Ci-dessus, visite de la Maison Poincaré en compagnie de Sylvie Benzoni, directrice de l'Institut Henri Poincaré.
Le Pi Day ou journée des mathématiques, renvoie à Pi, la fameuse constante mathématique et se déroule chaque 14 mars ou 3/14 pour les anglo-saxons, en référence aux trois premiers chiffres du nombre Pi. Cette journée est donc dédiée à la sensibilisation à ce domaine scientifique.
À la fois musée ouvert à tous et toutes et lieu de recherche, la Maison Poincaré propose une offre pédagogique accessible aux élèves de collège dès la classe de 4e et jusqu'à la terminale.
Faire l'expérience des mathématiques
La scénographie de la Maison Poincaré est le fruit d'un travail de muséographie mais également de la contribution d'une équipe de 14 mathématiciens et de mathématiciennes à la création du projet pédagogique du musée, pour donner lieu à une expérience originale des questions scientifiques difficiles à observer ou à représenter dans notre monde.
Un parcours de visite atypique
Le parcours tire parti des lieux patrimoniaux (amphithéâtres classés, anciens laboratoires ou bureaux) pour emmener les visiteurs à travers l'espace et le temps. L'exposition permanente repose sur 7 espaces symbolisés par des verbes d'action, en écho à la place que les mathématiques occupent dans notre vie, à nos interactions, que ce soit au beau milieu d'une foule ou encore dans l'art. Ainsi, les expériences offertes aux visiteurs sont : visualiser, modéliser, connecter, inventer, devenir, respirer, inventer, partager.
Au sein de l'espace "visualiser", le dispositif Holo-Math, par exemple, est une expérience de réalité mixte (virtuelle et réelle), à vivre en groupe guidé par un médiateur ou une médiatrice scientifique, pour s’émerveiller ou s’interroger collectivement sur des questions mathématiques.
L'espace "devenir" se trouve, quant à lui, dans le bureau historique de Jean Perrin, prix Nobel de physique en 1926 et fondateur du Palais de la découverte à Paris, et montre l’engagement de scientifiques dans la société à travers une mosaïque paritaire de portraits de femmes et d'hommes contemporains, chercheurs et chercheuses empreints de mathématiques : une lignée vouée à inspirer les jeunes générations.
Bien évidemment, au cours de la visite, le visiteur est invité à toucher, manipuler divers objets à disposition, mais aussi à échanger, au sein de l'espace "partager", conçu comme un lieu de rencontre avec les chercheurs, au gré de la programmation du musée (et notamment des expositions temporaires).
Interview de Clotilde Fermanian, mathématicienne et ambassadrice de la Maison Poincaré
Clotilde Fermanian est mathématicienne, professeure à l'Université Paris-Est Créteil. Elle est investie dans la diffusion des sciences au sein de l'Institut Henri Poincaré et impliquée dès la conception du projet de la Maison Poincaré.
Comment êtes-vous entrée dans ce projet de musée des mathématiques ?
J'avais été invitée à (...) participer à un groupe de travail, sur l'espace "inventer", qui ne portait pas encore ce nom-là, l'espace historique. On a formé un groupe de travail avec des historiens des mathématiques et d'autres collègues, dont un professeur de classe préparatoire, mathématicien. Ensuite, on m'a demandé de piloter ce groupe, d'organiser les échanges et puis de vérifier qu'on respectait les délais pour produire le contenu, les textes, etc.
C'était une expérience assez riche parce qu'on a brainstormé sur ce qu'on allait raconter... Voilà, on a un espace, il faut parler de l'histoire des mathématiques : qu'est-ce qu'on raconte ? Il faut choisir des histoires parce qu'on ne peut pas tout raconter. C'était très intéressant du point de vue des échanges avec les collègues. Et puis, j'ai aussi joué le rôle de coordinatrice scientifique, pour avoir une vue d'ensemble, échanger sur les espaces, faire la synthèse des groupes de travail. Ça s'est poursuivi avec la réalisation, suivie par une équipe plus resserrée : la muséographe, la cheffe de projet, Sylvie Benzoni, la directrice et puis moi-même pour discuter avec les personnes qui réalisaient l'exposition. J'avais l'habitude de dire que notre premier public était les personnes qui ont réalisé les dispositifs, parce qu'ils étaient parfois assez éloignés des mathématiques, il fallait donc expliquer ce qu'on voulait faire, les convaincre, et puis le réaliser.
Quelle est la place des femmes dans les mathématiques et a fortiori dans ce musée ?
Dans ce musée, il y a un parti pris qui est qu'on y voit autant d'hommes que de femmes. On a donc choisi à chaque fois de parler d'hommes et de femmes qui ont fait les mathématiques, qui ont contribué aux mathématiques. C'est vrai qu'il y a beaucoup plus d'hommes, c'est lié au fait que les femmes ne faisaient pas d'études autrefois. Mais il n'y a rien, objectivement, qui peut empêcher une fille de faire des mathématiques, mis à part si elle n'a pas l'éducation. À partir du moment où les femmes ont accédé à l'enseignement, on a pu voir que les femmes faisaient des mathématiques comme les hommes.
Quel message souhaitez-vous transmettre à l'occasion du Pi Day ?
Le monde dans lequel on vit est très numérique, très technique. Énormément de métiers nécessitent une petite compétence scientifique. C'est donc important d'avoir une formation de base en mathématiques. Par formation de base, j'entends jusqu'à la fin du lycée. Par exemple, si on veut faire de l'économie. Si on veut faire de la médecine, aujourd'hui, on demande plus de mathématiques car les développements futurs de la médecine sont très liés au développement de l'informatique, de l'intelligence artificielle. Quand on parle de médecine personnalisée, ça veut dire que c'est lié au numérique. Donc, je pense qu'on a vraiment besoin de personnes qui s'engagent vers les mathématiques en pensant à la médecine, c'est-à-dire en pensant à développer, à travailler à cette interface médecine numérique qui est très importante pour l'avenir.