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et de la Recherche

Édité par le MESR, le Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche publie des actes administratifs : décrets, arrêtés, notes de service, circulaires, avis de vacance de postes, etc. La mise en place de mesures ministérielles et les opérations annuelles de gestion font l'objet de textes réglementaires publiés dans des BO spéciaux.
Publication hebdomadaire (ISSN : 2110-6061)

Cneser

Sanctions disciplinaires

nor : MENH2502324S

Décisions du 31-12-2024

MENESR – CNESER

Monsieur XXX

N° 1687

Nolwenn Peton

Rapporteure

Séance publique du 5 décembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

Le président de l’université de Strasbourg a engagé le 17 novembre 2020, contre Monsieur XXX, professeur des universités à la faculté de théologie protestante de l’université de Strasbourg, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université compétente à l’égard des enseignants-chercheurs de son établissement ;

Par une décision du 25 février 2021, la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Strasbourg compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé la sanction de mise à la retraite d’office à l’encontre de Monsieur XXX, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par un mémoire en appel du 31 mars 2021, complété par un mémoire réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 27 mai 2024, Monsieur XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire d’annuler la décision du 25 février 2021 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Strasbourg, de prononcer une sanction proportionnée qui tienne compte de sa contribution académique et intellectuelle à la réputation et au développement de l’université de Strasbourg, d’enjoindre à l’université de Strasbourg de le réintégrer dans ses droits, et de mettre à la charge de cette dernière la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Monsieur XXX soutient que :

  • la décision du 25 février 2021 est entachée d’irrégularité dès lors que les droits de la défense ont été méconnus, le mémoire écrit qu’il a communiqué n’étant pas visé et les arguments développés n’ayant pas été pris en compte par la section disciplinaire ;
  • cette décision ne mentionne pas les dispositions de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation ;
  • elle est insuffisamment motivée ;
  • la sanction de mise à la retraite d’office est disproportionnée dès lors que l’antériorité de sa carrière n’a pas été prise en compte, que les faits ont été commis dans un cadre privé, qu’il n’a utilisé aucun des moyens mis à disposition par l’administration, qu’il n’avait accès à aucune donnée confidentielle de l’université, que le public fréquentant l’université est majeur, qu’aucun étudiant n’a eu à se plaindre de son comportement ; 
  • la sanction qui lui  a été infligée a de lourdes conséquences sur ses conditions matérielles d’existence ;

Par un mémoire en défense du 2 avril 2024, le président de l’université de Strasbourg demande le rejet de la requête d’appel de Monsieur XXX. Le président de l’université de Strasbourg soutient que : 

  • la procédure disciplinaire a répondu aux prescriptions règlementaires en matière de droit de la défense ;
  • l’absence de mention de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation ne constitue pas un vice substantiel de nature à avoir influé sur le sens de la décision ;
  • la décision est suffisamment motivée ;
  • la section disciplinaire a apprécié la nature et la gravité des fautes commises par Monsieur XXX dont le comportement personnel était incompatible avec la poursuite d’une activité dans la fonction publique et a porté atteinte à l’image et à la réputation du service ;

Par un deuxième mémoire en défense du 5 septembre 2024, le président de l’université de Strasbourg réitère ses observations et conclut également au rejet de la demande de condamnation de l’établissement à verser à Monsieur XXX la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative ;

Par un mémoire en réponse, réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 12 novembre 2024, et des observations réceptionnées au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 13 novembre 2024, Monsieur XXX soutient que : 

  • il n’a pas été démontré que la section disciplinaire a analysé tous les arguments développés en défense et a recherché la sanction la plus appropriée compte tenu de la carrière académique de Monsieur XXX ;
  • la sanction est disproportionnée ;
  • la section disciplinaire a retenu une motivation imprécise et propice aux amalgames et à la généralisation s’agissant des faits ; 
  • la sanction prononcée doit tenir compte du caractère pathologique des faits ;
  • il s’est amendé après avoir été condamné par le juge pénal ;

Par un troisième mémoire en défense du 3 décembre 2024, le président de l’université de Strasbourg conclut aux mêmes fins sans apporter d’élément nouveau ;

La commission d’instruction s’est tenue le 9 octobre 2024 ;

Par lettres recommandées du 24 octobre 2024, Monsieur XXX, ainsi que le président de l’université de Strasbourg, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 5 décembre 2024 ;

Le rapport d’instruction rédigé par Nolwenn Peton ayant été communiqué aux parties par courrier recommandé en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;

Monsieur XXX étant assisté de Maître Xavier Frering, avocat ;

Le président de l’université de Strasbourg étant représenté par Sophie Yahi, directrice des affaires juridiques ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu :

  • le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 ;
  • le Code général de la fonction publique ;
  • la loi N° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Après avoir entendu en séance publique le rapport de Nolwenn Peton, rapporteure ;

Monsieur XXX ayant été informé de son droit de garder le silence à l’audience et de ne pas s’auto-incriminer ;

La parole ayant été donnée aux parties, Monsieur XXX ayant eu la parole en dernier ;

La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos sans que Nolwenn Peton, rapporteure, n’intervienne ni n’ait voix délibérative ;

 

Considérant ce qui suit :

  1. Monsieur XXX, professeur des universités, est affecté à la faculté de théologie protestante de l’université de Strasbourg. Le 18 juin 2020, le tribunal correctionnel de Saverne l’a condamné à une peine d’un an d’emprisonnement pour des faits d’importation et de détention de fichiers informatiques pédopornographiques commis entre le 1er juin 2014 et le 3 mai 2020. Informé de cette situation par le procureur de la République, le président de l’université a pris une mesure conservatoire déchargeant Monsieur XXX de ses obligations d'enseignement le 23 juin 2020. Dans le même temps, Monsieur XXX, qui se trouvait en position de détachement auprès de l’université d’Oxford, a été réintégré à l’université de Strasbourg le 3 juillet 2020 par un arrêté du 9 juillet 2020.Le 25 février 2021, la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Strasbourg compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé une sanction de mise à la retraite d’office aux motifs, d’une part, que la nature des agissements commis par Monsieur XXX relatifs à l’importation et à la détention d’images pornographiques de mineurs est constitutive d’un manquement aux obligations de probité et de dignité auxquelles il est soumis en tant qu’agent public et, d’autre part, que Monsieur XXX a porté atteinte à l’honneur et à la considération de la fonction d’enseignant-chercheur, cette atteinte ayant eu un retentissement hors de l’établissement comme à l’intérieur de celui-ci. Monsieur XXX relève appel de cette décision ;
    En ce qui concerne la régularité de la décision :
  2. En premier lieu, aux termes de l’article R. 712-41 du Code de l’éducation, dans sa rédaction applicable à l’espèce : « La décision doit être motivée et la sanction ne prend effet qu'à compter du jour de sa notification. (...) » ;
  3. En l’espèce, la décision du 25 février 2021 vise le Code de l’éducation, analyse la demande du président de l’université, et rappelle la procédure suivie ainsi que les faits reprochés à Monsieur XXX et la position administrative de ce dernier, avant de déterminer la sanction infligée eu égard aux faits reprochés. Dès lors, la seule circonstance que cette décision ne rappelle pas expressément les dispositions de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation est sans incidence sur cette exigence de motivation ;
  4. En second lieu, Monsieur XXX soutient que, dès lors que la décision contestée ne mentionne pas le mémoire qu’il a produit le 11 février 2021, il ressort que la section disciplinaire n’a pas analysé ses moyens de défense et n’a pas recherché la sanction la plus adaptée en méconnaissance des droits de la défense ;
  5. Toutefois, la décision du 25 février 2021 vise « l’ensemble des pièces du dossier ». Par ailleurs, il résulte de l’instruction que le mémoire déposé par Monsieur XXX le 11 février 2021 est le support écrit de l’ensemble des observations que Monsieur XXX entendait présenter lors de l’audience de la section disciplinaire et que ce dernier a souhaité communiquer aux membres de la formation préalablement à son intervention. En ce sens, la décision en litige précise que Monsieur XXX a été entendu et le procès-verbal de l’audience relate les observations faites par Monsieur XXX à l’audience, précise que le mémoire communiqué le 8 février 2021 a été transmis à l’ensemble des membres de la formation de jugement et que la lecture de ce mémoire a ensuite donné lieu à un échange entre les membres de la section disciplinaire et Monsieur XXX. Enfin, Monsieur XXX a eu la parole en dernier conformément aux dispositions de l’article R. 712-37 du Code de l’éducation. Dès lors, le moyen ne peut qu’être écarté ;
    En ce qui concerne la matérialité des faits et le caractère fautif de ces faits :
  6. Aux termes de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, désormais codifié à l’article L. 121-1 du Code général de la fonction publique : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. / (…) Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité (…) ». Aux termes de l’article 29 de la même loi : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ». Et aux termes de l’article L. 952-2 du Code de l’éducation : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité » ;
  7. Il résulte de l’instruction que, le 18 juin 2020, le tribunal correctionnel de Saverne a condamné Monsieur XXX à une peine d’un an d’emprisonnement pour des faits d’importation et de détention de fichiers informatiques pédopornographiques commis entre le 1er juin 2014 et le 3 mai 2020. Il ressort, au surplus, des propos tenus par Monsieur XXX devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Strasbourg que la liste des consultations des vidéos était enregistrée sur son ordinateur professionnel. Il ressort également des pièces du dossier que le procureur de la République a relevé, dans l’avis de procédure adressé au recteur d’académie que 1 000 vidéos et 27 000 photos ont été découvertes sur ses supports informatiques comprenant l’ordinateur fourni par l’université d’Oxford et un disque dur externe. Par ailleurs, la condamnation pénale de Monsieur XXX a fait l’objet d’articles de presse permettant d’établir un lien entre l’intéressé et l’université de Strasbourg ;
  8. Les agissements de Monsieur XXX, constatés sur une période de six années, constituent de la part de ce dernier une méconnaissance de l’exigence de dignité rappelée par les dispositions de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983, peu importent les circonstances que les faits ont été commis dans la sphère privée, que Monsieur XXX n’aurait pas eu accès aux données confidentielles de l’université et n’aurait enseigné qu’à un public majeur.
    En ce qui concerne la sanction :
  9. Aux termes de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation : « (…) les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux enseignants-chercheurs et aux membres des corps des personnels enseignants de l’enseignement supérieur sont : 1° Le blâme ; / 2° Le retard à l’avancement d’échelon pour une durée de deux ans au maximum ; / 3° L’abaissement d’échelon ; / 4° L’interdiction d’accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans au maximum ; / 5° L’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche ou certaines d’entre elles dans l’établissement ou dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant cinq ans au maximum, avec privation de la moitié ou de la totalité du traitement ; / 6° La mise à la retraite d’office ; / 7° La révocation. / Les personnes à l’encontre desquelles a été prononcée la sixième ou la septième sanction peuvent être frappées à titre accessoire de l’interdiction d’exercer toute fonction dans un établissement public ou privé, soit pour une durée déterminée, soit définitivement » ;
  10. Eu égard à la gravité des fautes commises par Monsieur XXX, la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Strasbourg a prononcé une sanction proportionnée en retenant la sanction de mise à la retraite d’office. Il y a donc lieu de confirmer la décision rendue le 25 février 2021 et de rejeter la demande de Monsieur XXX ;
    Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative :
  11. Ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par Monsieur XXX au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l’université de Strasbourg, qui n’est pas la partie perdante ;

 

Décide

 

Article 1 – La décision rendue le 25 février 2021 par la section disciplinaire de l’université de Strasbourg compétente à l’égard des enseignants-chercheurs, qui a prononcé la sanction de mise à la retraite d’office à l’encontre de Monsieur XXX, est confirmée.

 

Article 2 – La requête de Monsieur XXX est rejetée, y compris les conclusions à fin de condamnation de l’université de Strasbourg à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.

 

Article 3 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université de Strasbourg, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Strasbourg.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 5 décembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux, Marguerite Zani, Lilian Aveneau, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris 31 décembre 2024,

 

Le président,
Christophe Devys

La vice-présidente,
Frédérique Roux

Le greffier en chef,
Éric Mourou

 

 

Madame XXX

N° 1698

Maguy Fullana Thevenet

Rapporteure

Séance publique du 5 décembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

Le président de l’université d’Aix-Marseille a engagé le 30 mars 2021, contre Madame XXX, professeure des universités de classe exceptionnelle à la faculté de droit et de science politique de l’université d’Aix-Marseille, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de cet établissement compétente à l’égard des enseignants-chercheurs de son établissement ;

Par une décision du 1er octobre 2021, la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé la sanction du blâme à l’encontre de Madame XXX, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par un mémoire en appel du 8 décembre 2021, complété par un mémoire réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 30 août 2024, Madame XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire d’annuler la décision du 1er octobre 2021 de la section disciplinaire de l’université d’Aix-Marseille et de prononcer sa relaxe des poursuites engagées à son encontre ;

Elle soutient que : 

  • la décision du 1er octobre 2021 est insuffisamment motivée ;
  • cette décision méconnaît les droits de la défense ; 
  • cette décision est entachée d’un vice de procédure dès lors qu’elle n’a pas été précédée d’une notification à Madame XXX de son droit de se taire ;
  • les faits qui lui sont reprochés ne sont pas constitutifs d’une faute disciplinaire et ne justifiaient pas le prononcé d’une sanction. 

Par un mémoire en défense du 15 mai 2024, complété par un mémoire récapitulatif daté du 30 septembre 2024, le président de l’université d’Aix-Marseille conclut au rejet de la requête d’appel de Madame XXX ;

Il soutient que les moyens de Madame XXX ne sont pas fondés et que le motif retenu par la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille est avéré et justifie une sanction disciplinaire ;

La commission d’instruction s’est tenue le 9 octobre 2024 ;

Par lettres recommandées du 7 novembre 2024, Madame XXX, ainsi que le président de l’université d’Aix-Marseille, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 5 décembre 2024 ;

Le rapport d’instruction rédigé par Maguy Fullana Thevenet ayant été communiqué aux parties par courrier recommandé en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;

Madame XXX étant présente et assistée de Maître Hugo Tastard, avocat ;

Le président de l’université d’Aix-Marseille étant représenté par Anne Charrier, chargée des affaires juridiques ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu : 

  • la Constitution, notamment son préambule ;
  • la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
  • le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 ; 
  • le Code général de la fonction publique ;

Après avoir entendu en séance publique le rapport de Maguy Fullana Thevenet, rapporteure ;

Madame XXX ayant été informée de son droit de garder le silence à l’audience et de ne pas s’auto-incriminer ;

La parole ayant été donnée aux parties, Madame XXX ayant eu la parole en dernier ;

La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos sans que Maguy Fullana Thevenet, rapporteure, n’intervienne ni n’ait voix délibérative ;

 

Considérant ce qui suit :

  1. Madame XXX est professeure des universités de classe exceptionnelle au sein de la faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille. Le 30 mars 2021, le président de l’université d’Aix-Marseille a engagé à son encontre des poursuites disciplinaires en raison de propos tenus lors d’un cours magistral, dispensé le 27 octobre 2020 à des étudiants de master 1 par visioconférence et enregistré, et consacré à la théorie générale du conflit des lois. Par une décision du 1er octobre 2021, dont Madame XXX relève appel, la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille a estimé que les faits reprochés étaient avérés et contraires aux exigences d’objectivité prévues par le Code de l’éducation et a, par suite, infligé à Madame XXX la sanction du blâme ;
    Sur la régularité de la décision du 1er octobre 2021 : 
  2. En premier lieu, aux termes de l’article R. 712-41 du Code de l’éducation dans sa version alors applicable : « La décision doit être motivée (…) ». La décision du 1er octobre 2021 rappelle et reproduit les propos litigieux tenus par Madame XXX, mentionne l’importance de la liberté académique, garantie au niveau constitutionnel, sa définition ainsi que ses limites, notamment les principes de tolérance et d’objectivité ainsi que les dispositions de l’article L. 141-6 du Code de l’éducation et indique que les propos tenus sont contraires aux exigences d’objectivité prévues par le Code de l’éducation avant d’exposer les motifs pour lesquels la sanction du blâme est retenue. Ainsi, et contrairement à ce que soutient l’appelante, la décision attaquée est suffisamment motivée ;
  3. En deuxième lieu, le respect du principe général des droits de la défense suppose que la personne concernée soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et puisse avoir accès aux pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus, à tout le moins lorsqu’elle en fait la demande ;
  4. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que Madame XXX a été informée de l’ouverture d’une procédure disciplinaire, par un courrier du 10 juin 2021, auquel était jointe la lettre de saisine de la section disciplinaire, mentionnant les propos litigieux et les griefs reprochés, à savoir le non-respect de ses obligations professionnelles, ainsi que les limites applicables au principe de liberté académique notamment en cas d’atteinte aux principes de neutralité et de laïcité du service public. En dépit de la circonstance que les exigences d’objectivité, qui se rattachent aux griefs ainsi énoncés, n’y étaient pas expressément mentionnés, Madame XXX a été ainsi informée des griefs qui lui étaient reprochés et a pu largement en débattre, aussi bien lors de la commission d’instruction que lors de l’audience devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille. Il en résulte que le moyen tiré du non-respect des droits de la défense doit être écarté ;
  5. En troisième lieu, aux termes du troisième alinéa de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, alors en vigueur : « Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'État, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. » ;
  6. Par une décision QPC n° 2024-1105 du 4 octobre 2024, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution, et en particulier aux dispositions de l’article 9 de la Déclaration des droits de 1789, les dispositions du troisième alinéa de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, désormais codifiées à l’article L. 532-4 du Code général de la fonction publique, en tant que ces dispositions ne prévoient pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel est engagé une procédure disciplinaire doit être informé de son droit de se taire. Cette déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de publication de la décision du Conseil constitutionnel et non jugées définitivement ;
  7. En quatrième lieu, aux termes de l’article 9 de la Déclaration de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi. » Il en résulte le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition ;
  8. Ces exigences impliquent qu’une personne faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’elle soit préalablement informée du droit qu’elle a de se taire. Il en va ainsi, même sans texte, lorsqu’elle est poursuivie devant une juridiction disciplinaire de l’ordre administratif. À ce titre, elle doit être avisée qu’elle dispose de ce droit tant lors de son audition au cours de l’instruction que lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire ;
  9. Dans le cas où un agent sanctionné n’a pas été informé du droit qu’il a de se taire alors que cette information était requise en vertu des principes énoncés aux points 7 et 8, cette irrégularité n’est susceptible d’entraîner l’annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l’agent public et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l’intéressé n’avait pas été informé de ce droit ;
  10. S’il est constant que Madame XXX n’a pas été informée de son droit de se taire dans le cadre de la procédure ouverte devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université, il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée se fonde essentiellement sur les propos tenus par l’intéressée le 27 octobre 2020, propos qui sont d’ailleurs matériellement établis et non contestés. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas invoqué, que la sanction prononcée reposerait de façon déterminante sur des propos qu’aurait tenus Madame XXX devant la commission d’instruction ou la formation de jugement de première instance. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision attaquée doit être écarté ;
    Sur les faits retenus par la décision du 1er octobre 2021 et la sanction qu’elle inflige :
  11. Aux termes du premier alinéa de l’article L. 952-2 du Code de l’éducation : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d’objectivité ».
  12. Il résulte de l’instruction que, lors d’un cours effectué par visio-conférence le 27 octobre 2020, soit onze jours après le décès de YYY, Madame XXX a abordé la notion d’ordre public international et commenté un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 19 décembre 2018 portant sur la question d’un conflit de normes entre le droit civil grec et les conséquences en droit grec d’un traité international octroyant à une minorité grecque de confession musulmane l’application de la loi islamique en matière de succession. Dans cet arrêt, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la veuve bénéficiaire d’un testament rédigé par son défunt époux, de confession musulmane, ne pouvait se voir priver des dispositions d’un tel acte au motif que celles-ci étaient contraires à la loi islamique. Dans le fil du commentaire de cet arrêt, Madame XXX a tenu les propos suivants : « et dans un groupe religieux, on a un droit fondamental à ne pas vouloir suivre les règles et pratiques du groupe religieux. Une fois encore dans le contexte actuel français, c’est vital. Parce qu’on a évidemment un grand problème avec l’islam, ce n’est pas… une nouveauté. Un des plus grands problèmes que l’on a avec l’islam, ce n’est pas le seul, malheureusement, c’est que l’islam ne reconnaît pas la liberté de conscience. C’est quand même absolument terrifiant. Quand la décapitation d’un professeur d’histoire-géographie qui a dit et fait ce qu’il avait le droit, même le devoir, de dire et de faire vient de là ! On n’a aucune liberté de conscience en islam. Donc si on naît d’un père musulman, on naît musulman, on est musulman à vie, une sorte de religion sexuellement transmissible, je n’ai jamais compris…on dirait du judaïsme c’est pareil hein… c’est par la mère, une sorte de MST, de RST, de religion sexuellement transmissible. » ;
  13. Si, dans le cadre de la liberté académique, les enseignants-chercheurs peuvent se livrer à une analyse critique des religions, les propos tenus par Madame XXX à propos de deux religions, l’islam et le judaïsme, qui seraient « sexuellement transmissibles », les comparant ainsi à une maladie sexuellement transmissible, sont extrêmement péjoratifs et discriminants. Ainsi, quelle que soit la portée de la liberté académique et d’expression garantie aux enseignants-chercheurs, il ne peut être contesté que de tels propos en excèdent les limites ;
  14. Si, par ailleurs, l’exercice pédagogique nécessite parfois des digressions ou des propos provocateurs afin de conduire les étudiants à exercer leur esprit critique, de faire naitre le débat propre à leur réflexion construite sur les savoirs, ces propos doivent s’inscrire dans le respect des principes de tolérance et d’objectivité. Or, il est constant que les propos incriminés s’en écartent ;
  15. Dès lors, il ne peut être contesté que les propos tenus par Madame XXX le 27 octobre 2020 ont un caractère fautif. Toutefois, il est apparu au Cneser statuant en forme disciplinaire que, dans les circonstances très particulières de l’espèce et compte tenu notamment de leur caractère isolé et du contexte dans lequel ils ont été tenus, ces propos ne justifiaient pas le prononcé d’une sanction disciplinaire. Il convient donc de prononcer la relaxe de Madame XXX ;
  16. La décision du 1er octobre 2021 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision ;

 

Décide

 

Article 1 – Madame XXX est relaxée.

 

Article 2 – La décision rendue le 1er octobre 2021 par la section disciplinaire de l’université d’Aix-Marseille est réformée en ce qu’elle a de contraire à l’article 1er.

 

Article 3 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Madame XXX, au président de l’université d’Aix-Marseille, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie d’Aix-Marseille.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 5 décembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux, Marguerite Zani, Lilian Aveneau, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris 31 décembre 2024,

 

Le président,

Christophe Devys

La vice-présidente,

Frédérique Roux

Le greffier en chef,

Éric Mourou

 

 

Monsieur XXX

N° 1715

Barbara Aventino

Rapporteure

Séance publique du 11 décembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

La présidente de l’université Lumière Lyon 2 a engagé le 9 septembre 2021, contre Monsieur XXX, professeur des universités en études cinématographiques, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire compétente à l’égard des enseignants-chercheurs de son établissement ;

Par une décision du 15 mars 2022, la section disciplinaire de l’université Lumière Lyon 2 compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement et de recherche à l’université Lumière Lyon 2 pour une durée de douze mois, assortie de la privation de son traitement, à l’encontre de Monsieur XXX, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par un mémoire en appel, enregistré le 27 avril 2022, et des mémoires enregistrés les 7 mai, 19 septembre et 5 décembre 2024, Monsieur XXX, représenté par la Selarl Carnot avocats, demande au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire d’annuler la décision du 15 mars 2022 de la section disciplinaire de l’université Lumière Lyon 2, de juger n’y avoir lieu à sanction et de mettre à la charge de l’établissement la somme de 5 000 euros à lui verser au titre des frais irrépétibles engagés pour sa défense ;

Monsieur XXX soutient que :

  • la décision du 15 mars 2022 méconnait les dispositions de l’article R. 712-33 du Code de l’éducation dès lors que le rapport d’instruction est partial et a été établi sans respecter le principe du contradictoire ;
  • elle méconnait les dispositions de l’article R. 712-30 du Code de l’éducation dès lors que la saisine de la section disciplinaire est imprécise sur les faits qui lui sont reprochés et n’a pas été étendue aux faits rapportés dans les deux autres témoignages intervenus postérieurement au 9 septembre 2021 ;
  • elle méconnait les dispositions de l’article R. 712-37 du Code de l’éducation dès lors que des témoins ont été auditionnés par la formation de jugement en visio-conférence ; 
  • elle méconnait les articles R. 712-26 et R. 712-28 du Code de l’éducation relatifs à la composition de la section disciplinaire dès lors que ses membres et notamment son secrétaire, n’ont pas respecté le principe d’impartialité ;
  • elle méconnait l’article 9 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors qu’il n’a pas été informé préalablement de son droit de conserver le silence ; 
  • les droits de la défense n’ont pas été respectés dès lors qu’il n’a pas eu connaissance du procès-verbal de la séance de jugement ;
  • les faits sur lesquels la décision en litige se fonde sont prescrits dès lors que l’autorité disciplinaire en avait connaissance depuis plus de trois ans ;
  • les faits évoqués par Madame AAA sont couverts par la loi d’amnistie du 6 août 2002 ;
  • la matérialité des faits n’est pas établie dès lors qu’ils reposent exclusivement sur des témoignages et ressentis, que certains propos sont contradictoires, que les faits à connotation sexuelle ne se sont jamais produits et que les relations d’intimité imposées qui lui sont reprochées n’avaient pas pour cadre l’exercice de ses fonctions mais relevaient de la sphère privée dont l’instance disciplinaire n’était pas compétente pour connaître ;
  • les éléments matériels ne permettent pas de qualifier son comportement de fautif ; 
  • la sanction est disproportionnées dès lors que son comportement n’a pas été de nature à porter atteinte à l’ordre et au bon fonctionnement de l’établissement.

Par des mémoires en défense et des observations enregistrés le 2 avril 2024, le 19 juillet 2024 et le 15 novembre 2024, la présidente de l’université Lumière Lyon 2, représentée par Maître Vojique, avocate, conclut au rejet de la requête d’appel de Monsieur XXX et demande au Cneser statuant en formation disciplinaire la confirmation de la sanction infligée en première instance ;

La présidente de l’université Lumière Lyon 2 soutient que les moyens ne sont pas fondés ;

La commission d’instruction s’est tenue le 17 octobre 2024 ;

Par lettres recommandées du 12 novembre 2024, Monsieur XXX, ainsi que la présidente de l’université Lumière Lyon 2, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 11 décembre 2024 ;Le rapport d’instruction rédigé par Barbara Aventino ayant été communiqué aux parties par courrier recommandé en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;

Monsieur XXX étant assisté de Maître Jean-Noël Litzler, avocat ;

La présidente de l’université Lumière Lyon 2 étant représentée par Maître Vojique ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu : 

  • la Constitution, notamment son préambule ;
  • le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8 et R. 232-23 à R. 232-48 ; 
  • le Code général de la fonction publique ; 
  • la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; 
  • la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;
  • l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

Après avoir entendu en séance publique le rapport de Barbara Aventino, rapporteure ;

Monsieur XXX ayant été informé de son droit de garder le silence à l’audience et de ne pas s’auto-incriminer ;

La parole ayant été donnée aux parties, Monsieur XXX ayant eu la parole en dernier ;

La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos sans que Barbara Aventino, rapporteure, n’intervienne ni n’ait voix délibérative ; 

 

Considérant ce qui suit :

  1. Monsieur XXX a été recruté en qualité de professeur des universités en études cinématographiques par l’université Lumière Lyon 2 à compter de l’année 1999. Il y exerce depuis lors ses fonctions au sein du département Asie. À la suite de divers signalements, la présidente de l’université Lumière Lyon 2 a, le 9 septembre 2021, engagé à son encontre des poursuites disciplinaires en raison de comportements inappropriés à l’égard d’anciennes étudiantes, d’une attitude déplacée, par des agissements et des propos, qui contrevient à celle dont doit faire preuve un agent public dans ses relations avec des usagers du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche. Par une décision du 15 mars 2022, dont Monsieur XXX relève appel, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 lui a infligé une sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement et de recherche dans cet établissement pour une durée d’un an assortie de la privation de son traitement ;
    Sur la régularité de la procédure suivie devant la section disciplinaire :
  2. En premier lieu, Monsieur XXX soutient que la procédure disciplinaire aurait été engagée en méconnaissance de la règle de prescription désormais posée par l’article L. 532-2 du Code général de la fonction publique qui prévoit que « Aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits passibles de sanction ». Toutefois, il ressort du rapport d’enquête que la présidente de l’université Lumière Lyon 2 a été saisie le 15 avril 2021 d’un courriel de Madame BBB, ancienne étudiante de Monsieur XXX, faisant état du comportement de ce dernier à son égard ainsi qu’à l’égard de deux autres anciennes étudiantes. Les autres témoignages ont été recueillis après cette date du 15 avril 2021, qui constitue le point de départ du délai de prescription. À ce titre, la circonstance que Madame BBB se soit plainte du comportement de Monsieur XXX à Monsieur CCC, enseignant de l’université Lumière Lyon 2, dans un courriel du 23 septembre 2006, n’est pas de nature à établir que l’administration de l’université avait une connaissance effective de ces faits, pas plus que celle que deux professeurs d’une autre université ont recueilli dès 2018 le témoignage d’une autre étudiante, Madame DDD, et que l’un deux s’en est ouvert à un collègue de Monsieur XXX, professeur à l’université Lumière Lyon 2. Enfin, l’administration n’a pas engagé la procédure disciplinaire sur le fondement de l’attitude publique de Monsieur XXX mais de son comportement inapproprié dans ses relations interpersonnelles avec certaines étudiantes ;
  3. En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 712-26 du Code de l’éducation : « Nul ne peut siéger dans la formation s'il existe une raison objective de mettre en doute son impartialité. ». Aux termes de l’article R. 712-28 du même code dans sa version applicable : « La section disciplinaire est assistée d'un secrétaire mis à sa disposition par le président de l'université. » ;
  4. Ni la circonstance que le secrétaire mis à disposition de la section disciplinaire ayant prononcé la sanction en litige était également rattaché au service juridique de l’établissement ni celle qu’il s’est exprimé au cours d’un conseil d’administration du 27 octobre 2023, postérieurement à la date à laquelle cette sanction a été prise, et alors, au demeurant, que les propos tenus ne traduisent pas un parti pris contre Monsieur XXX, ne sont de nature à remettre en cause l’impartialité des membres de cette formation de jugement. En outre contrairement à ce qu’affirme le requérant, il ne ressort pas des procès-verbaux d’audition qu’ils auraient été rédigés de façon partiale, alors que Monsieur XXX a, en tout état de cause, été mis à même de discuter leur contenu dans le cadre de la procédure contradictoire menée par la commission d’instruction. Enfin, il n’est pas établi qu’un des membres de la formation de jugement aurait indiqué qu’il jugerait cette affaire en « militant » ;
  5. En troisième lieu, aux termes de l’article R. 712-30 du Code de l’éducation, dans sa version alors applicable : « La section disciplinaire est saisie par une lettre adressée à son président. Ce document mentionne le nom, l'adresse et la qualité des personnes faisant l'objet des poursuites ainsi que les faits qui leur sont reprochés. Il est accompagné de toutes pièces justificatives. » ;
  6. D’une part, la lettre adressée par la présidente de l’université Lumière Lyon 2 au président de la section disciplinaire de cette université, qui mentionne les « comportements inappropriés à l’égard d’anciennes étudiantes » et « une attitude déplacée, par des agissements et des propos, qui contrevient à celle dont doit faire preuve un agent public dans ses relations avec des usagers du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche » et qui, par ailleurs, fait référence aux témoignages des neuf premières étudiantes annexés à la saisine, est suffisamment précise. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que Monsieur XXX n’aurait pas été en capacité de comprendre et contester utilement les manquements reprochés par la référence, dans cette saisine, aux obligations auxquelles il était soumis. D’autre part, aucune disposition ni aucun principe ne s’opposent à ce que l’autorité qui sanctionne se fonde sur des circonstances de fait qui ne figuraient pas dans la notification des griefs, dès lors qu’elles se rattachent aux griefs régulièrement notifiés. En l’espèce, les deux témoignages intervenus postérieurement à la saisine se rattachent au comportement de l’intéressé à l’égard d’anciennes étudiantes. Par suite, le moyen tiré de ce que la saisine de la section disciplinaire ne comporte pas les mentions exigées par l’article R. 712-30 du Code de l’éducation et n’aurait pas été complétée ne peut qu’être écarté dans ses deux branches ;
  7. En quatrième lieu, aux termes de l’article 9 de la Déclaration de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi. » Il en résulte le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition ;
  8. Ces exigences impliquent qu’une personne faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’elle soit préalablement informée du droit qu’elle a de se taire. Il en va ainsi, même sans texte, lorsqu’elle est poursuivie devant une juridiction disciplinaire de l’ordre administratif. À ce titre, elle doit être avisée qu’elle dispose de ce droit tant lors de son audition au cours de l’instruction que lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire ;
  9. Dans le cas où un agent sanctionné n’a pas été informé du droit qu’il a de se taire alors que cette information était requise en vertu des principes énoncés aux points 7 et 8, cette irrégularité n’est susceptible d’entraîner l’annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l’agent public et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l’intéressé n’avait pas été informé de ce droit ;
  10. En l’espèce, s’il est constant que Monsieur XXX n’a pas été informé préalablement du droit qu’il avait de se taire lors de ses auditions par la commission d’instruction et lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire de première instance, il ressort de la décision en litige que la formation de jugement s’est fondée essentiellement sur les témoignages des anciennes étudiantes de Monsieur XXX ainsi que sur les éléments matériels du dossier et que la sanction infligée ne repose pas de manière déterminante sur les propos tenus par Monsieur XXX lors de ces auditions ;
  11. En cinquième lieu, aux termes de l’article R. 712-33 du Code de l’éducation, dans la version alors en vigueur : « La commission d'instruction instruit l'affaire par tous les moyens qu'elle juge propres à l'éclairer. Elle doit convoquer l'intéressé, qui peut se faire accompagner de son défenseur, afin d'entendre ses observations. Le président fixe un délai pour le dépôt du rapport d'instruction, qui ne doit comporter que l'exposé des faits ainsi que les observations présentées par l'autorité qui a engagé la poursuite et celles présentées par la personne déférée. Ce rapport est transmis au président dans un délai qu'il a préalablement fixé et qui ne peut être supérieur à deux mois. Toutefois, le président peut ordonner un supplément d'instruction s'il estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée. Le rapport et les pièces des dossiers sont tenus à la disposition de la personne déférée et de l'autorité qui a engagé les poursuites, de leur conseil et des membres de la formation appelée à juger dans le délai fixé au troisième alinéa de l'article R. 712-35. » ;
  12. En l’espèce, tous les éléments du dossier, et notamment les procès-verbaux établis à l’issue des vingt-quatre auditions devant la commission d’instruction ont été transmis à Monsieur XXX. Ainsi, l’autorité de poursuite n’a pas produit d’observations qui n’auraient pas été portées à sa connaissance. L’intéressé a également pu s’exprimer à l’oral devant la commission d’instruction à deux reprises les 10 novembre et 16 décembre 2021 ainsi que devant la formation de jugement. Monsieur XXX a, en outre, pu faire valoir ses observations à l’écrit notamment dans ses mémoires en défense, en fournissant de nombreuses pièces et en transmettant une version amendée de son procès-verbal d’audition. Le rapport établi par cette commission analyse les témoignages, les pièces du dossier ainsi que les éléments fournis par Monsieur XXX. Dès lors, Monsieur XXX n’est pas fondé à soutenir que le rapport d’instruction serait exclusivement à charge, subjectif et partial et méconnaitrait les dispositions de l’article R. 712-33 du Code de l’éducation. Enfin, la circonstance que Monsieur XXX n’a pas pu faire valoir, lors de ses auditions par la commission d’instruction, d’observations orales sur chacun des onze témoignages portés contre lui, n’est pas davantage de nature, alors même qu’ainsi qu’il a été dit, il en a eu connaissance et a pu très largement les discuter dans le cadre de l’instruction écrite et de la séance de la formation de jugement, à caractériser une atteinte aux droits de la défense ;
  13. En sixième lieu, si l’article R. 712-37 du Code de l’éducation dans sa version alors applicable ne prévoit pas la possibilité pour la formation de jugement d’entendre les témoins par un moyen de télécommunication audiovisuelle, il résulte des dispositions combinées des articles 1 et 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 que, durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 31 juillet 2022, par dérogation et sur décision du président de la formation de jugement insusceptible de recours, les audiences des juridictions de l'ordre administratif pouvaient se tenir en utilisant un tel moyen permettant de s'assurer de l'identité des parties et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. Dès lors, Monsieur XXX n’est pas fondé à soutenir que l’audition des témoins par un moyen de télécommunication audiovisuelle devant la section disciplinaire de l’université Lumière Lyon 2 réunie en formation de jugement le 28 février 2022 aurait méconnu les dispositions de l’article R. 712-37 du Code de l’éducation, alors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions matérielles dans lesquelles ces auditions se sont tenues n’auraient pas permis de s’assurer de l’identité des parties, de la confidentialité des échanges et de ce qu’ils ont eu lieu contradictoirement en sa présence ainsi qu’en lui permettant d’en discuter la teneur ;
  14. En dernier lieu, la circonstance que Monsieur XXX n’aurait pas eu connaissance du procès-verbal de la séance de jugement du 28 février 2022 est sans incidence sur la régularité de la décision en litige ;
    Sur les faits retenus par la décision du 15 mars 2022 et sur la sanction qu’elle inflige :
  15. En vertu du premier alinéa de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, désormais codifié à l'article L. 121-1 du Code général de la fonction publique, le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité, le quatrième alinéa de l'article L. 123-6 du Code de l'éducation assignant par ailleurs au service public de l'enseignement supérieur la promotion « des valeurs d'éthique, de responsabilité et d'exemplarité ». En outre, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 précitée désormais codifié à l'article L. 530-1 du Code général de la fonction publique : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ». Enfin, aux termes de l'article L. 952-8 du Code de l'éducation : « (...) les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux enseignants-chercheurs et aux membres des corps des personnels enseignants de l'enseignement supérieur sont : / 1° Le blâme ; / 2° Le retard à l'avancement d'échelon pour une durée de deux ans au maximum ; / 3° L'abaissement d'échelon ; / 4° L'interdiction d'accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans au maximum ; / 5° L'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement ou de recherche ou certaines d'entre elles dans l'établissement ou dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant cinq ans au maximum, avec privation de la moitié ou de la totalité du traitement ; / 6° La mise à la retraite d'office ; / 7° La révocation. / Les personnes à l'encontre desquelles a été prononcée la sixième ou la septième sanction peuvent être frappées à titre accessoire de l'interdiction d'exercer toute fonction dans un établissement public ou privé, soit pour une durée déterminée, soit définitivement. » ;
  16. Il ressort des pièces du dossier, qu’au cours de la période 2003-2006, Monsieur XXX a cherché à entretenir des relations intimes avec Madame BBB, étudiante et stagiaire du festival « Doc en courts » qu’il dirigeait. Elle témoigne de ce qu’il l’a forcée à le tutoyer, lui a fait des compliments déplacés, l’a conduite chez lui, lui a proposé de partager une chambre d’hôtel pour diminuer les frais liés à un déplacement commun et est venu à son domicile pour tenter de la voir. Elle dénonce également la poursuite de ce comportement alors qu’elle était au Pays-Bas dans le cadre d’un échange Erasmus et produit de nombreux échanges de courriels qui attestent du comportement équivoque de Monsieur XXX, qui lui adresse ses messages depuis sa messagerie professionnelle et se place à la fois comme professeur conversant avec une étudiante et comme courtisan. Il ressort également des éléments transmis que si Madame BBB n’a pas cessé tout échange avec Monsieur XXX par la suite, elle a renoncé à intégrer le master que ce dernier dirigeait et a indiqué à Monsieur CCC, enseignant auprès de qui elle effectuait son master recherche, par un message du 23 septembre 2006, que si elle avait renoncé à poursuivre ses études, dans le cadre du master précité comme dans le cadre d’un doctorat, c’était en raison de l’attitude de Monsieur XXX dont « l’ambiguïté a fini par devenir harcèlement » ;
  17. Au cours de cette même période, il est en outre constant que Monsieur XXX a initié des rencontres hors de l’université avec Madame EEE, Madame FFF, Madame GGG et Madame HHH, étudiantes. Les témoignages de ces dernières font tous état de ce que ces rendez-vous, sous le prétexte d’échanges en lien avec leurs études, ont donné lieu à une attitude déplacée de Monsieur XXX, déplaçant la discussion dans la sphère privée, tenant des propos équivoques et cherchant ainsi à développer, contre leur volonté, des relations intimes. Si Monsieur XXX indique qu’il ne s’agit que de ressentis, qu’il n’a jamais tenu les propos qu’on lui prête et que s’il a cherché à avoir des échanges avec ces étudiantes pour partager sa passion du cinéma documentaire et son implication dans le festival, il n’a jamais harcelé sexuellement celles-ci ni eu d’attitude ambigüe envers elles, certaines ayant d’ailleurs poursuivi leurs études ou n’ayant pas rompu leurs échanges, les témoignages précités n’ont jamais varié au cours de la procédure, sont précis et concordants. Ils traduisent tous un même comportement de Monsieur XXX cherchant à imposer des relations de proximité avec des étudiantes. Ils sont en outre corroborés par les témoignages de Mesdames III, JJJ et KKK, également étudiantes de Monsieur XXX durant cette période, et faisant état de propos et d’attitudes déplacés traduisant un comportement ambivalent d’un enseignant à l’égard de ses étudiants ;
  18. Il ressort également des pièces du dossier qu’au cours de la période 2015-2016, Monsieur XXX a rencontré Madame DDD, doctorante à l’université de Paris X. Madame DDD s’est rendue à Lyon mi-décembre afin de présenter à Monsieur XXX ses travaux de thèse et de participer à une représentation du festival « Doc en courts » dirigé par ce dernier. Après avoir donné à leurs échanges une tournure personnelle et ambivalente, Monsieur XXX a raccompagné Madame DDD à son hôtel afin qu’elle y dépose ses affaires et a insisté pour se rendre dans sa chambre où il a initié un contact charnel appuyé que Madame DDD a décliné. Madame DDD indique que fragilisée par la perte de son directeur de thèse, elle a, à la suite de cet épisode, enduré un état dépressif. Si Monsieur XXX nie avoir tenu des propos séducteurs et fait des avances, il ne conteste pas s’être rendu dans la chambre d’hôtel de Madame DDD. Le témoignage précis de Madame DDD est en outre corroboré par celui de son ex-mari qu’elle avait informé en temps réel. Monsieur LLL, enseignant à Paris X, atteste également que Madame DDD s’est confiée à lui au cours de l’année 2017 par des propos francs et directs alors qu’elle était choquée et en plein désarroi. Enfin le témoignage de Madame MMM, également enseignante à Paris X, qui a finalement repris la direction de thèse de Madame DDD, et à qui cette dernière s’est également confiée en 2017, fait état d’un témoignage authentique. Si Monsieur XXX soutient également que son comportement avec Madame DDD relevait en tout état de cause de la sphère privée, cette dernière n’étant pas son étudiante, Madame DDD produit un courriel du 19 octobre 2016 dans lequel elle demande à Monsieur XXX s’il accepterait de devenir son directeur de thèse ainsi que les raisons pour lesquelles elle lui fait cette demande. En se déplaçant à Lyon, Madame DDD était dans l’expectative de son accord pour devenir son directeur de thèse. C’est dès lors en raison de son statut de professeur d’université, avec la relation asymétrique qui en découle, qu’elle s’est adressée à lui. Dès lors, le comportement de Monsieur XXX ne relève pas de la seule sphère privée et doit être qualifié d’inapproprié. D’autre part, Madame MMM, ancienne étudiante puis vacataire à l’université Lumière Lyon 2 entre 2013 et 2015, témoigne également du comportement inapproprié de Monsieur XXX à son égard en 2015, lequel après l’avoir encouragée dans son projet de reprise d’études et insinué que les doctorantes pouvaient avoir des relations sexuelles avec leur directeur de thèse, lui a finalement retiré son soutien ;
  19. Bien que centrés sur deux périodes limitées et nonobstant l’absence de difficultés portées à leur connaissance par la plupart des collègues de Monsieur XXX comme du personnel administratif, ces témoignages nombreux, précis et non stéréotypés, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu’ils résulteraient d’une orchestration de Madame BBB, à l’origine de la dénonciation ayant donné lieu au déclenchement d’une enquête administrative et qui a donné une large publicité à cette enquête, sont de nature à établir que Monsieur XXX a cherché à entretenir avec des étudiantes, parfois contre leur volonté, des relations intimes et inappropriées et a ainsi méconnu le devoir d’exemplarité qui s’impose à lui en sa qualité de professeur d’université. La circonstance que les faits commis l’ont été pour tout ou partie en dehors du service est inopérante dès lors qu’ils ont pour effet de perturber son bon fonctionnement. Ce comportement constitue une faute de nature à justifier une sanction ;
  20. La section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 a infligé à Monsieur XXX une sanction du 5° groupe d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement et de recherche. Cette sanction, limitée à l’université Lumière Lyon 2, à une durée d’un an et assortie d’une privation de la totalité de son traitement, n’apparait pas disproportionnée au regard de la faute commise par Monsieur XXX ;
  21. Il résulte de tout ce qui précède que Monsieur XXX n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 a prononcé à son encontre une interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement et de recherche au sein de l’université pour une durée d’un an en assortissant cette interdiction d’une privation de la totalité de son traitement. Ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative doivent également, par voie de conséquence, être rejetées ;

 

Décide

 

Article 1 – La décision rendue le 15 mars 2022 par la section disciplinaire de l’université Lumière Lyon 2 compétente à l’égard des enseignants-chercheurs qui a prononcé la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement et de recherche à l’université Lumière Lyon 2 pour une durée de douze mois, assortie de la privation du traitement à l’encontre de Monsieur XXX est confirmée.

 

Article 2 – Les conclusions présentées par Monsieur XXX au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative sont rejetées.

 

Article 3 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à la présidente de l’université Lumière Lyon 2, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Lyon.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 11 décembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux, Marcel Sousse, Marguerite Zani, Lilian Aveneau, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris 31 décembre 2024,

 

Le président,

Christophe Devys

La vice-présidente,

Frédérique Roux

Le greffier en chef,

Éric Mourou
 

 

Monsieur XXX

N° 1814

Jean-Luc Hanus

Rapporteur

Séance publique du 21 novembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

Le président de l’université Clermont Auvergne a engagé, le 20 juillet 2023, contre Monsieur XXX, maître de conférences affecté au laboratoire de psychologie sociale et cognitive et à l’UFR de psychologie de l’université Clermont Auvergne, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de son établissement ; 

Par une décision du 14 décembre 2023, le Cneser statuant en matière disciplinaire a renvoyé les poursuites devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université Jean Moulin Lyon 3 ;

Par une décision du 2 juillet 2024, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Jean Moulin Lyon 3 a infligé à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant une durée de deux ans, assortie de la privation de la moitié du traitement, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par une requête du 29 août 2024, Monsieur XXX, représenté par Maître Juliette Chapelle, a demandé au Cneser statuant en matière disciplinaire l’annulation de la décision du 2 juillet 2024 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Jean Moulin Lyon 3 ;

Par une requête en sursis à exécution du 29 août 2024, enregistrée au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 16 septembre 2024, Monsieur XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire qu’il soit sursis à l’exécution de cette décision ;

Il soutient que la décision attaquée a méconnu les principes du droit de la défense, dès lors qu’au moment de sa convocation devant la formation de jugement, il ne savait pas quel comportement était jugé comme susceptible de caractériser une faute disciplinaire ni quelle disposition réglementaire aurait pu être méconnue ; qu’elle est entachée d’une erreur d’appréciation des faits, dès lors que les relations amoureuses avec Mesdames AAA et BBB étaient pleinement consenties, qu’elles n’ont pas nui ni entravé la poursuite des travaux de recherches de ces dernières ; qu’ainsi, son comportement n’a été constitutif ni de harcèlement, ni de violences sexistes et sexuelles et ne peut dès lors être regardé comme constitutif d’une faute disciplinaire ; qu’à supposer qu’il le soit, la sanction est disproportionnée ; que d’ailleurs, la sévérité de la sanction prononcée n’a fait l’objet d’aucune motivation de la part de la formation disciplinaire ;

Par un mémoire complémentaire daté du 15 novembre 2024, Monsieur XXX reprend les conclusions de sa requête et soutient que la décision attaquée est irrégulière en ce qu’il n’a pas été informé devant la section disciplinaire de première instance de son droit de se taire, en méconnaissance de la décision du Conseil constitutionnel du 4 octobre 2024 relatif à l’application de ce principe aux formations disciplinaires ;

Par des observations en défense datées du 19 novembre 2024, le président de l’université Clermont Auvergne demande au Cneser statuant en matière disciplinaire de rejeter la requête de sursis à exécution présentée par Monsieur XXX. Il soutient que l’absence de notification du droit de se taire ne peut entacher d’irrégularité la décision attaquée dès lors que l’inconstitutionnalité des dispositions de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983 et de l’article L. 532-4 du Code général de la fonction publique n’avaient pas été constatée par le Conseil constitutionnel à la date de cette décision ;

Par un mémoire en réplique du 20 novembre 2024, Monsieur XXX reprend les conclusions de sa requête et soutient que la décision du 4 octobre 2024 du Conseil constitutionnel est applicable à la présente affaire, dès lors que le paragraphe 19 de cette décision précise que « Par ailleurs, la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de la publication de la présente décision et non jugées définitivement ». Le rapport d’instruction de Jean-Luc Hanus, maître de conférences, rapporteur auprès de la juridiction disciplinaire, a été mis à disposition de Monsieur XXX et du président de l’université Clermont Auvergne le 7 octobre 2024 ;

Par lettres recommandées du 7 octobre 2024, Monsieur XXX, Maître Juliette Chapelle, son conseil, et le président de l’université Clermont Auvergne ont été régulièrement convoqués à l’audience du 21 novembre 2024 ;

Monsieur XXX et son conseil, Maître Julie Fragonas, étant présents ;

Mathias Bernard, président de l’université Clermont Auvergne, étant présent ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2, L. 952-8, R. 232-33 et R. 232-34 ; 

Vu le Code général de la fonction publique ;

Monsieur XXX ayant été informé de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ;

Après avoir entendu en séance publique, le 21 novembre 2024, le rapport de Hanus, rapporteur auprès du Cneser statuant en matière disciplinaire ;

La parole ayant été donnée, après la lecture du rapport, puis en réponse aux questions posées par les membres de la juridiction, à Monsieur XXX et à son conseil ;

Monsieur XXX s’étant exprimé en dernier, avant que la formation restreinte du Cneser statuant en matière disciplinaire ne délibère à huis clos ;

 

Considérant ce qui suit :

Sur la demande de sursis à exécution de la décision du 2 juillet 2024 de la section disciplinaire de l’université de Jean Moulin Lyon 3 : 

  • Aux termes du quatrième alinéa de l’article R. 232-34 du Code de l’éducation : « Le sursis peut être prononcé si les moyens présentés dans la requête paraissent sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée » ;
  • Aucun des moyens invoqués par Monsieur XXX ne paraît sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée ; la demande de sursis à exécution présentée par Monsieur XXX ne peut qu’être rejetée ;

Sur la demande de frais irrépétibles : 

Les dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’université Clermont Auvergne, qui, dans la présente affaire, n’est pas la partie perdante, la somme que Monsieur XXX demande à ce titre ;

 

Décide

 

Article 1 – La demande de Monsieur XXX tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution de la décision du 2 juillet 2024 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Jean Moulin Lyon 3 qui lui a infligé la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant une durée de deux ans, assortie de la privation de la moitié du traitement, est rejetée.

 

Article 2 – La demande de Monsieur XXX de condamnation de l’université Clermont Auvergne à lui verser la somme de 2 472 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative est rejetée.

 

Article 3 – Dans les conditions fixées aux articles R 232-41 et R 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université Clermont Auvergne, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Clermont Ferrand.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 21 novembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux, professeur des universités et Jean-Luc Hanus, maître de conférences, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris le 31 décembre 2024,

 

Le président,

Christophe Devys

La vice-présidente,

Frédérique Roux

Le greffier en chef,

Éric Mourou

 

 

Monsieur XXX

N° 1815

Frédérique Roux

Rapporteure

Séance publique du 5 décembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

Le président de l’université Côte d’Azur a engagé, le 18 septembre 2023, contre Monsieur XXX, professeur des universités en psychologie, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de son établissement ;

Par une décision du 25 juin 2024, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Côte d’Azur a infligé à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement dans l’établissement pendant une durée de deux ans, assortie de la privation de la moitié du traitement, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par une requête du 6 août 2024, Monsieur XXX, représenté par Maître Anne Giovando, a demandé au Cneser statuant en matière disciplinaire l’annulation de la décision du 2 juillet 2024 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Côte d’Azur ;

Par une requête distincte du 6 août 2024, enregistrée au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 27 septembre 2024, Monsieur XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire qu’il soit sursis à l’exécution de cette décision d’enjoindre au président de l’université Côte d’Azur, d’une part, de le réintégrer dans ses fonctions d’enseignant-chercheur à compter du prononcé de la décision, d’autre part, de lui verser l’intégralité de son traitement à compter du prononcé de la décision et que soit mise à la charge de l’établissement, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L 761-1 du Code de justice administrative ;

Monsieur XXX soutient que le communiqué du président de l’université en date du 24 avril 2023 est à charge contre lui et doit être regardé comme méconnaissant le droit à la présomption d’innocence et comme entachant l’ensemble de la procédure d’irrégularité ; que la plupart des faits qui lui sont reprochés et qui ont été reconnus comme fautifs par la section disciplinaire l’ont été sur la base d’un simple doute ; que le doute n’est pas suffisant pour prononcer une sanction ; que, si certains faits ont été reconnus comme fautifs et établis sur la base d’une certitude, ils ne peuvent justifier l’intensité de la sanction prononcée ; qu’il n’a pas méconnu ses obligations de neutralité et de réserve, ni ses obligations d’obéissance hiérarchique et de discrétion professionnelle ; que la section disciplinaire a violé le principe non bis in idem ; que ni le fait d’avoir introduit un tournevis dans l’établissement ni celui d’avoir organisé un exercice attentat ne peuvent être regardé comme fautifs ; que, s’il s’est abstenu de saisir le parquet de faits présumés de viol, c’est parce qu’il avait les plus grands doutes quant à la véracité des allégations de l’étudiante présumée victime ; qu’il exerce une activité de psychothérapeute dans un cadre parfaitement légal et conformément aux règles relatives au cumul d’activité ; que la décision attaquée est entachée d’une insuffisance de motivation ; que la sanction prononcée ne repose sur aucun fondement juridique explicite ; qu’elle est entachée de défaut de réponse à certains des moyens qu’il avait invoqués ; qu’elle méconnaît les droits de la défense, le rapport d’instruction et les pièces du dossier ne lui ayant pas été communiqué dans le délai de 15 jours avant l’audience ; que la communication tardive du rapport et des pièces nombreuses et volumineuses, ainsi que la clôture précoce de l’instruction, ne lui ont pas permis de préparer utilement sa défense, en violation de l’article 6 de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) ; 

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 25 novembre 2024, Monsieur XXX reprend les conclusions de sa requête ; il soutient, en outre, qu’il a été entendu à deux reprises par la commission d’enquête administrative et que, alors qu’il n’avait pas été informé du droit qu’il avait de se taire, il s’est auto-incriminé lors de chacune de ces auditions ; qu’ainsi, la procédure d’enquête administrative préalable est entachée d’un vice qui affecte son déroulement et est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée ; 

Par un mémoire en défense daté du 28 novembre 2024, le président de l’université Côte d’Azur demande au Cneser statuant en matière disciplinaire de rejeter la requête de sursis à exécution de Monsieur XXX et de mettre à la charge de ce dernier la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative. Il conclut au rejet de la requête ;

Par un mémoire en réplique daté du 2 décembre 2024, Monsieur XXX reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et demande que soit mis à la charge de l’université Côte d’Azur une somme de 5 000 euros de frais irrépétibles ;

Le rapport d’instruction de Frédérique Roux, professeure des universités, rapporteure auprès de la juridiction disciplinaire, a été mis à disposition de Monsieur XXX et du président de l’université Côte d’Azur le 24 octobre 2024 ;

Par lettres recommandées du 24 octobre 2024, Monsieur XXX, Maître Anne Giovando, son conseil, et le président de l’université Côte d’Azur ont été régulièrement convoqués à l’audience du 5 décembre 2024 ;

Monsieur XXX et son conseil, Maître Anne Giovando, avocate, étant présents ;

Le président de l’université Côte d’Azur étant représenté par Maître Marjorie Abbal, avocate ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2, L. 952-8 et R. 232-33, R. 232-34 ;

Vu le Code général de la fonction publique ;

Monsieur XXX ayant été informé du droit au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui sont posées ou de se taire ; 

Après avoir entendu en séance publique, le 5 décembre 2024, le rapport de Roux, rapporteure auprès du Cneser statuant en matière disciplinaire ;

La parole ayant été donnée, après la lecture du rapport, puis en réponse aux questions posées par les membres de la juridiction, aux parties présentes ;

Monsieur XXX s’étant exprimé en dernier, avant que la formation restreinte du Cneser statuant en matière disciplinaire ne délibère à huis clos ;

 

Considérant ce qui suit :

Sur la demande de sursis à exécution de la décision du 25 juin 2024 de la section disciplinaire de l’université Côte d’Azur :

  1. Aux termes du quatrième alinéa de l’article R. 232-34 du Code de l’éducation : « Le sursis peut être prononcé si les moyens présentés dans la requête paraissent sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée » ;
  2. Aucun des moyens invoqués par Monsieur XXX ne paraît sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée ; la demande de sursis à exécution présentée par Monsieur XXX ne peut donc qu’être rejetée ;
    Sur la demande de frais irrépétibles : 
  3. Les dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’université Côte d’Azur, qui, dans la présente affaire, n’est pas la partie perdante, la somme que Monsieur XXX demande sur le fondement de ces dispositions ;
  4. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit à la demande du président de l‘université Côte d’Azur visant à la condamnation de Monsieur XXX à lui verser la somme de 5 000 euros sur le même fondement ;

 

Décide

 

Article 1 – La demande de Monsieur XXX tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution de la décision du 25 juin 2024 par laquelle la section disciplinaire du conseil académique de l’université Côte d’Azur lui a infligé la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement dans l’établissement pendant une durée de deux ans, assortie de la privation de la moitié du traitement, est rejetée.

 

Article 2 – La demande de Monsieur XXX de condamnation de l’université Côte d’Azur à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative, ainsi que la demande du président de l’université Côte d’Azur de condamnation de Monsieur XXX à lui verser la même somme de 5 000 euros sur le même fondement, sont rejetées.

 

Article 3 – Dans les conditions fixées aux articles R 232-41 et R 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université Côte d’Azur, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Nice.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 5 décembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux et Lilian Aveneau, professeurs des universités, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris le 31 décembre 2024,

 

Le président,

Christophe Devys

La vice-présidente,

Frédérique Roux

Le greffier en chef,

Éric Mourou


 

Monsieur XXX

N° 1819

Frédérique Roux

Rapporteure

Séance publique du 11 décembre 2024

Décision du 31 décembre 2024

Vu la procédure suivante : 

Le président de l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) a engagé, le 19 septembre 2023, contre Monsieur XXX, professeur des universités à l’IUT de Mantes-en-Yvelines, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de son établissement ;

Par une décision du 16 juillet 2024, la section disciplinaire du conseil académique de l’UVSQ a infligé à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;

Par une requête du 11 septembre 2024, Monsieur XXX, représenté par Maître Aurélien Desingly, a demandé au Cneser statuant en matière disciplinaire l’annulation de la décision du 16 juillet 2024 de la section disciplinaire du conseil académique de l’UVSQ ;

Par une requête en sursis à exécution du 11 septembre 2024, enregistrée au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 15 octobre 2024, Monsieur XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire qu’il soit sursis à l’exécution de cette décision ;

Il soutient que la décision attaquée a été rendue plus de six mois après la saisine de la section disciplinaire de l’UVSQ ; que cette section disciplinaire était dès lors devenue incompétente en application de l’article R. 232-31 du Code de l’éducation ; que la désignation du secrétaire de la section disciplinaire, chargé des affaires juridiques au sein de l’UVSQ, était irrégulière ; que les fautes qui lui sont reprochées dans la décision attaquée n’étaient pas mentionnées dans le courrier de saisine de la section disciplinaire ; qu’il n’a pas manqué au devoir de réserve ni au devoir de loyauté en répondant à une interview ; que les faits qui lui sont reprochés n’étaient pas fautifs ;

Le rapport d’instruction de Frédérique Roux, professeure des universités, rapporteure auprès de la juridiction disciplinaire, a été mis à disposition de Monsieur XXX et du président de l’UVSQ le 8 novembre 2024.

Par lettres recommandées du 8 novembre 2024, Monsieur XXX, Maître Aurélien Desingly, son conseil, et le président de l’UVSQ ont été régulièrement convoqués à l’audience du 11 décembre 2024.

Monsieur XXX étant représenté par Maître Aurélien Desingly ;

Le président de l’UVSQ étant absent ;

Vu l’ensemble des pièces du dossier ;

Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2, L. 952-8 et R. 232-31 à R. 232-34 ;

Après avoir entendu en séance publique, le 11 décembre 2024, le rapport de Roux, rapporteure auprès du Cneser statuant en matière disciplinaire ;

La parole ayant été donnée, après la lecture du rapport, puis en réponse aux questions posées par les membres de la juridiction, au représentant de Monsieur XXX qui s’est exprimé en dernier, avant que la formation restreinte du Cneser statuant en matière disciplinaire ne délibère à huis clos ;

 

Considérant ce qui suit : 

  • Aux termes du quatrième alinéa de l’article R. 232-34 du Code de l’éducation : 
    « Le sursis peut être prononcé si les moyens présentés dans la requête paraissent sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée » ;
  • Aucun des moyens invoqués par Monsieur XXX ne paraît sérieux et de nature à justifier l’annulation ou la réformation de la décision attaquée ; la demande de sursis à exécution présentée par Monsieur XXX ne peut donc qu’être rejetée ;

 

Décide

 

Article 1 – La demande présentée par Monsieur XXX et tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution de la décision rendue le 16 juillet 2024 par la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, qui lui a infligé la sanction d’interdiction d’accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans, est rejetée.

 

Article 2 – Dans les conditions fixées aux articles R 232-41 et R 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ;copie sera adressée, en outre, à la rectrice de l’académie de Versailles.

 

Délibéré à l’issue de la séance du 11 décembre 2024, où siégeaient Christophe Devys, président de section au conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Frédérique Roux et Lilian Aveneau, professeurs des universités, membres de la juridiction disciplinaire.

 

Fait à Paris le 31 décembre 2024,

 

Le président,

Christophe Devys

La vice-présidente,

Frédérique Roux

Le greffier en chef,

Éric Mourou

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