Je suis très heureuse d’être parmi vous pour la clôture de cette 6ème édition du Toulouse Space Show.
Si l’an dernier une fusée Ariane 5 baptisée "Ville de Toulouse" emportait un peu de la Ville rose dans l’Espace, inversement le spatial est ici chez lui : l’Espace a définitivement trouvé en Toulouse sa capitale sur la Terre. Formation, recherche, industrie : Toulouse engage en effet toutes ses forces dans la course aux étoiles.
Il était donc naturel que la communauté internationale s’y retrouve tous les deux ans à l’occasion du Toulouse Space Show. Je tiens à remercier le CNES, la Région, son agence de développement AD’OCC, Toulouse Métropole et la C.C.I. Toulouse Haute-Garonne pour l’organisation de cette nouvelle édition, qui a permis, j’en suis sûre, à de nouveaux partenariats de se tisser, à de nouveaux projets d’émerger, à de nouvelles idées d’éclore. Car la conquête de l’Espace exige toujours plus de coopérations pour encore plus d’innovations. Pourquoi ? Parce que l’Espace, berceau du Big Bang, est devenu le lieu de toutes les ruptures.
L’Espace a toujours représenté pour les hommes la tentation ultime, faisant de la Terre, plus qu’un lieu de séjour, un point de départ. Cette promesse d’ailleurs fait toujours vibrer nos âmes d’explorateurs mais ce n’est plus notre seul défi : aujourd’hui l’Espace est aussi le détour nécessaire pour mieux vivre ici-bas, en bénéficiant collectivement de nouveaux services fondés sur les technologies spatiales et en vivant en bonne intelligence avec notre planète.
Si l’Espace a des milliards d’années, les hommes ne l’explorent que depuis un peu plus d’un demi-siècle. Et aujourd’hui dans ce territoire habitué aux révolutions, quelque chose est en train de changer, et de nouveaux acteurs apparaissent.
Ces nouveaux acteurs, ce sont d’abord des États, et la Chine est de ceux-là. Si elle est cette année l’invitée d’honneur du Toulouse Space Show, c’est parce qu’elle est une étoile montante du spatial. J’en veux pour meilleure preuve le succès de ses lanceurs Longue Marche, de son système de navigation Beidou ou encore de ses missions scientifiques lunaires. La France ne s’y est pas trompée, en nouant avec la Chine deux partenariats exceptionnels, qui permettent à nos deux pays d’avoir un œil sur l’univers et un œil sur la planète bleue avec CFOSat et SVOM, dédiés à l’observation des océans et au phénomène physique des sursauts gamma.
Ces nouveaux acteurs, ce sont aussi des start-up, souvent issues d’autres secteurs comme le numérique, et dont l’énergie et l’envie d’innover constituent une richesse et une chance pour le secteur spatial, bien plus qu’une menace.
Avec l’émergence de ces nouveaux acteurs, étatiques comme privés, il importe que nous, Français, Européens, ne rêvions pas petit quand nous avons tous les atouts pour voir grand. Les grands acteurs spatiaux ont aujourd’hui pris conscience de ce phénomène et enclenché une dynamique très positive. C’est le cas de l’Union Européenne qui a décidé de consacrer au spatial un budget de plus de 16 milliards d’euros sur la période 2021-2027, en se fixant les plus grandes ambitions, comme l’ont fait les Chefs d’État français et allemand au sommet de Meseberg la semaine dernière, en s’engageant à travailler main dans la main pour tirer pleinement profit des possibilités offertes par le NewSpace, mais également en réaffirmant leur plein soutien au programme Ariane 6.
Car notre meilleur atout pour atteindre ces grandes ambitions, c’est bien le lanceur Ariane 6 : pas d’espace, sans accès à l’espace. Ariane 5 s’est imposée au fil des années comme une référence mondiale en matière de fiabilité, et cette qualité est le fondement de toutes les autres. Des efforts considérables ont été faits pour rendre plus compétitif l’accès à l’espace via Ariane 6 et je tiens à remercier l’Agence spatiale européenne, le CNES et l’industrie pour leur entière mobilisation. Vos efforts sont en train de payer !
Ces efforts, nous allons les poursuivre dans la durée, car l’innovation ne doit jamais s’arrêter, elle ne doit jamais ralentir. L’Europe dispose aujourd’hui d’atouts majeurs : ses champions industriels, ses agences spatiales, ses scientifiques. Ces acteurs sont à l’œuvre pour construire le futur de l’Espace : je pense par exemple au moteur de fusée réutilisable Prometheus, au ballon Stratobus de Thales Alenia Space, qui partira à la conquête de la stratosphère, ou encore à la ligne d’assemblage de satellites OneWeb conçue par Airbus.
Il faut maintenant aller plus loin car la course à l’innovation n’attend pas. Dans cette course à l’innovation, nous aurions tort d’opposer grand groupes et start-up, entreprises historiques et nouveaux acteurs. Tous deux doivent bien au contraire avancer main dans la main : c’est ainsi qu’ils créeront les innovations de demain. Partout dans notre pays ce rapprochement est en marche : ce sont les incubateurs qui éclosent au sein d’Airbus ou de Safran, c’est CosmiCapital, le fonds d'investissement lancé par le CNES pour soutenir des start-up dans le domaine des satellites, des lanceurs et des nouveaux services, ce sont les 4 Boosters qui aident les start-up à s’approprier les données spatiales pour les transformer en services fortement innovants. Leur succès est tel que nous venons de labelliser, avec Florence Parly et Bruno Lemaire, 3 nouveaux boosters implantés en Auvergne Rhône Alpes, en Guyane et dans le Pôle métropolitain Strasbourg-Mulhouse-Colmar : je tiens à les féliciter.
Permettre aux acteurs de l’innovation de parler le même langage, encourager les échanges entre la recherche et l’entreprise, c’est ce à quoi je m’emploie, avec mes collègues du gouvernement. Notre objectif est de faciliter la mobilité entre laboratoires, start-up et grands groupes, de financer des projets d’innovation de rupture et d’accompagner les équipes lors des phases les plus risquées de leurs projets. C’est ainsi que nous construirons un espace de dialogue plus fluide, plus simple, plus confiant, où toutes les énergies, scientifiques, académiques et entrepreneuriales, pourront se rencontrer librement autour d’une idée que tous auront à cœur de voir éclore, mûrir et se transformer en succès commercial.
Pour que la magie de l’innovation opère, il faut en prendre soin dès la première étincelle et savoir l’accompagner tout au long du chemin qui va de l’idée au marché, en veillant à lever tous les obstacles qui se dressent sur son passage. À chaque étape, l’Etat sera là, en soutenant la création d’entreprises innovantes avec des prix comme I-lab que je remettrai la semaine prochaine, en accompagnant le start-uper dans son parcours au sein d’incubateurs, en finançant les projets à fort potentiel avec le fonds de 10 milliards d’euros en faveur de l’innovation de rupture.
Car finalement au bout du chemin, au-delà du marché, qu’y a-t-il ? Le citoyen. Et le spatial n’est pas avare de retombées sociales positives. C’est tout le paradoxe de l’Espace d’être à la fois lointain et inaccessible et en même temps si essentiel à la vie quotidienne de chacun. C’est dans l’espace que se joue la réduction de la fracture numérique. En finir avec les zones blanches et apporter le haut-débit à l’ensemble de notre territoire, c’est justement l’ambition du satellite Konnect, 100% made in France, magnifique démonstration de ce que la filière spatiale française sait faire lorsqu’elle unit ses forces. C’est aussi dans l’espace que se prépare la mobilité autonome qui devient possible avec Galileo alors qu’elle ne l’était pas avec le GPS. Au-delà du quotidien, c’est aussi grâce à l’Espace que l’humanité peut mieux faire face aux catastrophes naturelles. On sait ce que le travail des secouristes qui se sont rendus sur les zones touchées par l’ouragan Irma doit aux clichés du CNES. Plus généralement, c’est depuis l’Espace que l’on veille sur la santé de la planète : sur les 50 paramètres utilisés par le GIEC pour suivre l’évolution du climat, 26 ne peuvent être mesurés sans la contribution décisive de l’Espace.
Aussi, ce ne sont pas uniquement nos grands industriels et nos startupers du numérique qui doivent se lancer à la conquête de l’espace : c’est la société tout entière. Le concours ActInSpace l’y invite en lui offrant l’occasion de s’approprier les technologies du spatial et je me réjouis de voir les étudiants si nombreux parmi les participants. Je reconnais bien là, chers étudiants, votre énergie d’entreprendre qui est une des plus précieuses richesses de notre pays et qu’il importe de stimuler encore davantage !
Je sais combien vous avez vibré, comme tous les Français, devant l’exploit de Thomas Pesquet. Et je crois que les rêves qu’il a inspirés à la jeune génération sont aussi précieux que les données scientifiques récoltées grâce à son vol. Car ils portent en germe nos audaces futures.
Je voudrais donc m’adresser aux enfants et aux étudiants qui sont dans l’assistance. Peut-être serez-vous les premiers touristes de l’Espace à passer vos vacances dans une station spatiale, peut-être serez-vous les premiers à fouler le sol martien : en tout cas, ne pensez jamais que c’est trop fou ou trop beau pour vous ! Quels que soient vos objectifs, lorsque vous buterez sur un obstacle, lorsque vous vous direz "je n’y arriverai pas, ce n’est pas pour moi", contemplez le ciel et rappelez-vous ce que les hommes ont été capables d’y faire. Car je crois que c’est cela, aussi, que nous offre la conquête spatiale : une réserve d’espoir pour les jours où l’on se heurte à l’impossible.
Alors, merci à tous, chercheurs, industriels, start-upers, de faire de l’espace un terrain fertile, fertile en découvertes, en innovations, en croissance.