les pièces justificatives, a fourni des pièces non probantes, ou encore de l'absence de lien entre les dépenses et le projet dans le cadre duquel elles ont été engagées ; que d'ores et déjà, l'UAG a dû rembourser aux autorités de gestion une somme de 3,5 M€ ;

Considérant que, comme le révèle le rapport l'IGAENR du 13 mai 2014, à la suite d'une autorisation donnée par le conseil d'administration au seul titre des « questions diverses », sans l'avis du conseil scientifique de l'UAG, le CEREGMIA a initié, en 2010, un projet de construction d'un bâtiment pour y établir ses locaux, d'un coût de 20,5 M€ ; que le directeur du CEREGMIA, qui déclarait avoir doté le CEREGMIA d'un « trésor des Templiers », avait annoncé que le CEREGMIA financerait en totalité la construction sur ses fonds propres ; que si le projet a été finalement abandonné, plus d' 1M€ ont été versés par le CEREGMIA pour couvrir des frais d'études ; que cette somme provenant de fonds obtenus pour financer d'autres projets dont les reliquats auraient dû être restitués à l'université, son versement est irrégulier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le CEREGMIA a conclu des contrats en méconnaissance des règles de la commande et de la comptabilité publiques ; que c'est le cas notamment des contrats conclus pour l'achat de matériel informatique dans le cadre de la convention PRED, ou encore du contrat relatif à l'acquisition d'un calculateur d'un montant de 1,2 M€ ;

Considérant que l'UAG soutient, sans être contredite de façon convaincante par Monsieur XXX et son conseil, que l'ensemble de ces agissements lui a causé un préjudice financier qui s'élève à un montant d'environ 10,39 M€, en comptabilisant les sommes d'ores et déjà remboursées, celles qui devront l'être et celles dont elle n'obtiendra pas le remboursement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre d'un accord de partenariat conclu le 28 septembre 2007 entre l'Agence universitaire pour la francophonie (AUF), deux universités d'Haïti et l'UAG, a été créé, au sein de l'AUF, un Institut de la francophonie pour la gestion de la Caraïbe (IFGCar) chargé de former en Haïti des dirigeants des secteurs privé et public et permettant l'obtention d'un master délivré par l'UAG ; que le directeur-adjoint du CEREGMIA, détaché de l'UAG entre le 1er octobre 2008 et le 30 septembre 2011, dirigeait l'institut IFGCar ; que le 22 juin 2010, il a conclu une convention de collaboration entre l'institut IFGCar et l'UAG afin que cette dernière rembourse les frais avancés par l'institut pour la mise en œuvre du programme INTERREG IV « Caraïbes » (supporté par les conventions IFGCar, ADVANCITE 3D et EIC), notamment des frais de déplacement et de rémunération des personnels de l'UAG supposés participer à la formation en Haïti ; que comme le révèlent les rapports de la Cour des comptes, de l'IGAENR et du Sénat, la finalité réelle de cette convention n'est pas établie ; que la formation de master que l'IFGCar devait assurer n'était pas habilitée par l'UAG ;

Considérant que pour décliner toute responsabilité dans la commission de ces irrégularités, Monsieur XXX  soutient qu'il n'est directement visé par aucun rapport et qu'il est victime de la nuisance de la présidente de l'université ; qu'en admettant que des fautes de gestion aient été commises, elles seraient imputables à l'université, en sa qualité de porteur des projets ainsi qu'aux services de la comptabilité ;

Considérant cependant, qu'il résulte de l'instruction que les conventions dont l'exécution est à l'origine des irrégularités mentionnées ci-dessus ont été soit signées soit mises en œuvre pendant le mandat de Monsieur XXX ; qu'en sa qualité d'ordonnateur délégué, ce dernier a mandaté des dépenses dépourvues de tout lien avec les conventions au titre desquelles elles ont été engagées ou encore mandaté de telles dépenses en l'absence même de rapport d'exécution ; qu'il a signé les documents relatifs à la remontée des factures rejetées ; qu'il a validé la pratique du « surbooking », dénoncée par l'IGAENR, consistant à fournir en masse un nombre considérable de factures sans lien avec le projet afin de faire délibérément obstruction à tout contrôle ; qu'il a rendu possible l'absence de traçabilité des dépenses organisée par le directeur du CEREGMIA, comme l'indique le second rapport IGAENR (juillet 2014) ; qu'il a mandaté des dépenses effectuées en méconnaissance des règles de la commande publique, par exemple l'achat d'un calculateur pour un montant d'1,2 M€ ; qu'il a ordonné des versements irréguliers sur le compte du CEREGMIA, comme le versement, en novembre 2011, d'une somme d'environ 886 000 € qui n'a pu se faire sans son aval, ainsi que le révèle le rapport du contrôleur de gestion en date du 21 mars 2012 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Monsieur XXX a personnellement participé à la mise en œuvre des conventions et a lui-même bénéficié des irrégularités commises, notamment en percevant des primes et rémunérations, comme plus de 58 000 €, entre 2008 et 2012, dans le cadre de la convention IFGCar pour 175 heures de cours données en Haïti en 2011, alors que son activité de doyen l'occupait à temps plein en Martinique où il déclarait, en outre, effectuer plus de 500 heures d'enseignement pendant l'année 2011-2012 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, en dépit du rôle majeur joué par le directeur du CEREGMIA dans la commission des irrégularités décrites ci-dessus, Monsieur XXX y a pris activement part en ses qualités de doyen et d'ordonnateur délégué ; qu'il constituait un maillon essentiel du cercle des complicités établi par le directeur du CEREGMIA ; qu'il résulte de ce qui précède que les faits qui lui sont imputables constituent des fautes disciplinaires ;

- Sur les griefs relatifs aux propos injurieux :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Monsieur XXX a adressé un certain nombre de courriels, à destination pour certains d'entre eux d'une longue liste de destinataires, d'une particulière violence à l'égard de la présidente de l'UAG ; que c'est le cas par exemple de celui adressé le 21 janvier 2014 reprochant à la présidente de l'UAG son « incompétence » et de revêtir « les habits de la grande prêtresse manipulatrice » : que c'est le cas également du courriel du 26 janvier 2014 dénonçant, de la part de la présidente de l'université, « l'usage systématique et constant de méthodes qui s'assimilent à des pratiques "mafieuses" », « la manipulation, la dissimulation d'information » ou des « agissement "génocidaires" » ; que la teneur et le ton de ces propos dépassent ceux susceptibles d'être habituellement tenus dans le cadre du service, y compris dans un contexte conflictuel ; que l'expression de tels propos constitue une faute disciplinaire ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, eu égard à la gravité des fautes disciplinaires commises, Monsieur XXX est coupable des faits qui lui sont reprochés et qu'il convient dès lors de le sanctionner.

Par ces motifs

Statuant au scrutin secret, à la majorité absolue des membres présents,

Décide

Article 1 : La décision rendue le 11 juin 2015 par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole est annulée.

Article 2 : La sanction d'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement et de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pour une durée de deux ans, assortie de la privation de la totalité du traitement, est prononcée à l'encontre de Monsieur XXX.

Article 3 : Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du code de l'éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, à Madame la ministre de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche ; copies seront adressées, en outre, à Monsieur le président de l'université de Toulouse-1 Capitole et à Madame la rectrice de l'académie de Martinique.

Fait et prononcé en audience publique à Paris, le 8 juin 2016 à 18 h à l'issue du délibéré.

La secrétaire de séance                                                                   

Camille Broyelle

Le président

Mustapha Zidi

   

Affaire : Monsieur XXX, professeur des universités, né le 17 mars 1959

Dossier enregistré sous le n° 1168

Appel formé par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, d'une décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Toulouse-1 Capitole et appel incident formé par Monsieur XXX ;

Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire ;

Étant présents :

Professeur des universités ou personnel assimilé :

Monsieur Mustapha Zidi, président

Madame Camille Broyelle, rapporteure

Madame Parisa Ghodous

Monsieur Alain Bretto

Monsieur Jean-Yves Puyo

Vu le code de l'éducation, notamment ses articles L. 232-3, L. 712-4, L. 952-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 et R. 712-13 ; vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 6 ;

Le dossier et le rapport ayant été tenus à la disposition des parties, de leur conseil et des membres du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire dix jours francs avant le jour fixé pour la délibération ;

Vu la décision de renvoi pour cause de suspicion légitime au profit de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole, prononcée par le Cneser statuant en matière disciplinaire le 14 octobre 2014 ;

Vu la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX, le 11 juin 2015, par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Toulouse-1 Capitole, prononçant un blâme, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Vu l'appel formé le 18 juin 2015 par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, de la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole ;

Vu l'appel incident formé le 23 novembre 2015 par Monsieur XXX ;

Vu ensemble les pièces du dossier ;

Monsieur XXX ayant été informé de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane ou son représentant, ayant été informée de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Senart, étant présents ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, son représentant Monsieur YYY et son conseil Maître Olivier Bureth, étant présents ;

Après lecture, en audience publique, du rapport d'instruction établi par Madame Camille Broyelle ;

Après avoir entendu le témoin convoqué et présent, Madame ZZZ, inspectrice IGAENR ;

Après avoir entendu, en audience publique, les demandes et explications des parties présentes à l'audience ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Senart ayant eu la parole en dernier ;

Après que ces personnes et le public se sont retirés ;

Après en avoir délibéré

Considérant que la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane (ci-après « UAG ») a saisi le président de la section disciplinaire de l'université UAG, par courrier daté 9 septembre 2014, d'une demande tendant à engager des poursuites à l'encontre de Monsieur XXX, professeur des universités et directeur du laboratoire CEREGMIA, pour des fautes de nature financières relatives à la gestion du CEREGMIA et pour des faits de harcèlement, insultes publiques, menaces ou encore violence morale à l'encontre de la communauté universitaire, en particulier de la présidence de l'UAG ;

Considérant que par jugement du 14 octobre 2014, le Cneser statuant en matière disciplinaire, faisant droit aux demandes de dépaysement concordantes de la présidente de l'UAG et de Monsieur XXX, a décidé du renvoi de l'affaire devant la section disciplinaire de l'Université Toulouse-1 Capitole ;

Considérant que par un jugement rendu le 11 juin 2015, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a décidé d'infliger un blâme à Monsieur XXX, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Considérant que la présidente de l'UAG a fait appel de ce jugement par un recours introduit le 18 juin 2015 devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, demandant, dans ses dernières écritures, que soit prononcée contre Monsieur XXX l'interdiction d'exercer toute fonction d'enseignement ou de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant cinq ans, avec privation de la totalité du traitement ; que Monsieur XXX soutenant qu'aucune faute ne lui est imputable et qu'aucune poursuite ne peut être maintenue à son encontre doit être regardé comme formant un appel incident aux fins d'annulation de la décision disciplinaire qui lui a été infligée ; 

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que par courrier en date du 26 mai 2015 adressé à la présidente de l'UAG la convoquant aux audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 en qualité, selon ledit courrier, de « témoin », le président de la section disciplinaire de première instance a indiqué à la présidente de l'UAG : « il ne sera en aucun cas question d'organiser un débat contradictoire devant nous qui se substituerait à la procédure habituelle disciplinaire qui permet d'entendre principalement les personnes déférées » ; qu'en admettant que, malgré les affirmations du président de la section disciplinaire, les audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 se soient tenues dans le respect du principe du contradictoire, il résulte de l'instruction que, à la suite de la demande formée par la présidente de l'université et de son conseil, le président de la section disciplinaire de première instance a refusé, par courrier en date du 12 mai 2015, de lui transmettre le dossier d'instruction ; que l'article R. 712-33 du code de l'éducation dispose que le rapport d'instruction et les pièces du dossiers « sont tenus à la disposition de la personne déférée et de l'autorité qui a engagé les poursuites » ; que la non transmission du rapport d'instruction à l'autorité de poursuite, qui contrairement à ce qui a été affirmé, n'a pas la qualité de « témoin » mais de partie au litige, constitue un vice de procédure ;

Considérant, en outre, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 232-2 du code de l'éducation « le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche est appelé à statuer en premier et dernier ressort lorsqu'une section disciplinaire n'a pas été constituée ou lorsque aucun jugement n'est intervenu six mois après la date à laquelle les poursuites ont été engagées devant la juridiction disciplinaire compétente » ; que saisie sur renvoi par décision du Cneser disciplinaire en date du 23 octobre 2014 reçue par l'université de Toulouse-1 Capitole le 27 octobre 2014, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a rendu sa décision le 11 juin 2015 ; qu'à cette date, le délai de six mois prescrit par le code étant expiré, la section disciplinaire était incompétente pour statuer ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'UAG est fondée à demander l'annulation de la décision du 11 juin 2015 de la section disciplinaire de Toulouse-1 Capitole ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par l'UAG devant la section disciplinaire de première instance ;

Sur la procédure devant le Cneser statuant en matière disciplinaire :

Considérant que, devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, les parties ont été régulièrement convoquées à comparaître à la formation de jugement du 12 avril 2016 ; qu'en raison de la longueur des débats, l'audience a été suspendue et reportée au 7 juin 2016 ;

Considérant que les faits litigieux faisant l'objet d'une procédure pénale pendante, Monsieur XXX sollicite l'application du sursis à statuer de la procédure disciplinaire ; que, cependant, aucun texte ni principe ne faisant obstacle à ce qu'une sanction disciplinaire soit prononcée avant qu'une décision pénale définitive ne soit rendue, relativement aux mêmes faits, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer ;

Considérant que Monsieur XXX soutient que les deux membres de la commission d'instruction du Cneser statuant en matière disciplinaire ne pouvaient siéger dans la formation de jugement ; que, d'une part, ont été respectées les dispositions de l'article R. 232-36 du code de l'éducation selon lesquelles, pour chaque affaire portée devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, le président de la juridiction désigne au sein de celle-ci une commission d'instruction composée de deux membres dont l'un est désigné en tant que rapporteur ; que d'autre part, en vertu de l'article R. 232-37 du code, la commission d'instruction n'a pour mission que de recueillir des informations auprès des parties et des témoins et d'élaborer un rapport comportant l'exposé des faits et des moyens ; que ce rapport est, comme les pièces du dossier, tenu à la disposition des parties ; que les attributions de la commission d'instruction définies par les dispositions du code ne différent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne lui confèrent pas le pouvoir de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'ainsi ces dispositions n'ont pas pour effet d'attribuer aux membres de la commission d'instruction des fonctions qui, au regard du principe d'impartialité comme des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, feraient obstacle à leur participation à la formation de jugement ;

Considérant que Monsieur XXX conteste la production de nouveaux griefs, non discutés en première instance ; que dès lors qu'ils sont soumis aux débats contradictoires et qu'ils ont pu être contestés par Monsieur XXX, dans le respect des droits de la défense, il n'y a pas lieu de les écarter ;

Considérant que si Monsieur XXX demande que soit écarté des débats contradictoires le rapport d'expertise produit par l'UAG, établi dans le cadre le procédure pénale en cours, ce rapport n'a, en tout état de cause, pas été pris en compte dans la présente instance ;

Sur le fond du litige :

- Sur le contexte litigieux :

Considérant que, à la suite d'un rapport provisoire établi en 1999 par la Cour des comptes faisant part de « situations appelant des sanctions, sinon des correctifs sévères », un premier rapport de la Cour des comptes, en 2006, relatif aux années 1999-2003, a révélé des pratiques de gestion anormales du CEREGMIA ; que la Cour des comptes a remis, le 11 janvier 2013, un second rapport, relatif aux années 2005-2010, révélant de graves dysfonctionnements dans la gestion par le CEREGMIA de fonds obtenus pour la réalisation de projets principalement financés par des fonds européens ; que le rapport indique en particulier que le CEREGMIA ne justifiait pas de l'utilisation de ces fonds conformément aux projets pour lesquels ils avaient été accordés ;

Considérant que, entrée en fonction le 25 janvier 2013, la nouvelle présidente de l'UAG, Madame AAA, a demandé au ministère de l'enseignement supérieur la réalisation d'une mission d'inspection ; que cette mission, conjointement menée par l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et la recherche (IGAENR) et le Contrôle général économique et financier, a donné lieu à un rapport remis par l'IGAENR le 13 mai 2014 ; qu'en raison de la gravité des dysfonctionnements relevés, ce rapport préconise l'engagement de poursuites disciplinaires contre Monsieur XXX et, en attendant l'issue de ces poursuites, la suspension de l'intéressé ; que, le 16 avril 2014, la délégation sénatoriale de l'outre-mer remettait au bureau du Sénat un rapport d'information dénonçant des irrégularités importantes commises par le CEREGMIA et préconisant « en prenant les sanctions disciplinaires et administratives qui s'imposent, [de] mettre un terme au climat délétère et aux intimidations exercées par des responsables de composantes qui défendent des comportements de « chapelle » et remettent en cause systématiquement l'autorité es instances centrales de l'université, comme celle de l'État »; qu'en juillet 2014, l'IGAENR et le Contrôle général économique et financier remettaient un second rapport, relatif lui, à l'agence comptable et la direction financière de l'UAG révélant, notamment, que Madame BBB, agent comptable et directrice financière de l'UAG, avait perçu des primes importantes de la part du CEREGMIA et délibérément détruit avant son départ un nombre considérable d'informations afin de les soustraire aux autorités de contrôle ; que la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) a diligenté un audit, en mars 2013, mis en œuvre par le cabinet Ernst & Young ; que la préfecture de la Martinique, en charge de la gestion des fonds européens perçus dans le cadre de conventions que le CEREGMIA devait mettre en œuvre, a décidé de l'audit de ces conventions en décembre 2013 ; que ces différents audits ont révélé de graves irrégularités, relatives en particulier à l'imputabilité des dépenses aux projets auxquels elles étaient dédiées, qui ne pouvait être établie ; qu'il en est résulté des demandes de remboursement des fonds versés à l'UAG au bénéfice du CEREGMIA ; que l'Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a également diligenté un contrôle, en juin 2014, actuellement en cours ; qu'après l'ouverture d'une information judiciaire, le 7 avril 2014, pour « délit de favoritisme, détournement de fonds et escroquerie en bande organisée au détriment de l'Union européenne », Monsieur XXX a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire en janvier 2016, comme l'ont été d'autres membres du CEREGMIA ainsi que l'ancien président de l'Université, Monsieur CCC, et l'ancien agent comptable, Madame BBB ;

Considérant qu'à la suite du premier rapport de l'IGAENR (13 mai 2014), la présidente de l'UAG a engagé des poursuites disciplinaires contre Monsieur XXX ainsi que contre deux autres membres du CEREGMIA ; qu'il est reproché à Monsieur XXX d'avoir commis de graves fautes dans la gestion financière du CEREGMIA ainsi que d'avoir tenu des propos injurieux et insultants à l'encontre de la communauté universitaire, notamment de la Présidence, ainsi que de s'être livré à des faits de harcèlement à l'encontre des mêmes personnes ;

- Sur les griefs relatifs à la gestion financière du CEREGMIA :

Considérant que le CEREGMIA dispose de fonds qui, comme l'indique le rapport de l'IGAENR d'avril 2014, proviennent principalement de fonds européens versés pour financer des programmes, décidés dans le cadre de conventions, que le CEREGMIA était chargé de mettre en œuvre ; qu'entre les années 2009 et 2012, ces fonds européens représentaient 85 % des recettes du laboratoire, soit 5,7 M€ ; qu'entre les années 2009 et 2014, le CEREGMIA devait assurer neuf projets, d'un coût de plus de 13 M€ financés par le Fonds européen de développement économique et régional (FEDER) ; que parmi ces projets trois résultaient de conventions conclues avec la région Guadeloupe - IFGCar Haïti, AVANCITES 3D, EIC, conventions appelées projets INTERREG IV « Caraïbes » - et six résultaient de conventions conclues avec la préfecture de Martinique - LAMENTIN ON LINE, GREEN ISLAND, OOLOG, PRED, SAIC, Cdr-QECB, PAT-TEIN -  ; qu'il résulte de l'instruction et des différents rapports rendus par les autorités de contrôles, que, en moyenne, 48 % des dépenses engagées au titre de ces conventions ont été déclarées inéligibles, certaines conventions atteignant des taux d'inéligibilité de 80 % (conventions IFGCar, AVANCITE 3D et EIC) voire de 98 % (convention PRED) ; que ces inéligibilités résultent de ce que le CEREGMIA n'a produit aucun rapport d'exécution, n'a pas produit les pièces justificatives, a fourni des pièces non probantes, ou encore de l'absence de lien entre les dépenses et le projet dans le cadre duquel elles ont été engagées ; que d'ores et déjà, l'UAG a dû rembourser aux autorités de gestion une somme de 3,5 M€ ;

Considérant que, comme le révèle le rapport l'IGAENR (13 mai 2014), à la suite d'une autorisation donnée par le conseil d'administration au seul titre des « questions diverses », sans avis du conseil scientifique de l'UAG, le CEREGMIA a initié, en 2010, un projet de construction d'un bâtiment pour y établir ses locaux, d'un coût de 20,5 M€ ; que le directeur du CEREGMIA, qui déclarait avoir doté le CEREGMIA d'un « trésor des Templiers », avait annoncé que le CEREGMIA financerait en totalité la construction sur ses propres fonds ; que si le projet a été finalement abandonné, plus d'1 M€ ont été versés par le CEREGMIA pour couvrir des frais d'études ; que cette somme provenant de fonds obtenus pour financer d'autres projets dont les reliquats auraient dû être restitués à l'université, son versement est irrégulier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le CEREGMIA a conclu des contrats en méconnaissance des règles de la commande et de la comptabilité publiques ; que c'est le cas notamment, comme le révèle le second rapport de la Cour des comptes, des contrats de prestation de services passés avec la société FILIATIS, qui a fait l'objet d'une communication du procureur général près la Cour des comptes pour avantage injustifié à autrui et doute sérieux quant à la réalité des prestations fournies ; que c'est le cas aussi des contrats conclus pour l'achat de matériel informatique dans le cadre de la convention PRED, ou encore du contrat relatif à l'acquisition d'un calculateur d'un montant de 1,2 M€ ;

Considérant que l'UAG soutient, sans être contredite de façon convaincante par Monsieur XXX et son conseil, que l'ensemble de ces agissements lui a causé un préjudice financier qui s'élève à un montant d'environ 10,39 M€, en comptabilisant les sommes d'ores et déjà remboursées, celles qui devront l'être et celles dont elle n'obtiendra pas le remboursement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre d'un accord de partenariat conclu le 28 septembre 2007 entre l'Agence universitaire pour la francophonie (AUF), deux universités d'Haïti et l'UAG, a été créé, au sein de l'AUF, un Institut de la francophonie pour la gestion de la Caraïbe (IFGCar) chargé de former en Haïti des dirigeants des secteurs privé et public et permettant l'obtention d'un master délivré par l'UAG ; que Monsieur XXX, détaché de l'UAG entre le 1er octobre 2008 et le 30 septembre 2011, dirigeait l'institut IFGCar ; que le 22 juin 2010, il a conclu une convention de collaboration entre l'institut IFGCar et l'UAG afin que cette dernière rembourse les frais avancés par l'Institut pour la mise en œuvre du programme INTERREG IV « Caraïbes » (supporté par les conventions IFGCar, ADVANCITE 3D et EIC), notamment des frais de déplacement et de rémunération des personnels de l'UAG supposés participer à la formation en Haïti ; que comme le révèlent les rapports de la Cour des comptes, de l'IGAENR et du Sénat, d'une part, Monsieur XXX n'était pas compétent pour conclure cette convention, d'autre part, la finalité réelle de cette convention n'est pas établie ; que Monsieur XXX ne pouvait par ailleurs ignorer que la formation de Master dont il devait assurer la mise en œuvre en tant que directeur de l'institut IFGCar n'était pas habilitée par l'UAG, contrairement à ce que stipulait l'accord de partenariat du 28 septembre 2007 ;

Considérant que sur le fondement de la convention irrégulière du 22 juin 2010, Monsieur XXX, en tant que directeur de l'institut IFGCar, a irrégulièrement versé des primes importantes à Monsieur DDD et à lui-même ;

Considérant que, en sa qualité de directeur de l'institut IFGCar, Monsieur XXX a conclu, le 17 octobre 2008, une convention de prestation GECADES avec Monsieur EEE, directeur de GECADES SA et membre du CEREGMIA ; que cette convention avait pour objet le montage de dossiers de subventions dans le cadre de la mise en œuvre de l'opération INTERREG IV « Caraïbes » ; qu'elle a donné lieu à une rémunération de la société GECADES SA pour un montant de plus de 108 000 € imputé sur la convention du 22 juin 2010 conclue entre l'Institut IFGCar et l'UAG ; que décidée sans mise en concurrence et en dehors des prévisions du programme INTERREG IV « Caraïbes », cette convention est irrégulière ;

Considérant que pendant son détachement au sein de l'IFGCar (Institut), débuté en octobre 2008 mais dont l'UAG n'a eu connaissance qu'en février 2009, Monsieur XXX a perçu, entre octobre 2008 et février 2009, une double rémunération, en tant que directeur de l'IFGCar (Institut) et en qualité d'enseignant-chercheur au sein de l'UAG ; que pendant cette même période de détachement, il a perçu, en 2010, des primes pour un montant de 13 000 € prélevées sur le budget du CEREGMIA relatives à des activités de recherche ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la mise en œuvre des conventions financées par les fonds européens, Monsieur XXX a perçu des rémunérations non justifiées, notamment dans le cadre de la convention PRED, comme l'indique l'audit du bureau des contrôles de la préfecture de Martinique, ou des rémunérations non autorisées, notamment en sa qualité de directeur de l'IFGCar, Monsieur XXX ayant perçu une rémunération annuelle de 100 000 €, non autorisée par l'AUG, dont l'AUF a demandé le remboursement ;

Considérant que pour décliner toute responsabilité dans la commission de ces irrégularités, Monsieur XXX soutient que les rapports de l'IGAENR et du Sénat, établis « à charge », sont partiaux ; que le rapport de la Cour des comptes a été instrumentalisé par les autorités de contrôle et par la présidente de l'université afin de lui imputer des faits dont il n'est pas responsable ; qu'en sa qualité de directeur adjoint du CEREGMIA, il ne détenait aucun pouvoir dans la gestion des conventions financées par les fonds européens ; qu'en outre, détaché entre le 1er octobre 2008 et le 30 septembre 2011 en Haïti, à l'Institut IFGCar, les fautes dans la gestion du CEREGMIA ne sauraient lui être reprochées ; qu'en supposant que de telles fautes de gestion aient été commises, elles sont imputables à l'université, en sa qualité de porteur des projets ;

Considérant cependant, que, quel que soit le rôle exercé par le directeur CEREGMIA, Monsieur DDD, dans la commission des irrégularités relevées ci-dessus, avec l'appui de complicités au sein de l'université, il résulte de l'instruction que Monsieur XXX, en poste à l'UAG depuis 1992 en qualité de contractuel puis de maître de conférences, membre actif du CEREGMIA puis, depuis 2002, directeur adjoint du CEREGMIA, non seulement ne pouvait ignorer ces irrégularités mais a directement participé à la réalisation d'un certain nombre d'entre elles ; que son implication indirecte et directe à la commission de ces irrégularités est constitutive d'une faute disciplinaire ;

- Sur les griefs relatifs les propos injurieux :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Monsieur XXX a adressé plusieurs courriers notamment un courrier datant du 9 février 2014, adressé à la présidente de l'UAG, dans lequel est indiqué que la « duplicité, la haine, la manipulation... » sont ses méthodes de gouvernance ; que la teneur et le ton de ces propos dépassent ceux susceptibles d'être habituellement tenus dans le cadre du service, y compris dans un contexte conflictuel ; que l'expression de tels propos constitue une faute disciplinaire ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que eu égard à la gravité des fautes disciplinaires commises, Monsieur XXX est coupable des faits qui sont reprochés et qu'il convient dès lors de le sanctionner ;

Par ces motifs

Statuant au scrutin secret, à la majorité absolue des membres présents,

Décide

Article 1 : La décision rendue le 11 juin 2015 par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole est annulée.

Article 2 : La sanction d'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement et de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pour une durée de cinq ans, assortie de la privation de la totalité du traitement, est prononcée à l'encontre de Monsieur XXX.

Article 3 : Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du code de l'éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, à Madame la ministre de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche ; copies seront adressées, en outre, à Monsieur le président de l'université de Toulouse-1 Capitole et à Madame la rectrice de l'académie de Martinique.

Fait et prononcé en audience publique à Paris, le 8 juin 2016 à 18 h à l'issue du délibéré.

La secrétaire de séance                                                                  

Camille Broyelle

Le président

Mustapha Zidi

  

Affaire : Monsieur XXX, professeur des universités, né le 29 septembre 1955

Dossier enregistré sous le n° 1169

Appel formé par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, d'une décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole et appel incident formé par Monsieur XXX ;

Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire ;

Étant présents :

Professeur des universités ou personnel assimilé :

Monsieur Mustapha Zidi, président

Madame Camille Broyelle, rapporteure

Madame Parisa Ghodous

Monsieur Alain Bretto

Monsieur Jean-Yves Puyo

Vu le code de l'éducation, notamment ses articles L. 232-3, L. 712-4, L. 952-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 et R 712-13 ; vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 6 ;

Le dossier et le rapport ayant été tenus à la disposition des parties, de leur conseil et des membres du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire dix jours francs avant le jour fixé pour la délibération ;

Vu la décision de renvoi pour cause de suspicion légitime au profit de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole, prononcée par le Cneser statuant en matière disciplinaire le 14 octobre 2014 ;

Vu la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX, le 11 juin 2015, par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Toulouse-1 Capitole, prononçant une interdiction d'exercer des fonctions de direction de laboratoire de recherche pour une durée de cinq ans à l'université des Antilles et de la Guyane, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Vu l'appel formé le 18 juin 2015 par Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, de la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Toulouse-1 Capitole ;

Vu l'appel incident formé le 23 novembre 2015 par Monsieur XXX ;

Vu ensemble les pièces du dossier ;

Monsieur XXX ainsi que son conseil ayant été informés de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane ou son représentant, ayant été informée de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 20 avril 2016 ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Edmond-Mariette, étant présents ;

Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, son représentant, Monsieur YYY et son conseil, Maître Olivier Bureth, étant présents ; Maître Denis Garreau étant également présent lors de la séance du 12 avril 2016 ;

Après lecture, en audience publique, du rapport d'instruction établi par Madame Camille Broyelle ;

Après avoir entendu les témoins convoqués et présents, Madame ZZZ, inspectrice IGAENR, Monsieur AAA, spécialiste des financements européens au sein de Lexio Conseil et Monsieur BBB (professeur de sciences économiques à l'UAG) ;

Après avoir entendu, en audience publique, les demandes et explications des parties présentes à l'audience ;

Monsieur XXX et son conseil Maître Philippe Edmond-Mariette ayant eu la parole en dernier ;

Après que ces personnes et le public se sont retirés ;

Après en avoir délibéré

Considérant que la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane (ci-après « UAG ») a saisi le président de la section disciplinaire de l'université UAG, par courrier daté 9 septembre 2014, d'une demande tendant à engager des poursuites à l'encontre de Monsieur XXX, professeur des universités et directeur du laboratoire CEREGMIA, pour des fautes de nature financières relatives à la gestion du CEREGMIA et pour des faits de harcèlement, insultes publiques, menaces ou encore violence morale à l'encontre de la communauté universitaire, et en particulier de la présidence de l'UAG ;

Considérant que par jugement du 14 octobre 2014, le Cneser statuant en matière disciplinaire, faisant droit aux demandes de dépaysement concordantes de la présidente de l'UAG et de Monsieur XXX, a décidé du renvoi de l'affaire devant la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole ;

Considérant que par un jugement rendu le 11 juin 2015, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a décidé de sanctionner Monsieur XXX d'une interdiction d'exercer à l'UAG les fonctions de direction de laboratoire de recherche pendant une durée de cinq ans, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Considérant que la présidente de l'UAG a fait appel de ce jugement par un recours introduit le 18 juin 2015 devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, demandant la révocation de Monsieur XXX assortie de l'interdiction définitive d'exercer toute fonction dans un établissement public ou privé ; que Monsieur XXX a formé un appel incident le 23 novembre 2015 aux fins d'annulation de la décision disciplinaire qui lui a été infligée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que par courrier en date du 26 mai 2015 adressé à la présidente de l'UAG la convoquant aux audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 en qualité, selon ledit courrier, de « témoin », le président de la section disciplinaire de première instance a indiqué à la présidente de l'UAG : « il ne sera en aucun cas question d'organiser un débat contradictoire devant nous qui se substituerait à la procédure habituelle disciplinaire qui permet d'entendre principalement les personnes déférées » ; qu'en admettant que, malgré les affirmations du président de la section disciplinaire, les audiences de jugement des 9 et 10 juin 2015 se soient tenues dans le respect du principe du contradictoire, il résulte de l'instruction que, à la suite de la demande formée par la présidente de l'université et de son conseil, le président de la section disciplinaire de première instance a refusé, par courrier en date du 12 mai 2015, de lui transmettre le dossier d'instruction ; que l'article R. 712-33 du code de l'éducation dispose que le rapport d'instruction et les pièces du dossiers « sont tenus à la disposition de la personne déférée et de l'autorité qui a engagé les poursuites » ; que la non transmission du rapport d'instruction à l'autorité de poursuite, qui contrairement à ce qui a été affirmé, n'a pas la qualité de « témoin » mais de partie au litige, constitue un vice de procédure ;

Considérant, en outre, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 232-2 du code de l'éducation : « le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche est appelé à statuer en premier et dernier ressort lorsqu'une section disciplinaire n'a pas été constituée ou lorsque aucun jugement n'est intervenu six mois après la date à laquelle les poursuites ont été engagées devant la juridiction disciplinaire compétente » ; que saisie sur renvoi par décision du Cneser disciplinaire en date du 23 octobre 2014 reçue par l'université de Toulouse-1 Capitole le 27 octobre 2014, la section disciplinaire de l'université Toulouse-1 Capitole a rendu sa décision le 11 juin 2015 ; qu'à cette date, le délai de six mois prescrit par le code étant expiré, la section disciplinaire était incompétente pour statuer ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'UAG est fondée à demander l'annulation de la décision du 11 juin 2015 de la section disciplinaire de Toulouse-1 Capitole ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par l'UAG devant la section disciplinaire de première instance ;

Sur la procédure devant le Cneser statuant en matière disciplinaire :

Considérant que, devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, les parties ont été régulièrement convoquées à comparaître à la formation de jugement du 12 avril 2016 ; qu'en raison de la longueur des débats, l'audience a été suspendue et reportée au 7 juin 2016 ;

Considérant que les faits litigieux faisant l'objet d'une procédure pénale pendante, Monsieur XXX sollicite l'application du sursis à statuer de la procédure disciplinaire ; que, cependant, aucun texte ni principe ne faisant obstacle à ce qu'une sanction disciplinaire soit prononcée avant qu'une décision pénale définitive ne soit rendue, relativement aux mêmes faits, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer ;

Considérant que Monsieur XXX soutient que les deux membres de la commission d'instruction du Cneser statuant en matière disciplinaire ne pouvaient siéger dans la formation de jugement ; que, d'une part, ont été respectées les dispositions de l'article R. 232-36 du code de l'éducation selon lesquelles, pour chaque affaire portée devant le Cneser statuant en matière disciplinaire, le président de la juridiction désigne au sein de celle-ci une commission d'instruction composée de deux membres dont l'un est désigné en tant que rapporteur ; que d'autre part, en vertu de l'article R. 232-37 du code, la commission d'instruction n'a pour mission que de recueillir des informations auprès des parties et des témoins et d'élaborer un rapport comportant l'exposé des faits et des moyens ; que ce rapport est, comme les pièces du dossier, tenu à la disposition des parties ; que les attributions de la commission d'instruction définies par les dispositions du code ne différent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne lui confèrent pas le pouvoir de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'ainsi ces dispositions n'ont pas pour effet d'attribuer aux membres de la commission d'instruction des fonctions qui, au regard du principe d'impartialité comme des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, feraient obstacle à leur participation à la formation de jugement ;

Considérant que Monsieur XXX conteste la production de nouveaux griefs, non discutés en première instance ; que dès lors qu'ils sont soumis au débat contradictoire et qu'ils ont pu être contestés par Monsieur XXX, dans le respect des droits de la défense, il n'y a pas lieu de les écarter ;

Considérant que si Monsieur XXX demande que soit écarté des débats contradictoires le rapport d'expertise produit par l'UAG, établi dans le cadre le procédure pénale en cours, ce rapport n'a, en tout état de cause, pas été pris en compte dans la présente instance ;

Sur le fond du litige :

- Sur le contexte litigieux :

Considérant que Monsieur XXX dirige le CEREGMIA depuis sa création, en 1986 ; qu'à la suite d'un rapport provisoire établi en 1999 par la Cour des comptes faisant part, au sujet du CEREGMIA, de « situations appelant des sanctions, sinon des correctifs sévères », un premier rapport de la Cour des comptes, en 2006, relatif aux années 1999-2003, a révélé des pratiques de gestion anormales du CEREGMIA ainsi que l'exercice par son directeur d'une activité commerciale, en méconnaissance de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; qu'à la suite de ce rapport, et après communication du procureur général près la Cour des comptes aux autorités judiciaires, Monsieur XXX a été sanctionné par la section disciplinaire de l'UAG, le 30 mai 2007, d'une interdiction d'accéder à la classe supérieure de son corps pour une durée de un an ;

Considérant que la Cour des comptes a remis, le 11 janvier 2013, un second rapport, relatif aux années 2005-2010, révélant, d'une part, la poursuite d'une activité commerciale par Monsieur XXX, d'autre part, de graves dysfonctionnements dans la gestion par le CEREGMIA de fonds obtenus pour la réalisation de projets principalement financés par des fonds européens ; que le rapport indique en particulier que le CEREGMIA ne justifiait pas de l'utilisation de ces fonds conformément aux projets pour lesquels ils avaient été accordés ;

Considérant que, entrée en fonction le 25 janvier 2013, la nouvelle présidente de l'UAG, Madame CCC, a demandé au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche de diligenter une mission d'inspection ; que cette mission, conjointement menée par l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et la recherche (IGAENR) et le Contrôle général économique et financier, a donné lieu à un rapport remis par l'IGAENR le 13 mai 2014 ; qu'en raison de la gravité des dysfonctionnements relevés, ce rapport préconise l'engagement de poursuites disciplinaires contre Monsieur XXX et, en attendant l'issue de ces poursuites, la suspension de l'intéressé ; que, le 16 avril 2014, la délégation sénatoriale de l'outre-mer remettait au bureau du Sénat un rapport d'information dénonçant des irrégularités importantes commises par le CEREGMIA et préconisant « en prenant les sanctions disciplinaires et administratives qui s'imposent, [de] mettre un terme au climat délétère et aux intimidations exercées par des responsables de composantes qui défendent des comportements de « chapelle » et remettent en cause systématiquement l'autorité des instances centrales de l'université, comme celle de l'État » ; qu'en juillet 2014, l'IGAENR et le Contrôle général économique et financier remettaient un second rapport, relatif lui, à l'agence comptable et à la direction financière de l'UAG révélant, notamment, que Madame DDD, agent comptable et directrice financière de l'UAG, avait perçu des primes importantes de la part du CEREGMIA et avait délibérément détruit, avant son départ, un nombre considérable d'informations et de données numériques afin de les soustraire aux autorités de contrôle ; que la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) a diligenté un audit, en mars 2013, mis en œuvre par le cabinet Ernst & Young ; que la préfecture de la Martinique, en charge de la gestion des fonds européens perçus dans le cadre de conventions que le CEREGMIA était tenu de mettre en œuvre, a décidé de l'audit de ces conventions en décembre 2013 ; que ces différents audits ont révélé de graves irrégularités, relatives en particulier à l'imputabilité des dépenses aux projets auxquels elles étaient dédiées, qui ne pouvait être établie ; qu'il en est résulté des demandes de remboursement des fonds versés à l'UAG au bénéfice du CEREGMIA ; que l'Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a également diligenté un contrôle, en juin 2014, actuellement en cours ; qu'après l'ouverture d'une information judiciaire, le 7 avril 2014, pour « délit de favoritisme, détournement de fonds et escroquerie en bande organisée au détriment de l'Union européenne », Monsieur XXX a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire en janvier 2016, comme l'ont été d'autres membres du CEREGMIA, ainsi que l'ancien président de l'université, Monsieur EEE, et l'ancien agent comptable, Madame DDD ;

Considérant qu'à la suite du premier rapport de l'IGAENR (13 mai 2014), la présidente de l'UAG a engagé des poursuites disciplinaires contre Monsieur XXX ainsi que contre deux autres membres du CEREGMIA ; qu'il est reproché à Monsieur XXX d'avoir commis de graves fautes dans la gestion financière du CEREGMIA ainsi que d'avoir tenu des propos injurieux et insultants et de s'être livré à des harcèlements à l'encontre de la communauté universitaire, en particulier de la présidence de l'UAG ;

- Sur les griefs relatifs à la gestion financière du CEREGMIA :

Considérant que le CEREGMIA dispose de fonds qui, comme l'indique le rapport de l'IGAENR (13 mai 2014), proviennent principalement de fonds européens versés pour financer des programmes, décidés dans le cadre de conventions, que le CEREGMIA était chargé de mettre en œuvre ; qu'entre les années 2009 et 2012, ces fonds européens représentaient 85 % des recettes du laboratoire, soit 5,7 M€ ; qu'entre les années 2009 et 2014, le CEREGMIA devait assurer neuf projets d'un coût de plus de 13 M€ financés par le Fonds européen de développement économique et régional (FEDER) ; que parmi ces projets, trois résultaient de conventions conclues avec la région Guadeloupe - IFGCar Haïti, AVANCITES 3D, EIC, conventions appelées projets INTERREG IV « Caraïbes » - et six résultaient de conventions conclues avec la préfecture de Martinique - LAMENTIN ON LINE, GREEN ISLAND, OOLOG, PRED, SAIC, Cdr-QECB, PAT-TEIN ; qu'il résulte de l'instruction et des différents rapports rendus par les autorités de contrôle, que, en moyenne, 48 % des dépenses engagées au titre de ces conventions ont été déclarées inéligibles, certaines conventions atteignant des taux d'inéligibilité de 80 % (conventions IFGCar, AVANCITE 3D et EIC) voire de 98 % (convention PRED) ; que ces inéligibilités résultent de ce que le CEREGMIA n'a produit aucun rapport d'exécution, n'a pas produit les pièces justificatives, a fourni des pièces non probantes, ou encore de l'absence de lien entre les dépenses et le projet au titre duquel elles ont été engagées ; que d'ores et déjà, l'UAG a dû rembourser aux autorités de gestion une somme de 3,5 M€ ;

Considérant que, comme le révèle le rapport l'IGAENR (13 mai 2014), à la suite d'une autorisation donnée par le conseil d'administration au seul titre des « questions diverses », et sans avis du conseil scientifique de l'UAG, le CEREGMIA a initié, en 2010, un projet de construction d'un bâtiment pour y établir ses locaux, d'un coût de 20,5 M€ ; que Monsieur XXX, qui déclarait avoir doté le CEREGMIA d'un « trésor des Templiers », avait annoncé que le CEREGMIA financerait la totalité de la construction sur ses propres fonds ; que si le projet a été finalement abandonné, plus d'1 M€ ont été versés par le CEREGMIA pour couvrir des frais d'études ; que cette somme provenant de fonds obtenus pour financer d'autres projets dont les reliquats auraient dû être restitués à l'université, son versement est irrégulier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre du projet PAT-TEIN financé par le projet européen LEONARDO, Monsieur XXX a signé des documents que seul l'ordonnateur principal ou délégué était compétent pour signer ; que, de même, dans le cadre du contrat « AVANTILLES », Monsieur XXX a signé un document « service fait » permettant le mandatement d'une facture d'un montant de plus de 200.000 € ; qu'un document « attestation de ressources propres », permettant le financement d'une convention par le FEDER a été signé par Monsieur XXX engageant l'UAG contre la volonté de l'université ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le CEREGMIA a conclu des contrats en méconnaissance des règles de la commande et de la comptabilité publiques ; que c'est le cas notamment, comme le révèle le second rapport de la Cour des comptes, des contrats de prestation de services passés avec la société FILIATIS, qui a fait l'objet d'une communication du procureur général près la Cour des comptes pour avantage injustifié à autrui et doute sérieux quant à la réalité des prestations fournies ; que c'est le cas aussi des contrats conclus pour l'achat de matériel informatique dans le cadre de la convention PRED, ou encore du contrat relatif à l'acquisition d'un calculateur d'un montant de 1,2 M€ ;

Considérant que l'UAG soutient, sans être contredite de façon convaincante par Monsieur XXX et son conseil, que l'ensemble de ces agissements lui a causé un préjudice financier qui s'élève à un montant d'environ 10,39 M€, en comptabilisant les sommes d'ores et déjà remboursées, celles qui devront l'être et celles dont elle n'obtiendra pas le remboursement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la mise en œuvre de ces conventions, notamment de la convention IFGCar, Monsieur XXX a perçu entre 2008 et 2012, des rémunérations pour un montant supérieur à 300.000 € dont la régularité n'est pas établie ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Monsieur XXX a mis en place un diplôme interuniversitaire de « gestionnaire de cas » qui a donné lieu à une formation de quatre semaines, entre mars et avril 2013, ainsi qu'à des épreuves écrites et orales, alors que l'UAG n'avait pas donné son accord pour la mise en place de cette formation ; que, de même, dans le cadre de la convention IFGCar, Monsieur XXX a mis en place une formation de « master en management » que l'université n'était pas habilitée à délivrer ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'assemblée générale du CEREGMIA a adopté, le 20 décembre 2013, de nouveaux statuts faisant bénéficier le CEREGMIA de compétences élargies et d'une autonomie financière, notamment d'un budget propre intégré, comparable à celle d'une unité de formation et de recherche (UFR) ; que les statuts du CEREGMIA attribuent au directeur du laboratoire, Monsieur XXX, le pouvoir d'autoriser la conclusion de contrats de prestations réalisés au nom du laboratoire et « de proposer de gratifier » les personnels participant à la réalisation de ces contrats par des dépenses prélevées sur les recettes desdits contrats ; que les dispositions de ce nouveau statut sont contraires aux dispositions du code de l'éducation ;

Considérant que, si l'ensemble de ces irrégularités nécessitait des appuis, il résulte de l'instruction que Monsieur XXX a constitué, en particulier par l'attribution de primes, un réseau de complicités opérationnel à chacun des maillons de la chaîne de l'engagement de la dépense publique, qu'il s'agisse de l'agent comptable et directrice financière (Madame DDD, mise en examen), du président de l'université (Monsieur EEE, mis en examen), du doyen de l'UFR de droit, économie et gestion et ordonnateur délégué (Monsieur FFF, mis en examen), ou encore du directeur adjoint du CEREGMIA (Monsieur GGG, mis en examen) ; que, comme le révèle notamment le rapport de l'IGAENR, si Monsieur XXX a mis en place un suivi détaillé des recettes obtenues pour la réalisation des conventions, il a organisé, grâce à ses complicités, un dispositif comptable et budgétaire assurant l'absence de traçabilité des dépenses engagées par le CEREGMIA, notamment en faisant obstacle à leur suivi pour chacune des conventions ;

Considérant que Monsieur XXX soutient que les rapports relatifs au CEREGMIA ont été établis de façon partiale par les autorités de contrôle, que les dysfonctionnements révélés seraient dus à une mauvaise gestion imputable à la seule université, et que les poursuites disciplinaires dont il fait l'objet sont inspirées par l'esprit de vengeance de la présidente de l'UAG, dont il n'a pas soutenu la candidature ; que cependant, il résulte de l'instruction, que l'ensemble de ces dysfonctionnements et manquements dans l'administration et la gestion du CEREGMIA résultent de fautes disciplinaires imputables à Monsieur XXX et qu'il en est le principal instigateur ;

- Sur les griefs relatifs aux faits de harcèlement, violences publiques et violences morales :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Monsieur XXX s'est livré à de violentes attaques à l'encontre de la gouvernance de l'université, en particulier à l'encontre de la présidente ; que ces attaques se sont manifestées par la diffusion de courriers électroniques, pour certains à destination de l'ensemble de la communauté universitaire, comme celui envoyé le 14 janvier 2014 indiquant : « puisque la présidente et son équipe de dangereux amateurs ont choisi de décider de la date de début des hostilités, je pense qu'il nous revient de décider de la date de la fin et de la violence des coups à donner », celui datant de février 2014 selon lequel : « il n'y aura pas de dialogues avec ces dangereux amateurs qui ne sont qu'une bande de délinquants qui manipulent les uns et les autres », celui adressé le 10 décembre 2012, destiné à un membre du conseil d'administration, contenant des propos particulièrement injurieux, ou encore celui du 9 janvier 2015, insultant un maître de conférences de l'UAG ; que certains messages électroniques adressés à des agents administratifs étaient menaçants, que c'est le cas par exemple de celui envoyé le 22 octobre 2013 à l'aide-comptable lui indiquant : « je sais bien que votre chef a des consignes. Sauf qu'elle doit savoir que j'en suis à mon 12e agent comptable et qu'ils sont tous partis en mauvais état », alors qu'en outre, comme le mentionne le rapport du Sénat, « en septembre 2001, le corps d'un ancien agent-comptable de l'université est retrouvé sans vie au pied des falaises de l'Anse-Bertrand, à la suite de ce qui a été identifié comme un suicide » ; que la tenue de tels propos constituent une faute disciplinaire ;

Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que eu égard à leur gravité et au nombre de fautes disciplinaires commises, Monsieur XXX est coupable des faits qui lui sont reprochés et qu'il convient dès lors de le sanctionner ;

Par ces motifs

Statuant au scrutin secret, à la majorité absolue des membres présents,

Décide

Article 1 : La décision rendue le 11 juin 2015 par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'Université Toulouse-1 Capitole est annulée ;

Article 2 : La sanction de révocation, assortie de l'interdiction définitive d'exercer toute fonction dans un établissement public ou privé est prononcée à l'encontre de Monsieur XXX ;

Article 3 : Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du code de l'éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à Madame la présidente de l'université des Antilles et de la Guyane, à Madame la ministre de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche ; copies seront adressées, en outre, à Monsieur le président de l'université de Toulouse-1 Capitole et à Madame la rectrice de l'académie de Martinique.

Fait et prononcé en audience publique à Paris, le 8 juin 2016 à 18 h à l'issue du délibéré.

La secrétaire de séance

Camille Broyelle

Le président

Mustapha Zidi

 

Affaire : Monsieur XXX, maître de conférences né le 29 novembre 1975

Dossier enregistré sous le n° 1232

Demande de sursis à exécution formée par Monsieur XXX, d'une décision de la section disciplinaire de l'université d'Aix-Marseille ;

Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire, réuni en formation restreinte en application de l'article R. 232-34 du code de l'éducation ;

Étant présents :

Professeur des Universités ou personnel assimilé :

Monsieur Mustapha Zidi, président

Madame Camille Broyelle

Maître de conférences ou personnel assimilé :

Madame Marie Jo Bellosta, rapporteure

Vu le code de l'éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7,  L. 952-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 ;

Le dossier et le rapport ayant été tenus à la disposition des parties, de leur conseil et des membres du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire cinq jours francs avant le jour fixé pour la délibération ;

Vu la décision prise à l'encontre de Monsieur XXX, le 15 décembre 2015 par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université d'Aix-Marseille, prononçant l'interdiction d'exercer les fonctions d'enseignement dans l'établissement pour une durée de trois mois, assortie de la privation de la moitié de son traitement, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Vu la demande de sursis à exécution formée le 10 mars 2016 par Monsieur XXX, maître de conférences à l'université d'Aix-Marseille, de la décision prise à son encontre par la section disciplinaire de l'établissement ;

Vu ensemble les pièces du dossier ;

Monsieur XXX ayant été informé de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 19 avril 2016 ;

Monsieur le président de l'université d'Aix-Marseille ou son représentant, ayant été informé de la tenue de cette séance par lettre recommandée avec avis de réception du 19 avril 2016 ;

Monsieur XXX, étant présent ;

Madame Sophie-Caroline Petit, représentant le président de l'université d'Aix-Marseille, étant présente ;

Après lecture, en audience publique, du rapport d'instruction par Madame Marie Jo Bellosta ;

Après avoir entendu, en audience publique, les demandes et explications des parties présentes à l'audience, puis les conclusions du déféré, celui-ci ayant eu la parole en dernier ;

Après que ces personnes et le public se sont retirés ;

Après en avoir délibéré

Considérant que Monsieur XXX a été condamné le 15 décembre 2015, par la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université d'Aix-Marseille, à l'interdiction d'exercer ses fonctions d'enseignement dans l'établissement pour une durée de trois mois, assortie de la privation de la moitié de son traitement, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel, pour avoir harcelé sexuellement une étudiante lors des séances de travaux dirigés dont il avait la charge en ayant eu des gestes et des propos à connotation sexuelle à son encontre ;

Considérant que la sanction infligée à Monsieur XXX était entièrement exécutée au 31 mars 2016 ; que, dès lors, la demande de sursis à exécution a perdu son objet ; qu'il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer ;

Par ces motifs

Statuant au scrutin secret, à la majorité absolue des membres présents,

Décide

Article 1 : Il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de sursis à exécution de Monsieur XXX.

Article 2 : Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du code de l'éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à Monsieur le président de l'université d'Aix-Marseille, à Madame la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, à Monsieur le recteur de l'académie de Aix-Marseille.

Fait et prononcé en audience publique à Paris, le 8 juin 2016 à 10 h à l'issue du délibéré.

La secrétaire de séance

Camille Broyelle

Le président

Mustapha Zidi

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