Les sciences humaines et sociales (SHS) sont essentielles en contexte d’incertitude et de crise pour anticiper les chocs futurs, renouveler les corps de doctrines, comprendre la diversité des comportements et l’évolution des sociétés, mais également pour évaluer l’efficacité des actions et des politiques publiques. L’appel à manifestation d’intérêt « Programmes de Recherche en Sciences Humaines et Sociales » de France 2030 s’inscrit dans cette ambition en renforçant les SHS autour de thématiques scientifiques prioritaires et d’intérêt majeur pour l’État. Grâce à ces programmes associant excellence de la recherche, constitution de consortiums robustes et rayonnement vers la société et à l’international, les savoirs produits par les SHS pourront ainsi être pleinement mobilisés pour éclairer les décisions publiques ou privées et pour accompagner l’innovation de rupture. Ils contribueront à répondre aux grandes questions sociétales, géopolitiques, climatiques ou culturelles. Cette action est opérée pour le compte de l’État par l’ANR et s’appuie sur l’excellence des écosystèmes de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
17 établissements porteurs de consortiums avaient été pré-sélectionnés en première phase. La phase d’évaluation des projets, fondée sur un dossier et une audition a été réalisé par un jury international présidé par le Pr. Antonio Loprieno (Universität Basel) et vice-présidé par le Pr. Anne Lequy (Hochshule Magdebourg-Stendal). Le jury s’est tout particulièrement attaché à examiner l’excellence scientifique du projet, son caractère structurant pour les disciplines des sciences humaines et sociales en France et son impact sociétal pour l’un des grands défis proposés par l’appel à manifestation d’intérêt.
6 établissements porteurs ont convaincu le jury de leur capacité à mettre en place les leviers nécessaires à l’incubation, à la création, au suivi, à l’ouverture internationale et à la dissémination de la thématique scientifique prioritaire choisie. Chacun des projets obtient un financement de 9 000 000 €.
Projets lauréats
Projet | Porteur | Thématique scientifique | Organismes | Consortium (premier cercle) |
DémoCIS | Université de Lille | L’évolution des démocraties | CNRS, Inria |
Université Grenoble Alpes |
ReligiS | Université de Strasbourg | Les religions | CNRS |
Université de Lorraine |
DECRIPT | Inalco | Les civilisations et les troubles géopolitiques | CNRS, IRD | Université Paris 1 Université Bordeaux Montaigne Sciences Po Sciences Po Bordeaux IEP Lille Université Paris Panthéon-Assas Université de Strasbourg Université Paris III Sorbonne Nouvelle Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis Université Paris Sciences et Lettres (PSL) |
HERMES | Université Sorbonne nouvelle | La préservation du patrimoine culturel | CNRS |
Université Bordeaux Montaigne |
SPHINX | Sorbonne Université | La préservation du patrimoine culturel | CNRS, Inria | UT Compiègne Université Paris 1 Université Panthéon Assas Université PSL Université de Caen Normandie Université de Caen Université Paris-Saclay |
FORESEE | Université Grenoble Alpes | Les conséquences du changement climatique |
CNRS, Inrae |
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Résumé des projets
Démocraties : DémoCIS (Université de Lille)
La crise démocratique multifactorielle confronte nos sociétés au défi de la (re)construction de communs face à des espaces publics fragmentés. DémoCIS engage un collectif interdisciplinaire d’excellence issu de 4 Universités, 3 IEP, de l’Institut Mines Télécom, du CNRS et d’Inria. (336 chercheurs et enseignants-chercheurs issus de 51 unités de recherche dont 16 UMR CNRS et 1 Unité Propre CNRS) autour de 4 défis majeurs :
- Répondre à la crise des institutions par l’innovation démocratique ;
- Repenser les lieux et formes d’expression de la citoyenneté ;
- Agir contre la polarisation des sociétés et les désordres informationnels ;
- Renforcer les démocraties menacées.
Climat : FORESEE (Université Grenoble Alpes)
Après des décennies d’accumulation de connaissances scientifiques, les conséquences du changement climatique (CCC) sont désormais vécues, intimement, et à très large échelle. Le point de départ du projet FORESEE est que cette dimension vécue des CCC, encore largement inexplorée, est essentielle pour comprendre la diversité des réactions aux CCC, documenter les dynamiques sociales conflictuelles qu’elles suscitent, et proposer des modalités de changement durable et équitable. FORESEE mobilise la diversité des sciences humaines et sociales pour apporter trois éclairages imbriqués : la pluralité des discours et des argumentaires face aux CCC, les obstacles épistémiques à l'appréhension des limites planétaires, et les mécanismes de résilience, résistance, adaptation des organisations territoriales, et enfin la manière dont les (in)égalités et les (in)justices obligent à revisiter en profondeur les fondements du contrat social.
Patrimoine : SPHINX (Sorbonne Université) et HERMES (Université Sorbonne Nouvelle)
Le projet SPHINX fédère des institutions académiques, culturelles et économiques de premier plan, disposant d'expertises et de collections exceptionnelles des temps géologiques au présent (environ 500 chercheurs et enseignants-chercheurs allant des langues rares à l’archéologie, de la philosophie à l’histoire de l’art), avec l’ambition de constituer un pôle d’expertise européen, pour aborder les patrimoines sur le temps long et à toutes les échelles, SPHINX soutiendra la structuration de programmes interdisciplinaires répondant à trois enjeux majeurs : la fabrique du patrimoine, les patrimoines empêchés, le patrimoine réapproprié.
Le projet HERMES s’interroge sur la manière de créer et de maintenir des communs culturels et une identité partagée dans une société plurielle, à l’heure où les transitions numériques, environnementales et sociales, ainsi que les tensions nationales et internationales accrues, transforment notre compréhension du patrimoine et des politiques patrimoniales, avec trois objectifs : structurer les capacités de recherche sur les patrimoines en devenir et développer un consortium interdisciplinaire avec une forte visibilité nationale et internationale, renforcer le transfert de la recherche vers les acteurs publics et la société, et favoriser une approche démocratique et inclusive du patrimoine culturel, en accord avec les besoins et les évolutions de la société.
Religions : ReligiS (Université de Strasbourg)
La question des religions est devenue à la fois omniprésente et plus problématique que jamais, en raison de l'extrême complexité et de la diversité de ses manifestations, avec de nombreuses questions soulevées dans le débat public. Ces évolutions posent de nouvelles questions aux institutions (gouvernement, collectivités locales, hôpitaux, écoles, justice, prisons, entreprises). ReligiS se concentre sur la transformation des interactions entre les religions et les sociétés dans le monde contemporain, dans une perspective à long terme. Son objectif principal est double : développer un nouveau cadre scientifique, résolument ouvert, interdisciplinaire et international, afin de repenser les processus de transformation des relations entre religions et sociétés, et créer les conditions institutionnelles d'un changement à grande échelle des mécanismes et des actions de transfert des connaissances académiques sur les religions vers les décideurs politiques et la société.
Troubles géopolitiques : DECRIPT (INALCO)
Les récits civilisationnels renvoient à des discours socialement et idéologiquement construits, articulant des représentations sélectives de l’histoire et de l’identité d’un ensemble politique : la « civilisation des civilisations » de la Russie, justifiant sa guerre contre l'Ukraine, ou les « Nouvelles routes de la soie » de la Chine et ses revendications territoriales en mer de Chine méridionale, sont des exemples parmi d'autres. Cette évolution pose des défis inédits à la France et à l’Europe en les obligeant à renouveler leur compréhension de l’espace mondial et les fondements de leur action extérieure. DECRIPT vise à développer une expertise et des outils opérationnels sur la mobilisation et les effets des récits civilisationnels dans les crises géopolitiques contemporaines, en se ciblant sur 4 aires clés de conflits majeurs pour la France et l’Europe : Indo-Pacifique, Afrique, Ukraine et ancien monde soviétique, Proche-Orient et Moyen-Orient.
À propos de France 2030
Le plan d’investissement France 2030 :
- Traduit une double ambition : transformer durablement des secteurs clefs de notre économie (énergie, automobile, santé, aéronautique ou encore espace) par l’innovation technologique et industrielle, et positionner la France non pas seulement en acteur, mais bien en leader du monde de demain. De la recherche fondamentale, à l’émergence d’une idée jusqu’à la production d’un produit ou service nouveau, France 2030 soutient tout le cycle de vie de l’innovation jusqu’à son industrialisation.
- Est inédit par son ampleur : 54 Md€ seront investis pour que nos entreprises, nos universités, nos organismes de recherche, réussissent pleinement leurs transitions dans ces filières stratégiques. L’enjeu : leur permettre de répondre de manière compétitive aux enjeux écologiques et d’attractivité du monde qui vient, et faire émerger les futurs champions de nos filières d’excellence pour ainsi renforcer la souveraineté et l’indépendance française dans des secteurs clés. 50 % des dépenses seront en ce sens consacrées à la décarbonation de l’économie, et 50% fléchées au profit d’acteurs émergents, porteurs d’innovation sans impact défavorable sur l’environnement (au sens du principe Do No Significant Harm).
- Sera mis en œuvre collectivement : le plan est pensé et déployé en concertation avec les acteurs économiques, académiques, locaux et européens qui ont contribué à en déterminer les orientations stratégiques comme les actions phares. Les porteurs de projets sont invités à déposer leur dossier via des procédures ouvertes, exigeantes et sélectives pour bénéficier de l’accompagnement de l’État.
- Est piloté par le Secrétariat général pour l’investissement pour le compte de la Première ministre et mis en œuvre par l’Agence de la transition écologique (ADEME), l’Agence nationale de la recherche (ANR), Bpifrance et la Banque des Territoires.