Le rapport 2023 du CESP est le sixième et le deuxième rédigé sous la Présidence de Gilles Roussel. Il s’inscrit dans la continuité de ses précédents rapports1 tant d’un point de vue méthodologique que dans les axes de travail annoncés dans les perspectives du rapport 2022. La méthodologie du CESP, éprouvée depuis plusieurs années, s’ancre dans une trilogie d’études de cas autour d’un territoire, d’un type de candidature et d’un type de formation. Il s’agit d’analyser le fonctionnement de Parcoursup en s’approchant au plus près des réalités du terrain et de l’expérience vécue par les candidats afin d’identifier des préconisations allant du général au particulier.
Répondant aux missions du CESP de veiller à l’amélioration continue du fonctionnement de la plateforme Parcoursup, le comité a conduit cette année ses travaux à partir d’une région : les Hauts-de-France ; d’un type de formation créé en 2019 : le Bachelor universitaire en Technologie (BUT), étude qui a été élargie aux BTS pour une vision consolidée des formations supérieures courtes professionnalisantes ; et du suivi d’une population particulière : les étudiants en réorientations. Cette analyse vient compléter celle réalisée l’année dernière sur les étudiants en reprise d’études.
Comme dans son rapport 2022, le comité a souhaité revenir dans un premier chapitre sur quelques sujets généraux : la finalité du baccalauréat, questionnée par l’évolution du calendrier des épreuves de spécialité ; la transparence des critères de classements des candidatures, question récurrente dans les rapports du CESP ; le pilotage de l’offre de formation trop peu questionnée ; l’accélération de la convergence de la procédure, avec le calendrier de classement des voeux ou la gestion des données d’appel. Le comité s’est également penché sur deux sujets qu’il a souhaité particulièrement approfondir dans ce rapport et qui répondent à ses grilles d’analyse d’efficacité, d’équité, de transparence et de sécurité.
Ainsi, les travaux du CESP se sont tout d’abord intéressés au sujet relatif à la sécurité et à la sûreté du stockage ainsi qu’à l’utilisation des données sur la plateforme Parcoursup. En effet, le comité souhaitait revenir sur des aspects plus techniques de la plateforme qui n’avaient pas été traités dans ses précédents rapports. Enfin, partant du constat de l’importance prise par l’offre de formation privée dans le paysage de l’enseignement supérieur, le comité a voulu aborder les problématiques inhérentes à l’ouverture de la plateforme Parcoursup à ces formations. Les modalités de leurs inscriptions sur Parcoursup, la nature de la reconnaissance par l’État de ces formations ainsi que les garanties que cette inscription offre aux candidats sur la qualité de ces formations et sur leurs débouchés professionnels, sont au coeur de cette réflexion. Ces interrogations sont également partagées pour l’apprentissage, dont le développement se matérialise par l’apparition de nombreuses formations privées.
D’un point de vue global, et même si Parcoursup demeure un dispositif encore en évolution, le baromètre Parcoursup CSA - Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche rend compte d’une amélioration globale à la fois de l’image et de l’utilisation de la plateforme d’admission à l’enseignement supérieur auprès de ses usagers. Cette amélioration générale du taux de satisfaction, repérable à toutes les étapes du processus d’entrée dans l’enseignement supérieur, témoigne d’une appropriation plus grande de Parcoursup notamment par les lycéens mais aussi, plus largement, par l’ensemble des utilisateurs de la plateforme.
D’expérience, les préconisations formulées par le CESP à partir de ses observations sur le terrain sont prises en considération pour améliorer le fonctionnement de Parcoursup. De ce point de vue, la prise en compte des recommandations formulées dans le cinquième rapport du comité sur la convergence des calendriers du baccalauréat et de la plateforme, avec accélération de la procédure principale, a permis une évolution positive lors de la session 2023. Dans ce présent rapport, le comité consacre une partie de ses préconisations à l’encadrement et au contrôle des formations privées présentes sur Parcoursup par la puissance publique (7, 9, 10, 11, 19). Il a aussi tenu à insister sur l’inscription ferme de l’apprentissage dans le paysage de l’enseignement supérieur (15, 16, 17) tout en continuant à apporter des points d’attention autour de la transition bac-3/+3 (1, 2, 4, 8, 13, 20, 21).
Liste des recommandations du comité
- Construire et diffuser des banques d’épreuves standardisées pour les lycées, former les enseignants à les utiliser pour noter leurs élèves de façon plus harmonisée dans les dossiers Parcoursup.
- Aller vers plus de transparence dans les critères quantitatifs utilisés pour le pré-classement des candidats, y compris la prise en compte des spécialités. Accompagner les CEV dans leurs pratiques de classement, leur permettre de les assumer et de les expliciter sans risque, les faire évoluer, les inciter à partager leurs pratiques avec d’autres formations similaires.
- Les candidats ayant accès aux premières réponses des formations le 30 mai, placer la date de la hiérarchisation des vœux vers le 10 juin. Cette date se trouverait à mi-chemin entre l’ouverture des propositions des formations et le début du baccalauréat.
- Former et accompagner les responsables des formations pour mieux gérer les données d’appel. Transformer les quotas de places en quotas d’appel pour les bacheliers professionnels en BTS et pour les bacheliers technologiques en BUT.
- Le CESP recommande la création d’un livret numérique « formation tout au long de la vie » qui permettrait aux candidats en réorientation et en reprise d’études de disposer de documents authentifiés à l’attention des formations auxquelles ils postulent. Il recommande également d’étendre aux formations supérieures des lycées la demande d’autorisation préalable (DAP) imposée aux candidats ne provenant pas de l’espace européen pour l’inscription dans la plupart des autres formations d’enseignement supérieur.
- Le CESP apprécie la mise à l’agenda de la publication prochaine de l’algorithme actuel de calcul de l’ordre d’affichage des formations. Il recommande qu’à l’avenir les établissements d’enseignement supérieur soient consultés pour les évolutions des critères d’ordre d’affichage.
- Face au développement d’un marché privé de l’orientation, le CESP encourage les initiatives sans but lucratif, en premier lieu d’émanation publique, exploitant les données de la plateforme Parcoursup à des fins d’aide à l’orientation.
- Travailler sur l’information des parents et des élèves bien avant la terminale pour leur expliquer les différentes voies possibles, avec leurs caractéristiques, et les mettre en garde sur les pratiques douteuses de certains organismes.
- Compléter les informations disponibles sur les fiches formations de Parcoursup par des éléments fiables et comparables qui éclairent le candidat sur l’organisation et la qualité de la formation, en indiquant notamment : la date de création de la formation ; le nombre d’inscrits en 1re année et le nombre de présents aux examens ; le mode d’organisation des enseignements en précisant la part en présentiel et la part en distanciel ; les poursuites d’études possibles après l’obtention du diplôme préparé ; le taux et la qualité de l’insertion professionnelle des diplômés.
- Lier l’inscription sur Parcoursup à la seule qualité de la formation et non au statut de l’établissement (public ou privé). Pour ce faire, il est nécessaire de :
a. Procéder à une remise à plat de toutes les formes de reconnaissance existant actuellement (y compris s’agissant des formations professionnelles, de la certification Qualiopi) et parvenir à une définition commune d’un certain nombre de critères minima de qualité pour être inscrits sur la plateforme Parcoursup.
b. N’inscrire sur la plateforme Parcoursup, à côté des formations conduisant à un grade ou à un diplôme national ou à un diplôme reconnu par l’État, que les seules formations dont la qualité pédagogique est garantie par l’État, dans le cadre d’une évaluation périodique portant notamment sur le contenu de la formation dispensée et les débouchés offerts en termes d’insertion et de poursuites d’études.
c. Engager une réflexion interministérielle (éducation, enseignement supérieur, travail, emploi et formation professionnelle) sur les conditions d’obtention de la certification Qualiopi pour les formations en apprentissage. - Prévoir la possibilité de retirer de la plateforme les formations qui ne remplissent pas ces critères de qualité et ne respecteraient pas les engagements de la charte Parcoursup, ce qui suppose de :
a. Mettre en place un dispositif efficace de contrôle et de sanction, avec les moyens humains et matériels pour effectuer ces contrôles.
b. Donner les moyens, notamment aux rectorats, de réaliser les contrôles des organismes de formation par apprentissage, tels qu’ils sont prévus par la loi. - Faire un bilan du dispositif des « oui si » au regard du positionnement proposé aux étudiants dans le cadre des contrats pédagogiques de réussite. Faire circuler les pratiques concernant les positionnements prévus pour les étudiants en début de première année universitaire.
- En lien avec la recommandation 17 du précédent rapport : construire au niveau académique, ou de la région académique, un cadre d’accompagnement pour la transition lycée-supérieur s’appuyant sur des moyens humains compétents et coordonnés, avec des outils efficaces pour favoriser des réorientations précoces (rapides mais réfléchies) et valoriser les places restées vacantes dans les formations supérieures en début d’année, après la fermeture de Parcoursup.
- Permettre aux établissements d’enseignement supérieur de devenir des « établissements d’origine » dans Parcoursup et de valider les dossiers de leurs étudiants en réorientation. Permettre que soient indiqués clairement et distinctement les crédits ECTS obtenus ainsi que l’avis du directeur d’études sur l’étudiant et sur sa demande de réorientation, en valorisant l’engagement de l’étudiant dans son parcours de réorientation, s’il en a suivi un.
- Porter une attention particulière à la promotion de la filière technologique, en particulier pour valoriser les bacs technologiques industriels auprès des jeunes et de leurs familles. Cette recommandation s’inscrivant dans les ambitions de la loi ORE relative à l’orientation et à la réussite des étudiants contribuerait à la satisfaction des besoins de réindustrialisation du pays, et assurerait une meilleure cohérence des réformes qui ont suivi cette loi et, spécifiquement, celle créant le BUT.
- Considérer les STS comme des formations d’enseignement supérieur à part entière et modifier les textes en conséquence. Clarifier la situation des quotas de bacheliers technologiques en BTS et les supprimer notamment pour les BTS Production.
- Développer l’apprentissage public dans les lycées en rendant performants les CFA académiques et en simplifiant la gestion du service des enseignants, ce qui impliquera une révision de leur statut. Développer également l’apprentissage public dans les BUT en utilisant, si nécessaire, deux contrats successifs.
- Pour une régulation de l’offre, lancer un travail de concertation régional sur les besoins de chaque territoire en termes d’offre de formation en BTS et BUT, incluant l’apprentissage, en regard des projections économiques, sociales et démographiques. Rééquilibrer sur tous les territoires l’offre de BUT et l’offre de BTS.
- Fournir pour chaque formation des informations claires et transparentes sur les conditions de poursuite d’études.
- Garantir la qualité de l’accompagnement des lycéens vers les études supérieures.
a. En mettant en place des outils efficaces et des moyens horaires permettant de proposer à tous les élèves, dès la classe de seconde, un accompagnement personnalisé à l’orientation.
b. En organisant des formations systématiques et régulières pour les professeurs principaux de lycée — avec l’appui des établissements du supérieur — afin d’harmoniser les pratiques inégales d’accompagnement à l’orientation. - Faire un bilan des cordées de la réussite en mesurant comment les établissements du supérieur en tiennent compte et en vérifiant leur efficacité comme « levier d’égalité des chances ».
- Lancer et financer des études précises sur la mobilité dans les territoires dans chaque région académique à l’aide des laboratoires de recherche de géographie sociale, croiser les facteurs géographiques et sociaux. En tirer des conséquences sur l’implantation des formations, sur les transports, sur les aides sociales et sur le logement étudiant.
Retrouvez les précédents rapports du CESP ici.