Publié le 14.06.2022

Déclaration de la ministre au Conseil national de l'Enseignement supérieur et de la Recherche

Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche a prononcé un discours le mardi 14 juin à l'occasion du Conseil national de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

 

Discours

Seul le prononcé fait foi

Mesdames et Messieurs les membres du CNESER,
Mesdames les Directrices Générales,

C’est un plaisir et un honneur pour moi de me trouver devant vous, en ce lieu, qui abrite régulièrement le cœur battant de ce qui nous importe à tous, c’est-à-dire la liberté et la démocratie académique avec cette instance qu’est le Cneser, pour échanger avec vous et vous présenter mes priorités pour notre ministère. Notre beau ministère qui a cette double vocation de repousser les frontières des connaissances dans l’ensemble des domaines de recherche et de l’enseignement et d’en garantir la transmission. C’est pour moi l’occasion de vous dire tout mon attachement au dialogue social qui, associé à l’évaluation des politiques publiques, permet de les faire évoluer plus sereinement avec ce dialogue entre vous et nous.  Votre rôle est essentiel pour que notre système d’enseignement supérieur et de recherche soit à même de relever, collectivement, les grands défis que nous avons aujourd’hui.

Les priorités que je souhaite vous présenter s’articulent en deux axes principaux.

Le premier axe consiste à placer notre système d’enseignement supérieur au cœur de la formation de citoyens éclairés, désireux de prendre toute leur part dans le monde de demain et de se former tout au long de leur vie.

Pour cela, nous devons évidemment nous mettre en capacité de renforcer l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur, c’est-à-dire lutter efficacement contre les déterminismes pour renforcer les chances de réussite de nos étudiants et de nos étudiantes. C’est, je crois, une vocation et une vision partagée, une mesure renforçant le pacte républicain et un levier pour mieux préparer l’avenir de tous nos étudiants et toutes nos étudiantes.

Je souhaite que la France prenne le plus grand soin de ses étudiants et étudiantes et que l’expérience étudiante s’enrichisse de la présence de talents du monde entier. Nous devons pouvoir leur offrir un environnement de vie et de travail propices à leurs construction et épanouissement personnels. C’est pourquoi, vous l’aurez peut-être remarqué, j’ai tenu à ce que la vie étudiante apparaisse comme une ligne à part entière dans le décret d’attribution du ministère ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Je suis en effet convaincue qu’il nous faut apprécier le monde académique sous ses deux angles complémentaires : l’expérience étudiante d’une part, et celle des enseignants-chercheurs et de l’ensemble des personnels de l’enseignement supérieur d’autre part, sans qui ce travail de transmission n’aurait pas lieu.

Nous préparer aux enjeux de demain, c’est aussi intégrer la transition écologique et énergétique comme un élément saillant de la formation, de la recherche et des propres pratiques du monde académique au sein de leur établissement. Nous devons donc pleinement nous en saisir pour anticiper des transformations durables, sensibiliser et former les étudiants et étudiantes aux métiers verts de demain et montrer l’exemple en faisant de notre ministère un acteur majeur de la transition écologique et énergétique.

Pour favoriser un égal accès à l’enseignement supérieur, je souhaite aussi que la politique territoriale du ministère se poursuive et s’amplifie, en développant une politique en faveur de la mobilité étudiante au niveau national aussi. Aucun jeune ne doit avoir l’impression d’être enfermé dans son territoire et aucun jeune désireux d’étudier près de chez lui, à son rythme, ne doit s’en sentir empêché.

C’est pourquoi il est important de mener une politique en faveur d’un développement équilibré des formations sur l’ensemble du territoire et d’autre part de jouer sur la diversité et la complémentarité des universités.

Faire réussir nos étudiants et étudiantes, et continuer à travailler sur le 1er cycle est un de mes objectifs prioritaires et c’est un enjeu national pour nos jeunes. Je porterai une attention toute particulière à l’accompagnement de l’orientation des étudiants en 1er cycle conduisant soit à des poursuites d’études, soit à une insertion professionnelle associée à une formation tout au long de la vie que je souhaite renforcer. J’entends également appuyer les dynamiques croissantes en matière d’innovation pédagogique et travailler, en lien avec le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, à une vision globale de l’enseignement post bac, afin de favoriser les passerelles et le partage de bonnes pratiques au niveau de la pédagogie.  Tout cela devra être accompagné d’une réflexion sur les conditions d’exercice de ces missions afin de définir les moyens nécessaires et les leviers à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs visés.

Faire réussir nos étudiants et nos étudiantes c’est aussi poursuivre et amplifier la politique sociale du ministère. C’est à la fois être en mesure d’apporter rapidement les réponses nécessaires aux difficultés qui découlent de la guerre en Ukraine, avec des mesures en faveur du pouvoir d’achat des étudiants et étudiantes, et réfléchir à plus long terme aux moyens d’améliorer leurs conditions de vie. Il s’agit donc de faire évoluer le système des bourses, lutter contre la précarité étudiante avec un focus sur la santé étudiante et en particulier la santé mentale des étudiants et étudiantes, et garantir leur bien-être au travers par exemple de l’accès au sport et à la culture, avec là aussi un travail interministériel, que vous avons commencé avec l’extension du Pass’Sport aux étudiants boursiers de 18 à 25 ans. C’est aussi mener un travail important avec les Crous et les universités afin d’apporter une réponse globale au problème du logement et de l’accès à la restauration pour tous et toutes.

Assurer la continuité entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur est une condition essentielle pour éviter toute réforme déconnectée de l’évolution des profils de nos étudiants et étudiantes. Mais nous devons également prendre acte des transformations auxquelles seront confrontés les professionnels de demain.

Assurer une bonne orientation et une bonne insertion, c’est prendre soin de l’information donnée à chaque élève et étudiant lorsqu’ils sont en réorientation sur la diversité des débouchés professionnels. C’est aussi écouter les besoins immédiats, les besoins à 5 ans et au-delà, pour anticiper les transformations à l’œuvre et s’assurer que nos formations soient en phase avec l’état de l’art, comme des besoins de demain. C’est trouver l’équilibre le plus fin entre la transmission de savoirs fondamentaux et les modalités de leur mobilisation opérationnelle ainsi que le développement de capacités d’adaptation qui leur permettront de se former tout au long de leur parcours professionnel.

Pour mener à bien les chantiers de ce premier axe que je viens de vous exposer, je crois en une méthode que l’on souhaite renouvelée. Une méthode qui favorise le dialogue et la concertation avec l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur, et je suis très heureuse à ce titre d’être devant vous aujourd’hui, car je sais pouvoir compter sur chacune et chacun d’entre vous pour jouer tout son rôle dans les échanges à venir sur les sujets cruciaux de formation et de recherche. Ma méthode s’attachera, pour chaque établissement, à simplifier les procédures, à assouplir les contraintes et à favoriser les initiatives. Une méthode enfin qui privilégiera la planification pluriannuelle, car je crois profondément que seule une vision à long terme permet véritablement de donner du sens, de la compréhension, et de s’approprier pleinement les projets menés, tout en responsabilisant davantage tous les acteurs.

Le deuxième axe que je souhaite vous présenter consiste à repositionner le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche comme le lieu d’élaboration de la politique de recherche et du pilotage de l’ensemble de ses acteurs.

Pour y parvenir, je souhaite que nous avancions conjointement. En renforçant l’autonomie de nos établissements, c’est-à-dire en faisant confiance aux équipes de terrain. Pour cela, il nous faudra mettre en place des contrats d’objectifs et de moyens pluriannuels, qui mettent les établissements au centre et qui intègrent une évaluation a posteriori solide.  En simplifiant la mise en œuvre de la Loi de programmation pluriannuelle de la recherche dont la mise en œuvre a déjà commencé au sein des établissements. Et en allant plus loin sur la LPR, afin de renforcer et d’articuler la position de chacun des opérateurs de recherche, organismes de recherche et universités, de façon complémentaire et cohérente. Je veux mettre en place des conditions durables pour une recherche guidée par la curiosité et une recherche centrée autour des grands enjeux de société et toujours respectueuse de la diversité des champs de recherche. Il nous faudra aborder la question de la programmation de nos priorités scientifiques et porter une attention significative aux institutions et aux laboratoires.  S’assurer de cet équilibre doit aussi se traduire par un équilibre entre les financements pluriannuels aux établissements et les appels à projets, afin de respecter le temps long nécessaire à la recherche fondamentale et de promouvoir une recherche qui n’a pas peur de prendre des risques et qui contribuera aussi activement au développement d’innovations de rupture.

Cette confiance renouvelée et renforcée en l’ensemble des acteurs, ne doit pas être le corollaire d’un désinvestissement du suivi par le ministère mais au contraire d’une simplification des processus de financement, d’orientation et d’évaluation. Nous avons toutes et tous été confrontés à la diversification de nos tâches, certains diraient même leur émiettement. C’est pourquoi il nous faudra mener une réflexion collective sur les conditions d’exercice des métiers de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour que chacune et chacun puisse se recentrer sur son « cœur de métier » et retrouver le temps nécessaire à son plein exercice.

Je crois enfin que nous devons penser le triptyque formation-recherche-innovation à l’échelle européenne. Je souhaite continuer d’accompagner les universités dans leurs stratégies d’alliances, en renforçant l’articulation des politiques de recherche et d’innovation, et en prolongeant toutes les formes de collaborations. Aujourd’hui plus que jamais peut-être, notre responsabilité de promouvoir des valeurs européennes communes est immense. Le conflit armé aux portes de l’Union européenne nous le rappelle tous les jours. A ce titre, je remercie l’ensemble des acteurs de l’ESR et le programme Pause d’avoir fait preuve de tant d’investissement, d’engagement, de générosité à l’endroit des déplacés ukrainiens qui sont arrivés en France.

Pour mettre en œuvre les priorités de ce deuxième axe, je souhaite là aussi une méthode renouvelée, centrée sur la concertation avec toutes les parties prenantes, et dont l’ambition est de fournir le cadre le plus simple et le plus efficace pour l’ensemble de nos collègues.

Vous l’aurez compris, je ne pourrai pas mener les chantiers que j’ai présentés à travers ces deux axes, sans vous, toute la communauté et les établissements.

Je connais les attentes et les inquiétudes, souvent légitimes, remontées par nos communautés. Les constats sont souvent partagés sur le manque de moyens, le manque de reconnaissance, sur le rythme non adapté à une recherche de haut niveau et un encadrement des étudiantes et des étudiants qui n’est pas à la hauteur de l’avenir de notre jeunesse et des défis auxquels ils auront à faire face.

Les solutions ne sont pas simples, et elles demandent un temps long et un calendrier raisonné et raisonnable. Je ne prétends pas me présenter à vous aujourd’hui en brandissant une « baguette magique ». Elle n’existe pas et elle est pas là dans un tiroir. Les solutions que nous devons apporter devront être discutées et partagées. Ce dialogue devra exister aussi bien concernant les grandes lignes politiques à construire que concernant leur mise en œuvre opérationnelle, qui est essentielle pour nos établissements et l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche.

C’est pourquoi, je le redis, je suis particulièrement intéressée par ce premier échange avec vous aujourd’hui, mesdames et messieurs les membres du Cneser, afin de pouvoir commencer à poser les bases de ce dialogue utile et nécessaire. Nous avons tant à faire, et nous sommes devant des défis pour notre jeunesse et nous avons à le faire ensemble.

Je reste bien sûr avec vous pour entendre vos interventions, et je poursuivrai par ailleurs les rencontres avec l’ensemble des organisations que vous représentez.

Je vous remercie.

 

Contact

Service presse du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR)

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