Publié le 13.03.2025

Faire de la musique avec l’électricité du corps et du cerveau : le projet BBDMI

Découvrez le projet de recherche BBDMI, qui associe arts numériques et création musicale dans une démarche de science ouverte. Reportage à la MSH Paris Nord.

Alain : Nous développons des prototypes pour faire de la musique avec l'électricité du corps et du cerveau. Il s'agit du projet BBDMI (body brain digital music), qui est un projet ANR et qui court depuis 2022 et ira jusque mi-2025. Nous construisons à la fois des logiciels que nous développons et des dispositifs électroniques, des cartes électroniques, et nous souhaitons rendre tout cela disponible. Ce qu'on appelle donc science ouverte, ça va être ces connaissances, publier ces schémas, pour pouvoir refaire les cartes ou les utiliser d'une certaine façon et rendre tout cela accessible au grand public au sens large, et surtout à la communauté des musiciens qui pratiquent ce genre d'instrument augmenté.

David : Ce qu'on vient d'entendre du coup ce sont les premiers sons qui ont été enregistrés. Le son a été découpé en de petits grains, du coup on utilise un effet qui s'appelle la granulation, mais on va les transposer, on va les moduler, on va faire des traitements sur chaque petit grain avant de les faire sortir dans les hauts-parleurs. On fait tous ces traitements-là, on les spatialise et après on les diffuse mais la taille des grains, la modulation, la transposition, l'effet des réinjection, tout ça est géré par les capteurs qui sont sur son corps. Il y a aussi la possibilité de changer la texture ou la transposition des timbres du son avec les gestes.

Alain : Ce que j'ai sur la tête c'est un casque EEG qui, par des électrodes placées dans mon cuir chevelu, va mesurer des tensions électriques en plusieurs points de mon crâne et donc récupérer ces tensions électriques pour détecter finalement les signaux électriques qui sont créés par mon cerveau. Parmi ces signaux électriques, on va repérer certaines bandes de fréquence dont la fameuse bande Alpha qui va être dépendante de mon état de relaxation ou au contraire de polarisation de concentration extrême visuelle, notamment sur quelque chose ou sur une pensée même.

David : Maintenant si tu peux fermer les yeux et te relaxer. Est-ce que tu peux ouvrir les yeux ?

On remplace mon bras et mon mollet par son cerveau et finalement c'est l'idée que le corps, par le geste, va finalement permettre de créer de nouvelles formes de contrôle musical.

De la musique à partir de signaux électriques

Body Brain Digital Music Instruments (BBDMI), instruments de musique numérique corps et cerveau, est un projet de recherche porté par la MSH Paris Nord (Maison des Sciences Humaines et sociales), financé par l'ANR et lancé en 2022 jusqu'en 2025.

L'objectif du projet est de produire de la musique autrement, à partir des signaux électriques des muscles et du cerveau. Il lie donc les sciences et la technologie, et s’appuie sur des stratégies émergentes de recherche-création dans le domaine de la musique et des arts numériques.

L'utilisation des signaux physiologiques du cerveau et du corps humain dans l’interaction humain-machine fait partie du domaine de recherche de l'informatique physiologique.

Comment ça fonctionne ?

Une nouvelle forme de contrôle musical

Grâce à des capteurs qui sont placés sur le corps du musicien, les chercheurs vont pouvoir utiliser un effet de granulation, c'est-à-dire que le son enregistré va être transformé en grains. Chaque grain va être traité, transposé et modulé avant de sortir dans les hauts-parleurs. Ce sont donc les gestes corporels qui vont piloter la granularité et le traitement spatial du son.

On fait tous ces traitements-là, on les spatialise et après on les diffuse, mais la taille des grains, la modulation, la transposition, l'effet des réinjections, tout ça est géré par les capteurs qui sont sur son corps. Il y a aussi la possibilité de changer la texture ou la transposition des timbres du son avec les gestes. 

David Fierro, doctorant et ingénieur d'études sur le projet BBDMI

Ce projet intègre les technologies EMG (électromyogramme) ou EEG (électroencéphalogramme) appliquées à la musique et aux arts numériques.

Les chercheurs utilisent également un casque EEG qui va permettre, grâce aux électrodes placés sur le cuir chevelu d'une personne volontaire, de mesurer des tensions électriques. Ils vont ensuite récupérer ces tensions pour détecter les signaux électriques produits par le cerveau de la personne. A partir de leur logiciel, le son qui se produira dépendra donc des pensées et de l'état de la personne.

Parmi ces signaux électriques, on va repérer certaines bandes de fréquence dont la fameuse bande Alpha qui va être dépendante de mon état de relaxation ou au contraire de polarisation de concentration extrême visuelle, notamment sur quelque chose ou sur une pensée même. 

Alain Bonardi, Professeur en informatique et création musicale au Département Musique de l'Université Paris 8

Le corps, par le geste, peut donc désormais permettre de créer de nouvelles formes de contrôle musical.

De la science ouverte

Les chercheurs construisent et développent également des logiciels, ainsi que des dispositifs électroniques, qu'ils souhaitent rendre accessibles au grand public, et surtout à la communauté des musiciens qui pratiquent ce genre d'« instruments augmentés ».

Dans une perspective de sciences ouvertes étendue à l’industrie, le projet BBDMI vise le développement d'un instrument de musique physiologique utilisable par des musiciens et des artistes qui ne sont pas spécialisés dans les domaines des neurosciences et de l'analyse du signal. Il pourra être utilisé par les musiciens expérimentaux, les instrumentistes, et les praticiens de la médiation culturelle travaillant dans le monde de l’autisme et des publics empêchés (personnes en situation de handicap, par exemple).